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Décryptons la stratégie de Honor : peut-on faire mieux avec moins ?

Honor est arrivé en France il y a à peine un an avec le Honor 6. En septembre dernier, la marque a dévoilé, pour l’Europe, le Honor 7 et ce dernier est en train d’absorber une bonne partie de ce que l’on appelle l’open-market, soit toutes les ventes de smartphones hors opérateurs. Nous avons enquêté sur la stratégie employée par la filiale de Huawei, pour mieux comprendre ses tarifs affichés.

La recette de Honor est assez simple à comprendre à première vue : des smartphones bien équipés aux caractéristiques techniques intéressantes et des étiquettes de prix qui ne font pas bondir les portes-monnaie. Si Honor s’est imposé auprès de la plupart des distributeurs et revendeurs, la marque a profité de l'occasion pour lancer sa plate-forme de vente directe, VMall.eu, où l’on retrouve également des produits Huawei.

 

Le produit

Mais intéressons-nous plus en détail au Honor 7.

Après notre test, je me suis dit qu'avoir l'avis d'un spécialiste du hardware, Guillaume Poggiaspalla - auteur du livre Machines de Jeux : Architecture des Consoles de Jeux Vidéo - était une bonne idée. Pour rappel, l’architecture SoC du Honor 7 est un Kirin 935 de HiSilicon. Voilà ce qu'il a pu en dire :

« Le CPU est 64 bits et possède une configuration un peu étrange puisqu'il a 4+4 cœurs : 2 à 2,2 GHz pour la performance et 2 à 1,53 GHz pour les tâches légères (en mode économie d'énergie). Cela dit, ce sont des cœurs Cortex A53, il ne s'agit donc pas du haut de gamme de chez ARM (les Cortex A57). 

Ce sont des CPU plus simples, moins rapides (in-order et dual issue) donc moins chers à produire. Ils sont d'ailleurs gravés en 28 nm, un processus éprouvé. Sa rentabilité est bien supérieure au nouveau 14 nm de Samsung utilisé pour le dernier Exynos du Galaxy S6, ou même du 20 nm (en dual A57 qui plus est) du Snapdragon 808 utilisé dans le LG G4 ».

Le terminal jouit en outre de 3 Go de mémoire LPDDR3, le standard en quelque sorte, alors que les toutes dernières architectures supportent la LPDDR4, mais cela reste « d'ailleurs assez gadget », d'après Guillaume. Enfin, côté GPU, on trouve du Mali T628 (en quadricœurs) : c'est donc, là encore, la génération précédente, ce qui peut expliquer également quelques économies par ici. Hisilicon est un gros client (le plus gros designer de puce chinois) du fondeur TSMC et ce dernier doit être « ravi de pouvoir amortir ses chaînes à 28 nm : il doivent lui faire des prix très intéressants », estime alors Guillaume.

Pour la photographie, un des points forts de ce produit, Honor a choisi le capteur Sony IMX 230  à l’arrière. Sony a une énorme présence sur le marché avec ses capteurs photo, pour alimenter non seulement ses propres produits, mais aussi de nombreuses marques, Apple inclus, d'autant que le Japonais a racheté récemment l'usine de Toshiba, l'évinçant du marché. Le Sony Exmor RS IMX230 utilise un capteur 1/2,4 , un CMOS de 21 millions de pixels avec 192 points AF. C’est la version améliorée du capteur qui équipe les Sony Xperia Z3 et Z3 Compact, à titre de comparaison. On le retrouve sur le Motorola Moto X Style (vendu à partir de 500 euros).

Comme nous allons le voir, la concurrence basée uniquement sur le prix n'a pas l'unique stratégie de Honor. Certes, leurs téléphones sont moins chers que ceux de gros concurrents comme Samsung ou Sony, et effectivement nous n’avons pas le produit le plus performant, mais, ils se différencient nettement des modèles les moins chers du marché : impossible de les comparer aux smartphones noname ou en marque blanche qui inondent la Chine et qui sont souvent des produits créés à partir de ce que l’on appelle du « reverse engineering », une méthode qui consiste à étudier de près des produits, comme ceux de Samsung, Sony, HTC ou Apple pour les reproduire en partie ou en totalité.

Le Honor 7 possède un boîtier robuste, un écran de qualité, des performances suffisantes pour la plupart des usages et une batterie raisonnable. Il ne se casse pas facilement, contrairement aux différentes imitations moins chères qui commencent à avoir des problèmes après seulement quelques semaines d'utilisation. Enfin, Honor a choisi de construire sa propre version d'Android, une interface appelée EMotion UI, à l’image des produits Xiaomi avec MIUI : les smartphones Honor obtiennent donc de nouvelles fonctionnalités que l’on ne retrouve pas sur les autres appareils Android standards ainsi que de nombreuses options de personnalisation.

 

La distribution

Honor s’est également rendu compte que la vente de smartphones à un coût réel n’est pas une stratégie durable à long terme. C'est pour cela qu'ils ont décidé de se rapprocher du modèle d’Amazon : couvrir le coût des appareils et optimiser toute la chaîne de valeur, mais aussi réduire les marges. Interrogée, Yang SUN, Directrice Marketing de Honor France, nous l'a confirmé. Cette différence de prix vient des économies réalisées sur le coût des ventes et des charges générales des distributeurs, mais aussi sur la communication et le marketing : « la qualité est la même que chez Huawei sur le contrôle des produits, la production, les composants : nous n’avons enlevé aucun morceau et nous n’avons remplacé aucune pièce par une moins onéreuse », affirme-t-elle, avant de poursuivre : « La France est un terrain d’essai pour Honor au niveau de sa stratégie globale, car le modèle d’affaire en France a une image plus évidente et claire par rapport aux autres pays européens. C’est pour ça que l’on essaye d’offrir le meilleur produit avec les meilleurs moyens. ».

Côté distribution, tout est purement en ligne aujourd’hui. La marque a commencé à travailler avec Amazon, puis ensuite avec divers purs players, comme Rue Du Commerce ou LDLC. Récemment, Honor a lancé VMall.eu, une plate-forme de vente directe, où l’on peut également retrouver certains produits Huawei. Et encore plus récemment, Free Mobile, un opérateur.

Pour comprendre leur relation à la marque, j’ai interrogé plusieurs spécialistes au sein de différents purs players qui ont choisi de rester anonymes, car les contrats qui les lient à Honor sont confidentiels. Ils ont cependant tous tenu le même discours : les marges proposées par Honor sont intéressantes et sont souvent meilleures que celles proposées par les grandes marques traditionnelles : « Les opérations de promotion boostent vraiment les ventes, et nous avons réussi à mettre en place différents concours sur les réseaux sociaux pour offrir des produits. Enfin nous avons de bons retours, ce qui nous encourage à les mettre en avant », m’a confirmé un responsable des achats qui travaille pour un grand distributeur français.

 

La communication et la promotion

Voilà un point crucial dans la stratégie de Honor.

Tout d'abord, avec les ventes flash, à travers leurs partenaires comme Amazon, mais aussi via leur plate-forme directe. Ils ne sont pas les pionniers, mais ils le font régulièrement ; et surtout avec peu, voire pas du tout de publicité. La vente flash est assez simple à comprendre : il s’agit d’une vente en quantités limitées pendant des périodes extrêmement limitées. Ces ventes créent toujours de l'anticipation et un effet d'urgence -- qui restent de grands facteurs pour gagner les esprits et les cœurs des consommateurs. Inutile de rentrer dans les détails, mais ces opérations permettent à Honor d’afficher de très beaux chiffres de ventes, les stocks sont écoulés rapidement et cela fait écho sur les médias sociaux. Vendredi prochain, Honor a d'ailleurs affiché des promotions pour le Black Friday. Il est possible d'acquérir le Honor 7 pour 250 euros en profitant de deux opérations, la première une Offre De Réduction (ODR) classique, la seconde consiste à partager son avis sur les réseaux sociaux à travers "J'aime partager".

La marque a également réussi à exploiter la puissance des médias sociaux et des médias spécialisés, comme sur FrAndroid. Non seulement par la diffusion de leurs annonces et de leurs messages, mais en s’engageant activement avec la communauté. Ils créent régulièrement des rendez-vous avec les membres actifs, et ont mis en place un système de gamification pour encourager les membres à être actifs.

« La stratégie de marketing de Honor reste le bouche-à-oreille : nos dépenses marketing sont surtout pour nos fans, les médias spécialisés, et les réseaux sociaux ou l’on crée des campagnes basées sur les vraies expériences de produits. Par exemple, nous ne travaillons pas avec une agence digitale, nous faisons faire nos créas et nos campagnes par notre propre équipe. Du coup, premièrement nous économisons, deuxièmement, nous restons vraiment proches de nos communautés et enfin, intégré dans le cycle, cela rend le produit moins cher. », m’a confié Yang Sun.

 

 

 

Honor, le perturbateur

La fabrication efficace, une volonté d'accepter une faible marge, les avantages inhérents aux coûts de distribution en ligne directe et à l'absence de publicité sont de nombreux points qui expliquent la réussite de Honor. Bien entendu, il y a également d'autres facteurs qui contribuent à la réduction des coûts - y compris l’orientation marketing - comme les  partenariats forts avec Gameloft ou Parrot. Ce qu'on retient le plus, c'est pourtant l'investissement dans la communauté, qui est loin d'être un standard.

Mais revenons à notre question initiale : peut-on faire mieux avec moins ? Le cas de Honor est intéressant, car cette combinaison de faibles prix et de produits honnêtes est un message fort pour les consommateurs. Un produit qui n'a (presque) rien à envier aux produits haut de gamme, et qui propose mieux que les produits au même prix : même s'il est vendu à 350 euros, on retrouve le Honor 7 autour de 320 euros et parfois jusqu’à 280 euros. Sans engagement, bien sûr.

Contrairement à Huawei, Honor a mis le commerce électronique au cœur de son ADN, et dispose de très peu de concurrents similaires en Europe. D'ailleurs, c'est une recette que l'on retrouve en Chine chez Xiaomi, une marque chinoise qui s'est rapidement glissée parmi les plus grands fabricants au monde. Néanmoins, contrairement à Honor, cette dernière investit encore timidement dans sa stratégie d'internationalisation, malgré le recrutement de Hugo Barra - un des cadors d'Android. La dernière marque que l'on pourrait relever qui a mis en place une stratégie similaire est OnePlus, mais elle ne s'appuie pas sur des antennes locales et ne propose ses produits que sur son site de vente en ligne ou chez des importateurs chinois.