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Carl Pei, l'homme derrière OnePlus

Lors du Web Summit, nous avons rencontré Carl Pei. Il s’agit du cofondateur de OnePlus, un personnage emblématique de cette nouvelle entreprise chinoise. Pendant l'entretien qu'il nous a accordé, nous avons évoqué sa stratégie, les leçons apprises, ses sentiments sur ses deux premières années et bien entendu, l’avenir de OnePlus.

Tout n'a pas été si lisse pour OnePlus depuis les deux premières années du lancement. Dès le début, un petit scandale a éclaté quand l'une de ses campagnes de marketing a demandé aux femmes intéressées par ses produits de proposer une photo d’elle. Il y a également eu le problème d’écran, où la marque a manqué de communication. Sans oublier le système d’invitations, qui a été un vrai cauchemar pour le communauté. Et pourtant, OnePlus reste une des marques emblématiques de l’écosystème Android, mais aussi de tout le secteur de le téléphonie.

 

« Qu’est-ce que c’est, OnePlus ? »

J’ai commencé l’entrevue en lui demandant simplement, « Qu’est-ce que c’est ,OnePlus ? ». La question peut être à première vue insignifiante, mais je l’invitais ainsi à me confier les raisons de cette aventure. « Les gens pensent qu’il s’agit d’une marque de téléphone qui vend de très bons produits avec des caractéristiques élevées à un prix bas. Ce n’est pas faux, mais ils passent à côté de l’essentiel (…). Je me souviens, à l’été 2013, j’étais chez Oppo à l’époque, nous avons tous posé nos smartphones sur la table de réunion. Je me suis alors demandé : Pourquoi les gens autour de cette table ont tous des iPhone ? C'est fou, nous fabriquons des smartphones Android ». 

« Existe-t-il une seconde marque de smartphones clairement identifiée comme indispensable, iconique, dans la tête des consommateurs ? », m’a-t-il demandé. La réponse n’est pas claire, je lui ai répondu fébrilement Samsung - en parts de marché -, mais sans être satisfait de ma réponse. Carl m’a repris. « Il n'a pas de seconde marque. En tout cas, ce n’est pas clair. Certaines personnes répondent Samsung, d’autres Xiaomi, certains ont dit Sony. C’est là que l’idée de OnePlus est née, il fallait fabriquer de meilleurs produits ».

Tout cela est surprenant sans vraiment l'être. L’iPhone n’a pas perdu de son aura, plusieurs années après le décès de son apôtre, Steve Jobs. Apple prend quasiment tous les profits de l’industrie, avec une part de marché globale de moins de 10%, et pour Carl Pei, "sans argent, pas d’investissement, pas d’innovation".

Oppo est une entreprise solide selon Carl, mais il voulait faire les choses seul, « à ma façon », dit-il. Pour lancer une nouvelle marque de téléphonie, il s’est basé sur les ressources d’Oppo, mais pas seulement. « Il fallait revoir tout le modèle de fixation des prix, essayer de faire d’énormes économies d’échelle, nous avons commencé sans aucun budget dédié au marketing et à la communication, nous avions des ressources, mais pas pour des campagnes de publicité ».

« Le même niveau d’attentes qu’Apple »

Il fallait créer une marque avec « le même niveau d’attentes qu’Apple », Carl Pei en est conscient, les choses ne sont pas simples dans cette industrie. Il a donc décidé de se focaliser sur un seul produit, et tout faire « pour en faire le meilleur produit ». Le fait de se focaliser sur un seul produit lui a permis de réaliser de grosses économies, mais surtout de « le faire bien ».

Comme je le disais en introduction, les choses n’ont pas été parfaites. « Nous avons surtout appris qu'il y a un énorme fossé entre l'idée et l'exécution. Je pense que notre plus grande erreur en termes de marketing a été la campagne Ladies First. L’idée initiale n’était pas mauvaise. Nous savions que notre communauté était très dominée par les hommes. Nous voulions plus de femmes impliquées. L’idée initiale était de trouver un moyen de les encourager à acheter notre produit ». Il m’a rassuré, désormais OnePlus prendra plus de recul.

Carl Pei a surtout parlé des gens, oui, nous. « Les habitudes ont rapidement changé, la façon de communiquer a été bouleversée… et les entreprises fonctionnent toujours de la même façon. Par exemple, pour le retard de commercialisation du OnePlus 2, nous avons présenté nos excuses. Combien d’entreprises s’excusent pour leurs erreurs ? Très peu. »

Nous avons continué en discutant du OnePlus One, le premier produit, « OnePlus One est disponible en différents matériaux, comme le bambou ou le bois. Ces coques ont été très bien reçues, mais nous n'avons pas réussi à créer ce que nous voulions. Par exemple, nous avons placé l'antenne à l'intérieur, ce qui rend difficile de fabriquer les coques à nos normes. L'usine qui a réalisé la coque en bambou avait un taux de rendement de seulement 30%. Cela signifiait que pour chaque 10 coques, nous en jetions sept. »

Je lui ai rappelé que son modèle d’achat sous forme d’invitations avait été une catastrophe de notre côté. « Oui. Le système d'invitations a été nécessaire à ce stade en raison de notre petite échelle. Nous ne pouvions pas nous permettre de prendre des risques de stocks. Avec le modèle classique, nous nous serions retrouvés avec un gros inventaire et nous avons déjà une marge très faible. Nous aurions été obligés de jeter cet inventaire pour libérer les flux de trésorerie, cela nous aurait faire perdre de l'argent et nous aurions pris de gros risques »Carl Pei se veut désormais rassurant : « nous sommes désormais mieux préparés, l’expérience sera beaucoup moins frustrante ».

Entre smartphone et logiciel

Cela m’a permis justement de rebondir. Comment gagner de l’argent avec aussi peu de marges ? Je n’étais pas le premier à l’interroger sur ce point. « Nous avons une marge, elle est juste faible. Mais nos coûts sont faibles, et notre marge évolue, car le prix des composants baisse avec le temps et avec l’échelle »Pour le OnePlus 2 ou encore le OnePlus X, il m’a assuré qu’il ne faisait pas de marges au lancement, « mais avec le temps et le nombre de commandes, le prix des composants baissent, et nos marges augmentent ». Une stratégie qui me rappelle celle de Sony et Microsoft avec leurs consoles de salon respectives, néanmoins OnePlus n’a pas encore d’écosystème pour lui permettre de tirer des revenus ailleurs. Enfin...

Aviez-vous remarqué que OnePlus n’est pas qu’un simplement constructeur de téléphone ? Ils sont également éditeurs de logiciels. En stoppant leur collaboration avec Cyanogen, il a édité sa propre version d’Android, Oxygen OS. Aujourd’hui, il ne compte pas vraiment réaliser des revenus avec cet OS. Néanmoins, « quand nous aurons des dizaines de millions de consommateurs, nous pourrons pousser des services qui nous permettront de faire de l’argent avec le logiciel. Mais ce n’est pas encore le moment »Il m’a fait également part de sa dernière nouveauté, « Reflexion ». Une application Android, mais également iOS pour prendre des photos de façon originale. OnePlus est désormais un éditeur d’apps.

Comme il me le disait plus tôt, ses consommateurs ont la même attente de ses produits que ceux d’Apple. Il en est donc conscient, « les excuses n’ont plus de sens. OnePlus doit devenir plus sérieux, plus stable. C’est la seule façon de toucher tout le monde, pas seulement les early adopters »Mais comment toucher plus de monde ? « Nous devons être plus professionnels, nos produits doivent être plus faciles à acheter, nos services doivent être meilleurs ». Et quand je lui ai rappelé qu’il n’avait pas de budget en marketing et en communication, « nous en avons désormais, nous allons investir dans des médias, les médias que nos utilisateurs consomment ».

Une diversification, mais uniquement dans l'univers du smartphone

Enfin, nous avons évoqué le OnePlus X, en cours de test dans la rédaction FrAndroid. « Qu’en pensez-vous ? », m’a-t-il demandé. J’ai essayé d’être plutôt honnête avec lui : à vrai dire, il ne ressemble pas aux précédents OnePlus, je trouve qu’il a l’allure d’un smartphone lambda. C’est dommage. « Vous avez raison », m’a-t-il répondu. Puis il m’a expliqué, en choisissant des matériaux comme ceux-là, le verre principalement, les variations de design ont été limitées, ils se sont donc retrouvés avec moins de souplesse que le plastique. De plus, il ne voulait pas garder le même design, après deux produits. « Nous avons regardé sur le marché, seul Sony garde le même design, et ce n’est pas un argument de réussite ».

Je l’ai interrogé également sur d’autres secteurs, l’automobile connectée, les montres intelligentes, la TV. « Je n’ai pas de TV, je la regarde seulement dans la chambre, les jeunes n’ont plus de TV, la montre, je n’ai pas encore trouvé son usage, quant à la voiture… ce n’est pas encore l’heure. Nous devons nous focaliser sur le marché des smartphones, il est énorme, des milliards de consommateurs n’ont pas encore de smartphone ».

Je pense que la réussite de OnePlus tient, en grande partie, dans cet homme, Carl Pei. La façon dont il raisonne à travers les problèmes, et la façon dont il voit le monde sont différentes. Ce n’est pas Elon Musk, mais son côté fun, intègre et désinvolte m’interpelle. J’ai terminé l’entrevue en lui demandant qui l’inspirait. « Steve Jobs m’a inspiré, mais c’était il y a quelques années. Vous pouvez apprendre de bonnes choses des autres, mais il faut ensuite penser par vous même. Je pense que Elon Musk fait de belles choses, Jeff Bezos également. Il existe beaucoup de gens cool qui font les choses bien, mais je ne pense pas qu'ils doivent être considérés comme des idoles. »