Tesla Semi : comment Tesla relève les défis du camion du futur

 

Après plusieurs reports dans un contexte d’industrialisation compliquée de la Model 3, le camion électrique et autonome de Tesla est enfin dévoilé par Elon Musk. Particulièrement dithyrambique sur son nouveau (très gros) bébé, le patron de Tesla a expliqué les atouts de son Semi sur ce nouveau marché qu’il entend, là aussi, « disrupter ».

Est-ce le bon moment ? Tesla n’a toujours pas prouvé sa rentabilité et la production en masse de la Model 3 est un « enfer », des mots mêmes de mister Musk himself. Alors faut-il se disperser dans un nouveau programme qui comporte lui aussi de sacrés défis, comme peut l’être un camion électrique ? Est-ce une fuite en avant pour séduire les investisseurs ou justement, un coup de génie stratégique pour prendre de l’avance dans un domaine au potentiel gigantesque ? L’avenir nous le dira…

Mais une chose est sûre, Tesla ne se lance pas à l’aveugle avec son magnifique poids lourd révélé ce matin en Californie dans un show typique – et agrémenté d’un invité surprise sous la forme du Tesla Roadster qui a capté beaucoup de lumière avec ses performances ultra radicales. Mais le Semi (pour semi-remorque) ne démérite pas pour autant, d’abord parce qu’il sait séduire au premier coup d’œil avec son design ultra-moderne et, même pour un outil professionnel, cela peut faire partie de la notoriété et du succès d’un véhicule. Il suffit pour s’en convaincre de voir les trucks de chez Kenworth ou Peterbilt qui sillonnent fièrement les highways.

Et selon les principes établis par le designer industriel Raymond Loewy – lui aussi un sacré visionnaire – un bon design est important pour tout objet, fût-il strictement utilitaire. Les lignes très pures du Semi sont aussi aérodynamiques qu’elles en ont l’air, voire plus : son coefficient de pénétration dans l’air est excellent avec un Cx de 0,36, alors qu’une automobile est autour de 0,25 à 0,30. La cabine avancée est minimaliste, voire austère avec le siège du conducteur au milieu et deux grands écrans tactiles horizontaux façon Model 3 de part et d’autre du volant. Quelques rangements et un strapontin complètent le tableau (pas de coin lit pour se reposer). Le pare-brise panoramique est voulu particulièrement résistant.

Daimler en embuscade

C’est un Français qui ouvre le bal pour la présentation du Semi, avant même Elon Musk ! Jérôme Guillen est en effet le patron de ce programme original chez Tesla, après avoir supervisé la Model S. C’est un ancien de chez Daimler où il a conduit, entre autres activités, un programme de poids-lourds (conventionnels). D’ailleurs, cet immense acteur du marché des poids lourd qu’est Mercedes vient de révéler au Salon de Tokyo un semi-remorque électrique, grillant la politesse à Tesla. Il s’agit du E-Fuso Vision One, de Mitsubishi Fuso Trucks and Bus Corporation, filiale du groupe allemand. Il inaugure une marque dédiée aux camions électriques (E-Fuso, donc) avec ce concept capable de 350 km d’autonomie et d’embarquer une charge utile de 11 tonnes. Une version de série est envisagée d’ici 4 ans par la marque.

D’autres projets existent comme l’américain Nikola Motor avec son projet de semi-remorque à pile à combustible Nikola One.

Quand le camion devient dragster

Le premier élément que Musk, sortant de la cabine, livre à sa foule de fans est… la capacité d’accélération de son camion, décidément une obsession américaine en général, et chez Tesla en particulier. « BAMF performance » est affiché sur scène, on vous laisse traduire vous-mêmes… Est-ce bien utile, voire raisonnable de permettre à un tel gros bébé de passer de 0 à 100 km/h en 5 secondes (sans remorque) et 20 secondes avec 36 tonnes de charge ? Peu importe, cela fait partie du show. 4 moteurs indépendants sur l’essieu arrière se chargent de propulser l’ensemble avec une transmission automatique, sous une garantie de 1,6 million de kilomètres. Côté freins, grâce à la puissance de freinage régénératif, les éléments classiques sont censés pouvoir tenir la durée de vie du camion…

Autre point crucial bien entendu, l’autonomie, le nerf de la guerre électrique. Avec moins de 2 kWh/mile, Tesla promet une consommation raisonnée. Et une autonomie annoncée entre 480 et 800 km, avec 640 km récupérés en 30 minutes de charge sur un chargeur spécifique nommé Megacharger, un nouveau réseau appelé à se développer dans le monde entier. C’est bien, mais on est loin de ce que peut faire un camion diesel classique, capable du double d’autonomie en un plein. Tout dépend du type d’utilisation et on peut imaginer que des distances moyennes de type desserte régionale seraient adaptées à un tel engin. À noter, les performances en côte du Semi sont remarquables, grâce au couple de l’électrique.

Autopilot à bord

Avant même de parler de conduite autonome, l’Autopilot livré de série permet de rester en ligne sur sa file et freiner automatiquement en cas d’urgence. La répartition automatique du couple aide à le maintenir en ligne avant une perte de contrôle. Le Semi est aussi capable de circuler en convoi autonome, suivant un camion leader avec un conducteur, comme un train sur autoroute, un principe déjà expérimenté avec des modèles conventionnels en Europe. L’ensemble est connecté pour être en relation permanente avec la centrale du gestionnaire de la flotte.

Reste le nerf de la guerre : les gestionnaires de flottes professionnelles n’ont qu’un mot à la bouche, ou plutôt un acronyme, le TCO (total cost of ownership). Tesla promet une économie d’au moins 200 000 dollars sur deux ans d’utilisation face au Diesel, tandis que le coût/mile est donné 17 % inférieur (1,26 dollar/mile dans l’exemple cité). On attend maintenant la réaction des pros sur ce marché tout de même moins sensible aux effets de mode que celui des Tesla-fans classiques, d’ici au lancement annoncé dans un an.


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