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Pourquoi il ne faut pas utiliser le mot « crypter »

Le mot « crypter » est entré, à tort, dans le langage courant. La télévision a beaucoup participé à cette popularisation en parlant régulièrement de « chaînes cryptées », ainsi qu'une mauvaise traduction de l'anglais « to encrypt », mais ce mot a de quoi rendre fous les cryptologues les plus tatillons. Et pour cause, puisque lorsqu'on comprend un petit peu mieux l'origine du mot, on se rend compte qu'il n'a aucun sens pour nos usages actuels.

Le principe du chiffrement

Il existe de nombreux cas dans lesquels nous souhaitons rendre des données ou des messages inintelligibles pour quiconque tomberait dessus. Que ce soit un simple message secret ou des données personnelles stockées dans des bases de données. Au cours de l'histoire, de nombreuses méthodes ont ainsi été imaginées pour encoder des messages. Certaines très simples, d'autres très compliquées.

Parmi les plus connues, on peut citer le code de César, qui consiste simplement à remplacer les lettres du message par la lettre suivante de l'alphabet (ou avec un décalage fixe) : les A deviennent des B, les B deviennent des C, etc. Il existe bien évidemment de nombreuses autres méthodes, hautement plus efficaces. L'Allemagne nazie utilisait par exemple une machine baptisée Enigma durant la Seconde Guerre mondiale pour chiffrer des messages en substituant des lettres par d'autres, mais en ajoutant une rotation régulière de la substitution pour éviter de toujours encoder de la même manière le même caractère.

Ce paramètre permettant de passer d'un message clair à un message codé s'appelle une clé de chiffrement. Elle peut être très simple ("avancer d'une lettre dans l'alphabet" est un algorithme facilement utilisable par exemple), ou très complexe (comme les méthodes actuelles généralement utilisées sur le Web, dont l'Advanced Encryption Standard -- ou AES -- par exemple). C'est ainsi que sont chiffrées les données qui transitent par certaines messageries ou celles qui sont stockées dans la plupart des serveurs des principaux services du Web ou certains de vos appareils (comme les smartphones).

Déchiffrer ou décrypter ?

Une fois le message chiffré, il est néanmoins important de pouvoir en récupérer son contenu d'une manière ou d'une autre. Lorsque vous envoyez un message à un ami au travers d'une application comme Signal par exemple, vous n'avez pas envie que quelqu'un puisse lire votre message s'il est intercepté, mais vous souhaitez que votre ami puisse le lire. Ce dernier doit donc être en mesure de déchiffrer le paquet reçu.

En fonction de la méthode utilisée, le déchiffrement peut prendre plusieurs formes. Avec un système de chiffrement symétrique, la clé utilisée pour déchiffrer le message est identique à celle utilisée pour le chiffrer. Les systèmes asymétriques sont un peu plus compliqués puisque chaque partie possède deux clés, une clé publique et une clé privée, toutes deux étant reliées mathématiquement. L'expéditeur utilise la clé publique de son destinataire pour chiffrer son message, tandis que le destinataire utilise sa clé privée pour le déchiffrer. Nous n'entrerons néanmoins pas dans les détails ici, les méthodes de cryptographies n'étant pas le sujet profond de cet article.

Comment décrypter un message

Il existe néanmoins des scénarios qui sortent du simple cadre du transfert entre deux personnes consentantes. Les hackers par exemple cherchent à profiter des failles de sécurité pour récupérer des données. Mais comme dit plus tôt, ces données sont habituellement chiffrées et ils ne possèdent pas de clé permettant de les déchiffrer.

Commence alors un long travail pour « casser » le code. La principale méthode consiste à utiliser « la force brute » en essayant toutes les combinaisons possibles une par une jusqu'à tomber sur un résultat concluant. Un processus extrêmement long qui peut prendre plusieurs années dans certains cas.

Sans clé, il ne s'agit donc pas de déchiffrement, mais de décryptage.

Pourquoi crypter n'a aucun sens

Résumons donc :

Vous l'aurez compris, si l'on suit cette logique, « crypter » quelque chose consisterait donc à l'encoder sans avoir de clé. Or, à partir du moment où vous utilisez une méthode pour modifier un message afin de le rendre illisible, même de manière totalement aléatoire, vous créez du même temps une clé ou un algorithme permettant de renouveler le processus à volonté. Il est donc impossible de « crypter » un message.

L'usage définit la norme

Voici donc pourquoi, en théorie, si l'on suit le lexique de la cryptographie, il ne faut pas parler de « cryptage ». Rappelons néanmoins que le français est une langue vivante, qui évolue avec ses usages, même lorsqu'ils sont abusifs. Et comme nous vous disions en introduction de cet article, le terme « crypter » est entré dans le langage courant. Si fondamentalement il est erroné, il permet tout de même pour beaucoup de se faire comprendre et de faire passer une idée qui sera comprise, aussi bien pour les cryptographes expérimentés (qui grinceront peut-être des dents) que par les néophytes en la matière.

Toujours est-il que, désormais, vous pourrez expliquer pourquoi il est préférable d'utiliser le mot « chiffrer ». Cela pourra vous être utile au prochain repas de famille. Vous pouvez aussi leur parler de catachrèses si vous le souhaitez.