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Quand Apple commande une étude qui étrille ses propres applications

Payer pour se faire critiquer ou la version d’Apple de l’expression tendre le bâton pour se faire battre. C’est un peu ce qui ressort du dernier rapport publié par Analysis Group, cabinet d’études indépendant, sur l’App Store et ses applications. Et le plus étonnant, de prime abord, c’est le fait qu’Apple est derrière la demande, même si ses auteurs rappellent que « les conclusions et opinions exprimées sont exclusivement » les leurs.

Alors, au regard des 48 pages de l’étude intitulée Le succès des applications tierces sur l’App Store, on fait un premier constat évident : Analysis Group montre que les utilisateurs d’iPhone sont bien plus souvent sur les applications populaires comme Netflix, Spotify ou Google Maps plutôt que sur leurs équivalents Apple comme Apple TV+, Apple Music ou Apple Plans.

Le succès, c’est les autres

Analysis Group défriche tout d’abord l’environnement offert aux utilisateurs en expliquant à quel point il a évolué en quelques années, offrant de multiples options aux développeurs et créateurs de contenus. Et l’étude se focalise sur l’évolution de l’App Store et son écosystème, les apps Apple (60 sur plus de deux millions) et la disponibilité des alternatives tierces qui représentent « plus de 99,99 % des applications proposées », note l’étude.

Même si Apple installe par défaut plus d’une vingtaine d’applications sur ses appareils, la majorité est désormais désinstallable. Mais surtout, les alternatives se sont multipliées avec le temps, pour devenir bien plus populaires. « Nos analyses quantitatives de l’engagement avec les applications (pas seulement les téléchargements d’applications) démontrent que les propres applications d’Apple sont rarement les plus populaires de leur catégorie et représentent une part d’utilisation relativement faible », note Analysis Group.

Et de citer Google, Amazon, Microsoft, Tencent, Baidu ou encore Kakao (Corée) comme acteurs majeurs ou « locaux » porteurs d’alternatives fonctionnant bien mieux que les applications à la pomme. Ou bien même des TikTok et autre Bumble ou Kayak qui rencontrent un succès retentissant sans qu’Apple n’ait de propositions identiques sur ces thématiques.

Victime de son propre système ?

Mais n’allez pas croire que l’on pleure à chaudes larmes dans les travées de l’Apple Park après des révélations qui n’en sont pas. Malgré un léger ralentissement, Spotify continue de dominer allègrement le marché du streaming musical où Apple Music, arrivé plus tardivement, s’est positionné en dauphin. De même, Netflix est un ogre sans commune mesure face au novice Apple TV+, même si celui-ci lui a damé le pion en devenant le premier service de SVoD à s’adjuger un Oscar du meilleur film avec CODA. Et après un démarrage assez calamiteux, malgré des améliorations et des fonctions très utiles, Plans a toujours peiné à rattraper en notoriété Google Maps.

Non, ce qu’il faut sans doute voir derrière la publication de cette étude est bien plus malin. En prouvant que ces applications tierces sont extrêmement populaires et qu’elles se portent aussi financièrement très bien, Apple tend à démontrer que son système --notamment décrié par quelques poids lourds qui ont parfois crié à la violation de lois antitrust lors du procès face Apple-Epic Games -- ne leur porte nullement préjudice et que le statut hégémonique n’a pas lieu d’être. La preuve, ses propres applications sont loin du compte. En termes de domination des applications, c’est exact. Mais Apple reste le maître des lieux et le détenteur des clés comme du droit d’entrée ou non. Et cela n’a pas de prix au yeux de beaucoup, et notamment des régulateurs.

Opération séduction pour les régulateurs

La multitude d’applications face aux apps maison, que l’on trouve parfois en doublon sur un iPhone, est, pour Analysis Group, « le reflet de la facilité avec laquelle ils (les utilisateurs) peuvent basculer entre les applications ». Un point qui ira dans le sens d’Apple qui veut démontrer que l’entreprise laisse le choix au consommateur final et à la concurrence.

Car ce qu’Apple veut prouver là, c’est que son fonctionnement ne nuit en rien au développeur des applications stars de son App Store comme au gros des troupes, les fameux « petits développeurs » qui sont majoritaires et peuvent donc devenir des ténors des iPhone. Pas plus que sa commission de 15 à 30 % prise sur les achats. Les apps phares ont la qualité, Apple le lien direct vers le consommateur qui les apprécie. Et cela se monnaye donc sans porter préjudice.

« Au fil des ans, les applications tierces ont été téléchargées des centaines de milliards de fois et sont devenues l’élément central de la façon dont les utilisateurs d’iPhone utilisent et s’en remettent à leurs appareils », résume le rapport. Et c’est ce qu’Apple veut avancer aux régulateurs américains et européens : ses pratiques commerciales ne sont pas si mal pour les développeurs de son App Store, bien au contraire.

Un appel du pied aussi à la Commission européenne qui veut limiter le contrôle des Apple et Google sur leur propre boutique d’applications pour éviter d’éventuelles pratiques non concurrentielles. En s’appuyant sur ce rapport, Apple veut montrer que ça n’a pas lieu d’être le concernant. Si c’est bien sa plateforme, l’entreprise en tire nettement moins de bénéfices utilisateurs que ses concurrents auxquels elle commence même à céder le paiement alternatif. Pas sûr que ces arguments soient totalement entendus par les législateurs.