Ces autoroutes électriques qui permettent à la France d’éviter « 40 blackouts par an »

 
Pour éviter que le blackout espagnol ne se reproduise, l’Europe veut créer huit autoroutes de l’énergie. Des autoroutes existent déjà, permettant d’éviter 40 blackout à la France par an.
Frédéric Paulussen – Unsplash

Alors que Madrid sort tout juste du traumatisme de sa panne géante d’avril 2025, l’Union européenne met les pieds dans le plat : la France, longtemps frileuse sur le sujet, doit impérativement accélérer ses connexions électriques avec ses voisins. L’enjeu n’est pas simplement d’aider les voisins, mais aussi d’éviter que l’Hexagone ne finisse, lui aussi, dans le noir dans les prochaines décennies.

L’incident espagnol a servi d’électrochoc à Bruxelles. Mercredi, la Commission européenne a tapé du poing sur la table en désignant « huit autoroutes européennes de l’énergie » prioritaires. Et au cœur du viseur, on retrouve la frontière franco-espagnole, véritable goulot d’étranglement électrique que l’Europe veut faire sauter.

Le mythe de l’autonomie électrique française

On aime bien se raconter que la France est une forteresse énergétique grâce à son parc nucléaire. La réalité physique du réseau est tout autre. L’électricité ne se stockant pas (ou très peu) à grande échelle actuellement, il faut qu’à chaque seconde, la production soit strictement égale à la consommation. C’est un équilibre précaire réglé à la milliseconde près, sur une fréquence de 50 Hz.

Si cet équilibre rompt, c’est le black-out. Et c’est là que nos voisins entrent en jeu. Lors d’une conférence de presse assez offensive, Dan Jorgensen, le commissaire européen à l’Énergie, a lâché un chiffre qui fait froid dans le dos : « je pense n’offenser personne en disant que parfois, la France s’est montrée réticente à développer ses interconnexions […] Les liaisons avec les pays voisins permettent pourtant à la France d’éviter 40 black-out par an » comme le relaye l’AFP via Connaissances des Energies.

Centrale solaire d’Aramon – France // Source : EDF

Sans ces câbles transfrontaliers qui nous permettent d’importer du courant en urgence quand nos réacteurs sont en maintenance ou que la consommation explose en hiver, nous aurions potentiellement subi 40 coupures généralisées par an selon ce commissaire européen.

Quand l’Espagne sert de crash-test

Le cas espagnol du 28 avril illustre parfaitement ce risque. Ce jour-là, un problème technique (une surtension combinée à une baisse de fréquence) a entraîné une « désynchronisation ».

Pour faire simple : le réseau ibérique a perdu la cadence du réseau européen. Pour se protéger, le système s’est déconnecté, transformant l’Espagne et le Portugal en îlot électrique. Sauf que l’îlot n’avait pas assez de jus pour s’alimenter seul à cet instant T. Résultat : le système s’effondre.

C’est exactement ce que Teresa Ribera, vice-présidente de la Commission, essaie de nous faire comprendre : « Plus nous serons connectés, plus nous aurons de possibilités pour réagir en cas de crises énergétiques ». C’est le principe de l’assurance mutuelle : si un réseau vacille, celui du voisin me soutient, et inversement.

Les Pyrénées : la nouvelle frontière des watts

Face à ce constat, l’Europe a sorti de ses cartons les projets « Pyrenean Crossing 1 et 2 ». L’objectif est de percer les Pyrénées pour y faire passer deux nouvelles lignes souterraines.

Mais Madrid et Lisbonne, échaudés par leur black-out, accusent Paris de ne pas aller assez vite. L’Europe vient donc de leur donner raison en classant ces projets comme « urgents ».

Centrale au fil de l’eau // Source : EDF

Au-delà de la sécurité, il y a un argument économique pour le consommateur final. Des interconnexions fluides permettent aux opérateurs d’acheter l’électricité là où elle est la moins chère à un instant T. Si le vent souffle fort en Allemagne ou que le soleil tape en Espagne, les prix chutent, et nous pouvons en profiter plutôt que d’allumer une centrale à gaz coûteuse.

Le chantier est titanesque. La Commission estime qu’il faudra investir 1 200 milliards d’euros d’ici 2040 pour moderniser le réseau européen.


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