« Cela ne se passe jamais comme prévu » : comment cette nouvelle usine française de batteries pour voitures électriques compte éviter les désastres des concurrents

 
La gigafactory de Verkor, une société française de fabrication de batteries pour voitures électriques, est inaugurée aujourd’hui. Située à Dunkerque, elle est un espoir pour l’industrie française, mais les exemples récents prouvent que le plus dur reste à venir.
Des cellules de batteries (pour illustration) // Source : Morrow Batteries

L’électrification du marché automobile européen laisse pour le moment l’avantage aux acteurs chinois, bien plus avancés sur le sujet, mais l’Europe y voit le potentiel d’un nouvel eldorado industriel.

La France, notamment, veut faire du Nord une véritable « Vallée de la batterie ». Dernier exemple en date : l’inauguration aujourd’hui, jeudi 11 décembre 2025, de la gigafactory de Verkor à Dunkerque.

Un client principal : Renault

Cette usine de batteries fournira, en premier lieu, les batteries de l’Alpine A390 GTS, la nouvelle voiture électrique de la marque – Renault détient 20 % du capital de Verkor. Ce qui explique d’ailleurs le retard de lancement de cette version : l’A390 GT, ouverte à la commande, embarque des cellules LG.

Alpine A390 // Source : Cetadi Prod pour Alpine

À terme, l’usine devrait pouvoir sortir 16 GWh de batteries par an, avec une extension d’ores et déjà prévue pour atteindre les 30 GWh. Verkor annonce la création de 1 200 emplois directs.

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Elle devient la troisième usine fonctionnelle dans cette région, après ACC à Douvrin et AESC à Douai ; ProLogium devrait être la prochaine étape avec une usine à Dunkerque, avec une mise en service repoussée à 2028.

Le début des ennuis ?

Ça, c’est pour la théorie ; la pratique pourrait ternir ce tableau idyllique. Après la faillite de Northvolt, le plus grand espoir européen des batteries, et les déboires actuels d’ACC, on se dit que Verkor débute peut-être le plus dur : faire tourner une usine.

Fabriquer une batterie ne s’improvise pas. Loin des activités de sidérurgie ou de ferrage auxquelles l’industrie automobile est habituée depuis des décennies, une gigafactory explore le domaine de la chimie, avec des « salles blanches » sans la moindre poussière et des standards immensément élevés de précision et de qualité.

Gigafactory Verkor // Source : Verkor

La mise au rebut est donc facile, mais la survie d’une gigafactory repose sur la plus faible quantité possible de déchets – les meilleurs élèves, chinois et coréens, arrivent à commercialiser 95 % de la production.

Une hypothèse manifestement étudiée par ses dirigeants, comme en témoigne un article des Échos qui est allé à leur rencontre. Philippe Chain, l’un des six cofondateurs de Verkor, confirme : « Les plus experts du secteur mettent de nombreux mois à réussir la montée en puissance, et nous avons moins d’expérience que ces gens-là ».

Cellule « pouch » de batterie Verkor // Source : Verkor

À ceci, Verkor répond par deux points : la formation du personnel sur une ligne pilote à Grenoble, siège social de l’entreprise (et d’où sortiront les premières cellules de l’A390 GTS), pour ne pas perdre de temps à Dunkerque, et le recrutement de Coréens, Malaisiens et Japonais, rompus à l’exercice.

Les Échos reprennent cependant les dires d’un spécialiste du secteur, moins optimiste : « L’expérience montre que cela ne se passe jamais comme prévu », précise-t-il. « Même les fabricants de batterie asiatiques, lorsqu’ils ouvrent en Europe une usine identique à celles qui fonctionnent dans leur pays et font venir pour cela des équipes entières, mettent un an à la faire tourner correctement. »

Gigafactory Verkor // Source : Verkor

Avec un clin d’œil probable à CATL, leader mondial du secteur, qui fabrique une usine en Espagne avec une façon de faire assez originale : 2000 travailleurs chinois font venir sur site pour la construction et la montée en puissance de l’usine, avant de laisser la main à des employés espagnols une fois tout mis en place ; un bon moyen, en parallèle, de conserver cette avance technologique et le savoir-faire que l’Europe tente désespérément de rattraper.


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