Votre fournisseur d’accès va aussi vous faire culpabiliser, sur demande du gouvernement

Pensez à lire vos mails sous la douche

 

L'Assemblée nationale a adopté ce mardi un amendement de la loi relative à la lutte contre le gaspillage. Celui-ci vise à « sensibiliser » les citoyens en imposant aux FAI de d'informer ses abonnés de l'équivalent en émission de gaz à effet de serre des données consommées.

« Cet amendement est une avancée importante qui nous permettra d’approfondir notre réflexion sur l’impact du numérique sur l’environnement », a indiqué la secrétaire d’État Brune Poirson lors de la séance de l’Assemblée nationale du 10 décembre 2019 concernant l’amendement 2529 du projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage. Son but est de sensibiliser les citoyens à leur hygiène numérique afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre.

« Il vise à contraindre les fournisseurs d’accès au réseau d’informer les consommateurs de la quantité de données consommées ainsi que de leur équivalent en émissions de gaz à effet de serre, selon une méthodologie définie par l’ADEME, et ce, afin de mieux prendre en compte l’impact du numérique sur l’environnement », explique Mme Véronique Riotton, rapporteure.

Regarder Netflix tue la planète

Dans l’idée, plus de transparence est toujours une bonne chose et permet de mieux se rendre compte de l’impact écologique que peuvent avoir nos nouvelles façons de consommer du contenu. C’est plus ou moins l’équivalent d’une grosse étiquette noire apposée à votre facture internet sur laquelle il y aurait marqué « regarder Netflix tue la planète », avec la photo d’un arbre mort au milieu du désert, sauf qu’il s’agirait d’un chiffre, représentant l’équivalent en CO2 de votre consommation de données numériques.

À ceci près que le calcul serait effectué via une méthodologie définie par l’ADEME — non précisée –, ce qui ne dit pas si elle prend en compte ou non les évolutions techniques du réseau. Il est certain en tout cas que ce calcul ne prendrait en compte que les données consommées sur un intervalle de temps et non les données entreposées, qui génèrent également des gaz à effet de serre (les mails non lus, les services de stockage dans le cloud, etc.).

Faites attention à ce que vous faites

Le calcul d’équivalence « sans difficulté » est ici comparé par Mme Paula Forteza, membre de la commission des lois, à celui des trajets en train ou en avion. Un point qui entre en contradiction avec les propos de Mme Véronique Riotton qui affirme, lorsqu’il est question de « demander aux fournisseurs d’accès à internet d’établir un bilan annuel de leur consommation totale de données numériques et de ses impacts environnementaux », que « nous nous heurtons à la difficulté de mesurer selon une méthode fiable ». Deux poids, deux mesures.

La culpabilité sur les utilisateurs

S’il est vrai qu’il faut « sensibiliser nos concitoyens à l’impact de leur consommation numérique », selon les mots de la secrétaire d’État, alors qu’Internet consomme aujourd’hui plus de 10 % de l’électricité mondiale, préciser qu’« il n’est absolument pas question, au travers d’une meilleure information du consommateur, de pénaliser nos entreprises, bien au contraire » tend à faire reposer tout le poids du réchauffement climatique sur les usagers sans chercher un moyen d’en atténuer les effets.

Chercher à pousser les FAI et opérateurs à optimiser leurs infrastructures pour réduire leur production de gaz à effet de serre ou taxer les données consommées seraient des mesures certainement plus efficaces, mais qui feraient davantage de mécontents. Ce n’est pas tout de se donner bonne conscience, il faut le faire dans le respect des lobbys.


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