J’ai visité la bourse du smartphone à Shenzhen, et c’est un beau bazar

 

En voyage en Chine, j’ai pu passer une journée à Shenzhen, la Mecque de l’industrie électronique mondiale. Mais derrière les usines et les sièges des grandes entreprises se trouve également un marché à ciel ouvert où s’échangent de la main à la main des smartphones par dizaines.

Si la technologie, les smartphones, Internet, sont toujours avec nous, comme des biens présents partout dans la société, quelques endroits à travers le monde permettent de découvrir l’ampleur de ces technologies, d’être au cœur même du cyclone. Il y a bien évidemment la Silicon Valley en Californie, siège de Google, Apple ou Facebook, mais il y a surtout Shenzhen, au sud-est de la Chine.

J’ai eu l’occasion cette semaine de découvrir cette cité d’à peine 40 ans, à quelques kilomètres de Hong Kong, et notamment le quartier de Huaqiangbei. Il s’agit de la rue du marché de l’électronique, là où s’accumulent les boutiques de ventes de smartphones, de pièces détachées, de boutiques officielles à côté de boutiques de contrefaçons.

À l’entrée de la rue, un cube vient signaler qu’on est arrivé dans le bon quartier. Un rapide coup d’œil pour le vérifier : les boutiques Oppo côtoient celles de Vivo et certaines échoppes mêlent à la fois les logos Apple et Huawei, avec des ameublements disposés en fonction des marques censées être vendues. Oui, c’est bien là. C’est bien le marché dont on a tant entendu parler.

Des revendeurs loin d’être officiels

La plupart de ces boutiques, même si elles arborent parfois un logo, sont évidemment des fausses. Ou du moins, ne sont pas des points de vente officiels des marques. Il faut dire que les constructeurs ont bataillé un temps avec les propriétaires pour les faire fermer, mais c’est pour que d’autres ouvrent dans les jours suivants. C’est donc peine perdue. Pourtant, à côté de ces boutiques de vendeurs tiers, on trouve bien quelques points de vente officiels, que ce soit du côté de Oppo, qui propose un grand magasin, ou de Honor.

De son côté, Samsung a même ouvert une boutique éphémère, directement sur le trottoir. Un bon moyen pour le géant coréen d’essayer de regagner la confiance du marché chinois. Il faut bien l’avouer, si les fausses boutiques sont estampillées Huawei, Oppo, Vivo ou Apple, aucune de celles que j’ai pu voir n’arborait l’ovale bleu du logo Samsung. Le constructeur est en perte de vitesse ces dernières années sur ce marché, raison pour laquelle il a récemment lancé de nouvelles gammes de smartphones spécialement destinées à la Chine, qu’il s’agisse des Galaxy A6s et A9s, ou du tout nouveau Samsung Galaxy A8s. Autant de smartphones disposés bien en évidence à l’entrée du pop-up store, alors qu’il faut chercher quelques instants avant de tomber sur le Galaxy Note 9. Autre particularité du marché chinois, Samsung a disposé bien en évidence son Samsung W2019, le smartphone à clapet hors de prix annoncé il y a quelques mois.

De l’autre côté de la rue piétonne, on trouve des bâtiments entiers remplis de petites échoppes. Certaines vont vendre des dos de smartphones, d’autres des appareils photo, certaines des écrans. Au rez-de-chaussée du Yuanwang, véritable centre commercial destiné aux smartphones, on trouve tous les composants pour assembler son propre appareil. Les pièces vendues n’y sont cependant que rarement des officiels. Souvent, il s’agit de copies de modèles en circulation qui peuvent être pratiques pour remplacer un dos en verre cassé, mais il peut également s’agir d’une source d’approvisionnement pour les contrefaçons.

Une véritable bourse du smartphone

En montant au premier étage du Yuanwang Digital Mall, c’est une tout autre ambiance, bien plus électrique, presque étouffante. Les échoppes sont plus grandes qu’au premier niveau, les ventilateurs bourdonnent et pourtant on a du mal à y respirer. On découvre cette fois des boutiques remplies de boîtes d’iPhone, d’iPad, de smartphones Oppo, Vivo, Huawei ou Honor. Derrière les comptoirs, les petites mains superposent les produits, font des piles et les recouvrent d’un coupon de commande. À l’arrière, un employé fait de même, mais face à un ordinateur, pour gérer les commandes en ligne. Dans les allées, les cartons ouverts sont posés à même le sol, avec des centaines d’iPhone à portée de main, sans que personne n’y prête la moindre attention.

On se trouve en fait dans la bourse du smartphone. C’est là que les prix sont négociés entre revendeurs, qu’il s’agisse de vente au détail pour les passants ou de vente en gros pour les boutiques qui proposeront les smartphones achetés sur Gearbest, AliExpress ou d’autres places de marché.

Sur le moment, j’ignore à quoi j’assiste. Je vois bien les feuilles de tarifs disposés méthodiquement chaque matin sur le comptoir de chaque échoppe, mais difficile d’y voir clair. Les prix pour un même produit sont évalués selon plusieurs critères, le stockage et la mémoire, mais aussi les coloris, en fonction de l’offre et de la demande. Ici, un Huawei Mate 20 Pro se négocie autour de 4000 yuans, soit 512 euros, quand un iPhone 8 Plus est proposé à 1440 yuans, soit 184 euros. Attention cependant, là non plus, tous les smartphones ne sont pas des vrais. C’est un mélange de marché officiel, de produits reconditionnés et de contrefaçons.

Quelques kilomètres plus loin, un supermarché de la contrefaçon

Des contrefaçons que l’on pourra éventuellement retrouver quelques kilomètres plus à l’est de Shenzhen, dans le Luo Hu Commercial City. Véritable supermarché de la consommation, il est visible de tous et bien établi en périphérie de la ville. On y trouve de tout, à condition que ce soit du faux. Des ceintures, des montres, des sacs à main et bien évidemment de faux produits high-tech copiés sur des marques renommées. Bien sûr, ce sont surtout des marques audio qui sont contrefaites ici, en raison de la plus grande facilité de fabrication. Des casques Bose et des enceintes JBL, mais aussi des caméras GoPro, des dongles HDMI Google et même une base de recharge sans fil estampillée Samsung.

À la fin de cette journée de visite à Shenzhen, c’est un sentiment étrange qui nous étreint. Alors que les constructeurs ont l’habitude de tout contrôler, de tout faire pour gérer leur communication et leur marketing comme du papier à musique, c’est au sein même de leur ville – DJI, Huawei ou ZTE ont leur siège à Shenzhen – que les marques peinent à contrôler cette effervescence. Si en Europe elles font tout pour contrôler le marché, à Shenzhen c’est un vrai bazar.


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