Évasion fiscale : la France s’autorise à la surveillance sur les réseaux sociaux

Plusieurs garde-fous sont imposés aux autorités

 

Le Conseil constitutionnel s'est prononcé ce vendredi en faveur d'une surveillance des réseaux sociaux à des fins d'identification des cas d'évasion fiscale. Les données pouvant être collectées dans ce cadre sont toutefois sujettes à des restrictions.

Scruter les réseaux sociaux à la recherche d’évadés ou fraudeurs fiscaux, mais en s’accordant à la législation en matière de respect de la vie privée, c’est le numéro d’équilibriste auquel vient d’être autorisé le fisc français. Dans un compte rendu publié ce 27 décembre, le Conseil constitutionnel valide le projet de collecte à grande échelle de données sur les réseaux sociaux, tout en imposant un nombre conséquent de restrictions et autres garde-fous au parlement, qui aura pour lourde responsabilité de légiférer sur un dossier éminemment sensible… et dans un contexte politique des plus tendus.

Une surveillance portant seulement sur les contenus accessibles librement en ligne

Principale restriction imposée par le Conseil constitutionnel : cette surveillance ne doit porter que sur les « contenus librement accessibles » sur le web, notent nos collègues de Numerama. Cela implique l’analyse de photos publiées sur les réseaux sociaux, mais aussi de messages envoyés publiquement ou encore des profils. En somme les contenus « manifestement rendus publics », précise le Conseil constitutionnel, qui insiste sur le fait que l’analyse ne doit concerner que les publications et données laissées sciemment en libre accès sur internet. Les contenus privés, y compris ceux accessibles uniquement après inscription ou saisie d’un mot de passe, ne sont donc pas concernés par le futur suivi du fisc sur les réseaux sociaux.

Le Conseil constitutionnel défend par ailleurs les autorités de confier à un quelconque sous-traitant la collecte, l’analyse ou même la conservation des données glanées sur les réseaux sociaux et sur le Net. Tout devra donc être géré en interne par l’État, à l’exception des outils utilisés pour le traitement des données, qui pourront, eux, être développés par des acteurs externes. On apprend par ailleurs que le traitement de ces données sera confié, en bout de cycle, à des agents assermentés et soumis au secret professionnel, disposant du grade de contrôleur est-il précisé dans le compte rendu du Conseil. Ces agents seront chargés de vérifier, et de valider le cas échéant, le travail de traitement réalisé en amont par des algorithmes.

Les données les plus sensibles supprimées au bout de 5 jours

Le Conseil constitutionnel prévoit par ailleurs des délais maxima de conservation pour ces données. Les données les plus sensibles (relatives à la sexualité, à la politique ou à la religion des personnes contrôlées), ou « sans lien avec la lutte contre la fraude fiscale », explique Numerama, seront automatiquement effacées au bout de cinq jours. Un délai de 30 jours est par contre prévu pour les autres données, sous réserve que ces dernières ne servent pas aux besoins d’une enquête en cours. Si le fisc n’a rien à vous reprocher, toutes les données collectées doivent donc être supprimées automatiquement au bout d’un mois maximum.

Un juge sera également affecté au suivi de ce traitement et aura pour charge de contrôler que l’administration et les pouvoirs exécutifs emploient bien les informations glanées sur le web dans le seul cadre de la lutte contre l’évasion fiscale. Le Conseil prévoit enfin que les droits inhérents aux lois informatique et libertés soient respectés, à une exception près. Si les droits d’accès, de rectification et d’effacement et de limitation de traitement des données sont assurés, celui d’opposition est éludé. Il s’oppose en effet à l’enjeu de lutte contre la fraude en lui-même et ne peut dans ces conditions être maintenu selon le Conseil constitutionnel.


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