
Début 2025, nous sommes retournés aux États-Unis pour tester la version 13 du Full Self-Driving (FSD) de Tesla, un an après notre premier essai avec la V11. Le FSD est la technologie la plus révolutionnaire de Tesla, permettant d’être littéralement conduit par sa voiture.
Cette fois, le cobaye s’appelle Arnaud, qui n’avait jamais expérimenté cette technologie. Le défi : le lâcher seul au volant d’un Tesla Cybertruck dans les rues de Los Angeles, puis le laisser découvrir le FSD dans l’une des villes les plus complexes au monde.
Spoiler : il a fini par préférer laisser la voiture conduire plutôt que de prendre le volant lui-même.
Première prise en main : « Il est sérieux, je stresse »
La scène se passe sur un parking de Los Angeles. Arnaud, habitué à conduire dans la campagne vendéenne sur des petites routes tranquilles, découvre le Cybertruck. Premier obstacle : il n’y a ni clé, ni poignée de porte visible. « Attends, mais il y a pas de clé. Il y a pas de poignée non plus », lance-t-il, déjà déstabilisé. Le véhicule s’ouvre via l’application Tesla, avec le smartphone dans la poche, comme tous les modèles de la marque.

Une fois à bord, autre surprise : pas de boîte de vitesse traditionnelle. Pour passer en marche avant ou arrière, il faut appuyer sur le frein et effectuer un swipe sur l’écran tactique géant qui trône au centre de la planche de bord. « Je vois rien derrière moi en fait« , constate Arnaud en tentant sa première marche arrière, avant de découvrir que l’écran affiche les images de toutes les caméras embarquées.
Le rendez-vous est fixé à Venice Beach, à Great White, un restaurant situé à plusieurs kilomètres. Entre les deux : l’autoroute de Los Angeles en heure de pointe. Pour un conducteur qui a appris sur des routes départementales, c’est le baptême du feu.
Le grand saut : activer le FSD sur une autoroute à six voies
« J’ai trop peur. Est-ce que je le fais ? » Arnaud hésite quelques secondes avant d’activer le Full Self-Driving en pleine circulation. La voiture refuse d’abord, demandant qu’il roule déjà pour engager le système. Une fois lancé, le stress monte d’un cran : « Faut savoir un truc, c’est que j’ai une peur dans ma vie, c’est les autres voitures. Et là, je joue, je roule à Los Angeles, je viens de lancer l’Autopilot.«
Ce qui suit relève du grand spectacle. Le Cybertruck s’insère tout seul sur l’autoroute bondée, négocie les changements de voie, gère les distances de sécurité. « Il s’insère. C’est bon, il s’insère en toute paisibilité« , lance Arnaud, soulagé mais encore incrédule. Sa première réaction révèle l’ampleur du choc : « Vincent, je te déteste. Je te déteste. »

Pourtant, après quelques kilomètres, le jugement évolue radicalement. Face à la complexité des embranchements californiens où les sorties se succèdent toutes les minutes, Arnaud réalise que le système le soulage davantage qu’il ne l’inquiète : « L’Autopilot me rassure puisque les routes ici, c’est tellement des embranchements dans tous les sens qu’il faut sortir toutes les minutes. Ça me stresserait de me soucier du GPS, et là elle a tout en tête. »
Feux rouges, virages serrés et législation américaine
Le FSD ne se contente pas de gérer l’autoroute. Une fois sur les routes urbaines de Los Angeles, le système montre toute son étendue. Il s’arrête aux feux rouges, redémarre automatiquement au feu vert, négocie les virages avec un trafic dense. « En fait, elle conduit vraiment à ta place à 100 %« , constate Arnaud, impressionné.
Un moment de panique survient lorsque la Tesla grille un feu rouge. Enfin, en apparence. « Ah non, on a le droit. On a le droit en fait. On a le droit de griller un feu rouge pour tourner à droite. Sauf quand c’est interdit. Sinon la norme c’est on a le droit. Et là, elle l’a fait. »

Aux États-Unis, contrairement à la France, le virage à droite au feu rouge est autorisé par défaut, sauf signalisation contraire. Le FSD connaît cette règle mieux qu’un conducteur français fraîchement débarqué.
L’écran du Cybertruck affiche en temps réel ce que « voit » le système : les autres véhicules, les piétons, les feux de signalisation, et la trajectoire prévue. Cette transparence rassure. « On voit qu’elle comprend la distance qu’elle a avec la voiture de devant et ma voiture. Son itinéraire, il est tracé, elle le connaît. Donc on voit qu’elle va carrément freiner face à la voiture qui est devant. Et ça quand même, je trouve ça vachement rassurant.«
Les mains loin du volant, les pieds loin des pédales
La différence majeure avec notre test de la version 11 en 2023 saute aux yeux – ou plutôt aux mains. Avec la v13, le conducteur n’a plus besoin de garder les mains sur le volant. Le système repose désormais entièrement sur une caméra intérieure qui surveille le regard du conducteur. L’exigence reste stricte : il faut regarder la route en permanence.
En cas de distraction, les sanctions s’enchaînent. D’abord un bip sonore, puis une demande de reprendre le contrôle en posant les mains sur le volant. Si le conducteur ignore ces avertissements, le FSD se désactive pour le reste du trajet. Récidiver cinq fois de suite entraîne un bannissement d’une semaine complète du système.

Cette évolution répond aux dérives observées aux États-Unis, où certains conducteurs activaient l’Autopilot avant d’aller s’asseoir à l’arrière, laissant la voiture rouler sans personne aux commandes. Tesla a durci les règles pour éviter ces comportements dangereux.
« Le truc qui m’étonne le plus, c’est que pendant qu’on est en train de tourner, on regarde la route, mais tu ne touches pas le volant avec tes mains. Tes pieds sont complètement en dehors des pédales et c’est la voiture qui est en train de nous conduire depuis 20 minutes. Et c’est complètement fou de se dire qu’en fait on discuterait comme si on était à l’arrière d’un taxi« , résume Arnaud.
Le steer-by-wire : une première mondiale qui change tout
Le Cybertruck embarque une autre innovation de taille : la direction steer-by-wire, une première dans l’industrie automobile grand public. Contrairement aux voitures traditionnelles où le volant est relié mécaniquement aux roues via une colonne de direction, ici, il n’existe aucun lien physique. Le volant est équipé de capteurs qui mesurent l’angle et la vitesse de rotation, des informations transmises à un calculateur qui pilote ensuite des moteurs électriques puissants – environ 5 chevaux au total – pour faire tourner les roues.

Cette technologie, utilisée dans l’aviation depuis les années 1980, permet une démultiplication variable bien plus importante qu’un système mécanique. Résultat : pour effectuer un demi-tour complet, il suffit de tourner le volant d’à peine un quart de tour. « Ouais, il comprend par le mouvement, la vitesse, à quel point il faut tourner« , découvre Arnaud.
L’avantage est évident en manœuvres urbaines. L’inconvénient : en cas de panne électronique totale, les roues restent droites. Tesla a donc multiplié les systèmes de redondance avec plusieurs processeurs prêts à prendre le relais si l’un tombe en panne, exactement comme dans un avion.
Une confiance progressive mais des questions de responsabilité
Après une demi-heure de conduite, Arnaud affiche une confiance retrouvée. « À force d’y être, là j’ai confiance. J’ai confiance en cette voiture. » Pourtant, des frayeurs subsistent. À un moment, le Cybertruck s’approche très près d’un véhicule à l’arrêt. « Arrête-toi, arrête-toi, arrête-toi. Là, c’est bon, il s’est arrêté« , souffle Arnaud, avant de formuler une question essentielle : « Je me demande qu’est-ce qui se passe. Est-ce que si j’ai un accident, c’est de ma faute ou pas ? Je pense que oui quand même parce que je suis derrière le volant. Mais si la Tesla a fait n’importe quoi et elle fonce dans la voiture qui est devant moi, est-ce que je suis responsable ou est-ce que Tesla a une part de responsabilité ?«

La réponse est sans équivoque : avec le FSD de Tesla, c’est toujours le conducteur qui reste légalement responsable. Le système est classé comme une conduite autonome de niveau 2, ce qui signifie que le conducteur doit superviser en permanence et être prêt à reprendre le contrôle.
En août 2025, un jury en Floride a d’ailleurs condamné Tesla à verser environ 243 millions de dollars suite à un accident mortel impliquant l’Autopilot, reconnaissant que le constructeur portait 33 % de responsabilité pour avoir exagéré les capacités du système.
Niveau 2 vs niveau 3 : Tesla et Mercedes, deux approches opposées
Cette question de la responsabilité distingue fondamentalement Tesla de Mercedes. Le constructeur allemand propose un système de niveau 3 baptisé Drive Pilot : lorsqu’il est activé, le conducteur peut légitimement détourner le regard de la route, et c’est Mercedes qui assume la responsabilité en cas d’accident. Mais les contraintes sont drastiques : le système fonctionne uniquement sur certaines autoroutes homologuées, jusqu’à 90 km/h maximum, de jour, sans pluie, avec un véhicule devant.

Le FSD de Tesla, bien que classé niveau 2, offre des capacités bien supérieures en termes de situations gérées – routes urbaines, intersections complexes, changements de voie, stationnement – mais impose au conducteur de rester vigilant et légalement responsable.
Tesla a fait le choix du « tout ou rien » : plutôt que de se faire certifier pour des situations spécifiques, la marque préfère développer un système capable de tout gérer, quitte à maintenir la responsabilité sur le conducteur pour l’instant.
De la v11 à la v13 : un bond de géant
Lors de notre test en 2023, la version 11 du FSD nous avait déjà impressionnés, mais elle présentait des hésitations, des erreurs ponctuelles, et nécessitait de garder les mains sur le volant. La version 13 représente un saut qualitatif majeur. Le système repose désormais sur un réseau neuronal end-to-end : au lieu de développeurs programmant « si tu tournes à droite, il se passe ça », l’intelligence artificielle apprend directement des données de conduite humaine et prend ses décisions en temps réel selon ce qu’elle perçoit.

L’amélioration se ressent dans les accélérations et freinages, désormais bien plus naturels et fluides. Les démarrages brusques et arrêts saccadés ont quasiment disparu, rendant l’expérience plus confortable pour les passagers. Une nouvelle fonctionnalité permet même d’activer le FSD alors que la voiture est encore garée, lui permettant de gérer la sortie du stationnement de manière autonome.
La veille de notre test, nous avions réglé le mode « pressé » sur l’autoroute. Le Cybertruck a pris la sortie à la dernière minute, doublant encore à un kilomètre de la sortie, sans jamais être dangereux – exactement comme le ferait un conducteur pressé mais maîtrisé. Aucune hésitation, aucune erreur. « Moi je suis très étonné, très surpris, mais très agréablement. C’est ultra efficace. »
La v14 : dix fois plus de paramètres
Depuis notre test de la v13, Tesla a déployé la version 14 du FSD avec des améliorations encore plus substantielles. Le nouveau modèle intègre dix fois plus de paramètres que la v13, permettant une détection plus fine des situations complexes. Parmi les nouveautés : la gestion automatique des véhicules d’urgence avec placement sur le côté de la route pour laisser passer ambulances et pompiers, l’évitement intelligent des nids-de-poule, et une navigation améliorée sur les parkings.

La v14 introduit également des profils de vitesse personnalisables, avec un mode conservateur ou dynamique selon les préférences du conducteur, ainsi que des options d’arrivée permettant de choisir précisément où stationner près de la destination. Selon Elon Musk, le système serait déjà deux à trois fois plus sûr qu’un conducteur humain moyen.
L’arrivée du FSD en Europe : un parcours semé d’embûches
Pour les Européens qui suivent cette évolution avec envie, une bonne nouvelle se profile : Tesla travaille activement au déploiement du FSD sur le Vieux Continent. Mais le chemin s’annonce complexe. La réglementation européenne, notamment la norme UNECE R79, impose des restrictions importantes qui limitent actuellement les capacités des Tesla en Europe.
Un élément clé pourrait débloquer la situation : l’entrée en vigueur le 26 septembre 2025 de la phase 3 du règlement DCAS (Dynamic Control and Automated Systems). Cette nouvelle réglementation européenne introduit la possibilité pour les véhicules d’effectuer des manœuvres autonomes initiées par le système, comme les changements de voie sur autoroute, tout en maintenant la responsabilité du conducteur pour la supervision.

Tesla vise un lancement européen pour février 2026, mais doit d’abord obtenir l’approbation de l’autorité néerlandaise des transports (RDW). Pour faire pression, quoi de mieux que l’opinion publique ? C’est pour ça que des tests publiques sont en cours, y compris en France, pour les clients du constructeur.
Des tests sont également en cours en Norvège pour obtenir des approbations nationales. Le constructeur a récemment mobilisé ses clients européens pour faire pression sur les régulateurs, estimant que « ces réglementations sont obsolètes ».
Contrairement au Cybertruck, interdit de vente en Europe à cause de ses arêtes tranchantes jugées dangereuses en cas d’accident piéton, le FSD sera disponible sur tous les modèles Tesla (Model 3, Model Y, Model S et Model X) moyennant environ 8 000 euros. Il restera une conduite supervisée de niveau 2, avec la responsabilité légale qui incombe au conducteur – mais « il faudra toujours un permis de conduire parce que s’il y a un souci, c’est toi qui reprends le volant ».
Verdict : une technologie qui transforme l’expérience de conduite
Après cette journée californienne, Arnaud tire un bilan sans équivoque : « J’ai trouvé ça complètement fou. Je m’attendais pas du tout à vivre un truc comme ça avec un véhicule comme ça. Pour moi c’est complètement ovni. » Sa conclusion sur le FSD est révélatrice : « Je trouve quand même que je me sentais plus en sécurité et j’imagine pour des gens qui ont pas trop l’habitude de conduire, des personnes âgées ou des choses comme ça, elle a plus d’yeux que nous en fait cette voiture. »

Le Full Self-Driving v13 représente une avancée majeure vers la conduite autonome accessible au grand public. Les progrès depuis la v11 sont spectaculaires, et la v14 repousse encore les limites. Pour autant, des questions demeurent sur la responsabilité juridique, la fiabilité à 100%, et la capacité du système à gérer toutes les situations d’urgence.
Une chose est certaine : la technologie a atteint un niveau où un conducteur novice sur un territoire inconnu peut légitimement préférer laisser la voiture conduire plutôt que de prendre le volant. « Elle se trompe moins que toi clairement« , résume parfaitement l’expérience vécue.
Pour aller plus loin
Ce neurochirurgien est formel : les aides à la conduites sur les voitures sauvent plus de vies que les médecins
Et les données publiées par Tesla et Waymo sont sans équivoques : ces systèmes de conduite autonome sont largement plus sûres qu’un conducteur humain.
Rejoignez-nous de 17 à 19h, un mercredi sur deux, pour l’émission UNLOCK produite par Frandroid et Numerama ! Actus tech, interviews, astuces et analyses… On se retrouve en direct sur Twitch ou en rediffusion sur YouTube !

Ce contenu est bloqué car vous n'avez pas accepté les cookies et autres traceurs. Ce contenu est fourni par Disqus.
Pour pouvoir le visualiser, vous devez accepter l'usage étant opéré par Disqus avec vos données qui pourront être utilisées pour les finalités suivantes : vous permettre de visualiser et de partager des contenus avec des médias sociaux, favoriser le développement et l'amélioration des produits d'Humanoid et de ses partenaires, vous afficher des publicités personnalisées par rapport à votre profil et activité, vous définir un profil publicitaire personnalisé, mesurer la performance des publicités et du contenu de ce site et mesurer l'audience de ce site (en savoir plus)
En cliquant sur « J’accepte tout », vous consentez aux finalités susmentionnées pour l’ensemble des cookies et autres traceurs déposés par Humanoid et ses partenaires.
Vous gardez la possibilité de retirer votre consentement à tout moment. Pour plus d’informations, nous vous invitons à prendre connaissance de notre Politique cookies.
Gérer mes choix