« Votre voix, amplifiée par l’IA » : un Français de Shenzhen défie Plaud et le projet OpenAI-Jony Ive

Laurent Le Pen possède un parcours qui force le respect dans l’écosystème hardware. En 2013, il lance Omate, une montre connectée sous Android qui réalise un carton sur Kickstarter à une époque où le marché des wearables n’existait pratiquement pas.

Produit livré, entreprise pérennisée avec un pivot vers le Wearable-as-a-Service pour la sécurité des enfants et des seniors.

Puis vient Oclean : des brosses à dents connectées intégrant des capteurs IA qui cumulent aujourd’hui 30 prix internationaux de design, 300 brevets, et 50 millions de dollars de revenus annuels.

Dix-huit années passées à Shenzhen lui confèrent une maîtrise de la production et de la chaine de logistique que peu d’entrepreneurs français peuvent revendiquer.

Aujourd’hui, il présente son nouveau projet : Moneypenny, un enregistreur vocal IA avec une approche basée sur l’ouverture des API et la flexibilité tarifaire. Le projet est prometteur, mais le contexte de marché est complexe.

Un marché en ébullition où les géants s’invitent

Le segment des enregistreurs vocaux IA connaît une effervescence impressionnante depuis 2023. Plaud a établi une position solide avec ses NotePin et Plaud Note, des appareils compacts dédiés à la transcription automatique.

Rewind propose son Pendant qui enregistre l’intégralité des interactions pour les rendre consultables via IA. Humane a tenté le coup avec son AI Pin, avant de décevoir sur l’exécution logicielle.

Mais l’annonce la plus significative reste celle du partenariat entre Jony Ive et Sam Altman. Fin 2023, Bloomberg révélait que l’ancien designer historique d’Apple (iMac, iPod, iPhone) travaillait avec le CEO d’OpenAI sur un « appareil basé sur l’intelligence artificielle » destiné à un usage quotidien.

Tang Tan, concepteur en chef des dernières générations d’iPhone, a quitté Apple pour rejoindre LoveFrom, le studio de design de Jony Ive, afin de diriger l’ingénierie matérielle du projet. Sam Altman aurait approché Masayoshi Son (SoftBank) pour un financement se chiffrant en milliards de dollars.

Ce projet reste au stade de l’élaboration, mais il montre une tendance de fond : les acteurs majeurs de l’IA cherchent à s’incarner dans des appareils physiques dédiés, au-delà du smartphone.

Pour Oxtak et Moneypenny, cela signifie qu’il ne s’agit pas seulement de concurrencer des startups comme Plaud, mais de s’imposer avant que les géants (OpenAI, Meta, Google) ne verrouillent le marché avec leurs écosystèmes propriétaires.

Le timing est donc essentiel. Et sur ce point, Oxtak affronte un défi de taille.

Le positionnement de Moneypenny : ouverture et flexibilité

Moneypenny se présente comme un enregistreur vocal compact équipé de microphones MEMS haut de gamme, conçu pour capturer les réunions, interviews et brainstorms en présentiel.

L’appareil diffuse ensuite l’audio brut et la transcription vers les modèles de langage de l’utilisateur : ChatGPT, Claude, Grok, ou tout autre LLM compatible via API.

La proposition de valeur centrale repose sur l’ouverture de l’écosystème. Contrairement à Plaud qui impose un modèle fermé avec des minutes de transcription payantes à la découpe, Oxtak permet aux utilisateurs de connecter leurs propres comptes API et de consommer selon leurs besoins. Les crédits Oxtak, eux, ne comportent aucune date d’expiration, offrant une flexibilité maximale : intensification en période de forte activité, réduction lors des phases creuses.

Cette approche répond directement aux frustrations exprimées par les professionnels face aux modèles d’abonnement rigides. Les journalistes, avocats, consultants et chercheurs qui utilisent déjà ChatGPT Plus ou Claude Pro peuvent ainsi maximiser leurs investissements existants plutôt que de payer un nouvel abonnement pour chaque outil

L’enjeu de l’abonnement : pourquoi Oxtak mise sur la flexibilité

Le modèle économique des enregistreurs vocaux IA cristallise les tensions du marché. Plaud facture des minutes de transcription avec un système de crédits qui peut rapidement devenir coûteux pour les utilisateurs intensifs. L’utilisateur est enfermé dans un écosystème propriétaire : il passe par les serveurs de Plaud, utilise leurs modèles, respecte leurs quotas.

Ce modèle génère de la récurrence pour l’entreprise, mais crée une friction pour l’utilisateur. Les professionnels qui enregistrent quotidiennement des interviews ou des réunions se retrouvent avec plusieurs abonnements qui se superposent : ChatGPT, Otter.ai, Plaud, Notion AI, etc. La facture mensuelle grimpe, la gestion devient complexe, et surtout, les crédits non utilisés sont perdus.

Oxtak adopte la stratégie inverse : pas d’abonnement mensuel, mais des crédits à la carte sans expiration. L’utilisateur achète ce dont il a besoin, consomme à son rythme, et surtout, conserve le contrôle de ses données et de ses choix technologiques. Si Anthropic sort demain un modèle Claude plus performant, l’utilisateur bascule immédiatement. Si OpenAI baisse ses tarifs API, il en profite directement.

Cette flexibilité est un argument commercial solide, à condition que trois éléments soient au rendez-vous : un prix d’entrée compétitif pour le hardware, une expérience utilisateur fluide pour la connexion API, et une qualité audio irréprochable pour justifier l’achat d’un dispositif dédié plutôt que l’utilisation d’un smartphone.

Le lancement est prévu pour le premier trimestre 2026. Le marché n’a pas besoin d’un énième enregistreur vocal. Il a besoin d’un outil qui respecte les habitudes existantes, qui offre une réelle valeur ajoutée par rapport au smartphone, et qui permet aux professionnels de se concentrer sur leur métier plutôt que sur la gestion de leurs abonnements tech.