Pourquoi Signal menace de fermer ses services en Europe

 

Vous connaissez sûrement Signal, cette application de messagerie chiffrée qui nous permet de discuter en toute sécurité avec nos proches. Elle pourrait bientôt disparaître en Europe ! La faute à une nouvelle loi qui menace le chiffrement de bout en bout.

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Il y a un monde où vos conversations privées avec vos amis, votre famille ou même votre médecin pourraient être écoutées et lues par des tiers. C’est ce qui pourrait arriver si une nouvelle loi européenne était adoptée, et c’est pourquoi la messagerie chiffrée Signal menace de fermer ses services en Europe.

Pourquoi l’UE veut-elle mettre fin au chiffrement de bout en bout ?

Le chiffrement de bout en bout est une technologie qui permet de protéger nos conversations en ligne en les rendant illisibles pour les tiers. Seuls les destinataires de la conversation peuvent la déchiffrer et la lire. C’est une technologie très importante pour la vie privée, mais elle est critiquée par certains politiciens et forces de l’ordre en Europe.

En effet, ces derniers estiment que le chiffrement de bout en bout nuit aux enquêtes et empêche les forces de l’ordre d’accéder à des preuves importantes. Ils voudraient donc imposer aux plates-formes la création de portes dérobées, permettant aux forces de l’ordre d’accéder aux contenus chiffrés. C’est le cas, par exemple, du ministre de l’Intérieur français, Gérald Darmanin. Rappelons qu’en août 2015 déjà, l’ancien procureur François Molins s’était montré critique sur le sujet du chiffrement des smartphones.

Cependant, les défenseurs de la vie privée estiment que ces portes dérobées sont dangereuses, car elles pourraient être utilisées à mauvais escient par des pirates informatiques ou des gouvernements autoritaires. C’est pourquoi la messagerie chiffrée Signal a annoncé des mesures drastiques si la proposition de contrôle était mise en œuvre par l’Union européenne : elle cesserait ses activités en Europe.

Comment Signal compte-t-il résister ?

La présidente de Signal, Meredith Whittaker, a déclaré que la proposition de loi européenne était « du vin de surveillance dans des bouteilles de sécurité ». Ancienne employée de Google, elle est aussi cofondatrice de l’AI Now Institute, un organisme de recherche américain consacré aux implications sociales de l’IA.

Tant que la loi n’est pas encore adoptée, Signal compte rester en Europe et soutenir les citoyens européens dans leur lutte pour la vie privée. Cependant, si la loi devait être introduite, le non-respect entraînerait de toute façon l’interdiction de Signal du marché, selon Meredith Whittaker.

Signal rejette également le nouveau projet de compromis de l’actuelle présidence belge du Conseil, qui stipule que seules les images, vidéos et URL, mais pas les pistes audio ou les textes, doivent être filtrées. Si ce projet est accepté et appliqué à Signal, la messagerie serait contrainte de se retirer du marché européen, selon Meredith Whittaker.

Signal n’est pas le seul à critiquer ce nouveau projet de compromis. Le député du Parti Pirate Patrick Breyer a également déclaré que l’analyse côté client « détruirait le chiffrement sécurisé ».

Plusieurs spécialistes en cyber ont souligné l’excellence de Signal — au point que son protocole de chiffrement, d’ailleurs, a été largement repris par d’autres applications, de WhatsApp à Google Messages, en passant par Messenger ou Skype.


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