25 000 pixels par pouce : ce « papier électronique rétinien » atteint la limite physique de l’œil humain pour l’écran des futurs casques et lunettes

 
Une équipe suédoise (Uppsala/Chalmers) vient de publier dans Nature une avancée majeure : un « papier électronique rétinien » à 25 000 PPI. C’est la limite théorique de perception humaine.

Des chercheurs suédois ont une découverte pour nos futurs casques et lunettes : un écran dont chaque pixel correspond à un photorécepteur de la rétine humaine.

Pas un argument marketing creux, non. Une vraie résolution de 25 000 pixels par pouce, là où les meilleurs écrans smartphone plafonnent à 500-600 PPI. C’est l’équipe de Kunli Xiong (Uppsala) et Andreas Dahlin (Chalmers) qui signe cette prouesse dans Nature, avec un « papier électronique rétinien » qui repense totalement l’approche des micro-écrans.

L’idée est simple sur le papier : puisqu’on ne peut pas rendre les écrans auto-éclairés plus nets, pourquoi ne pas utiliser la lumière ambiante ? Ici, on a des nanopixels de 560 nanomètres (plus petits que la longueur d’onde de la lumière visible) qui consomment presque rien et affichent des vidéos. Si ça tient ses promesses, on parle d’écrans VR/AR révolutionnaires.

Les OLED ont atteint leur limite physique

Comme vous le savez, les casques VR placent les écrans à 1-2 cm de vos yeux. À cette distance, chaque défaut est visible. Plus vous miniaturisez les pixels OLED classiques, plus vous créez de problèmes : les sources lumineuses deviennent difficiles à stabiliser, la diffusion augmente, les couleurs bavent les unes sur les autres, ça chauffe. C’est un mur technique.

Les fabricants compensent avec des optiques complexes et du traitement logiciel agressif. Mais fondamentalement, l’approche auto-éclairée montre ses limites dès qu’on descend sous un certain seuil de miniaturisation. Les meilleurs micro-OLED actuels tournent autour de 3000-4000 PPI, comme sur le Vision Pro d’Apple avec 3 386 ppp (points par pouce). Déjà excellent, mais pas suffisant pour tromper complètement l’œil à quelques centimètres.

L’approche inversée : laisser tomber l’auto-éclairage

Les Suédois ont pris le problème à l’envers. Leur système n’émet pas de lumière, il la réfléchit, comme du papier électronique ou une feuille de papier classique. La structure ? Des micro-disques de trioxyde de tungstène (WO₃) d’environ 560 nanomètres. Quand un courant électrique les traverse, leurs propriétés optiques changent : ils passent d’un état clair à sombre.

Ces « métapixels » reflètent les couleurs par diffusion lumineuse contrôlée. En jouant sur le diamètre et l’espacement précis de ces nano-structures, l’équipe crée des teintes par mélange additif. Quatre à cinq structures suffisent pour former un point rouge, vert ou bleu, plus petit que la longueur d’onde de la lumière visible. C’est de la physique pure, pas du marketing.

Le résultat brut : 25 411 pixels par pouce (pour être précis). À cette résolution, chaque pixel correspond approximativement à un seul cône ou bâtonnet de votre rétine. Andreas Dahlin le dit cash : « L’homme ne peut pas percevoir une plus grande netteté. » On a atteint la limite biologique.

Des performances qui tiennent la route

Bon, tout ça c’est joli en théorie. Dans les faits ? L’équipe a démontré plusieurs choses concrètes :

Vidéo fluide : 25+ images par seconde avec un temps de réponse de 40 ms. C’est 10 à 60 fois plus rapide que les systèmes électrochromes précédents. Pas du niveau OLED (qui tourne autour de 1-5 ms), mais largement suffisant pour de la vidéo sans saccades perceptibles.

Consommation dérisoire : 0,5 à 1,7 mW/cm². Le courant ne circule que lors du changement d’image. Une image statique peut rester affichée plusieurs minutes sans consommer un watt. Pour des lunettes AR qui affichent des infos relativement stables, c’est un game changer en termes d’autonomie.

Réflectivité de 80 % : l’écran renvoie la majorité de la lumière ambiante. En plein jour, contrairement aux OLED qui peinent, ce système devient plus lisible avec plus de lumière. Le contraste tourne autour de 50 %, ce qui est honnête sans être exceptionnel.

Les démos sont parlantes : une image 3D miniature d’un papillon (visible spatialement avec des filtres colorés), et surtout une reproduction du Baiser de Klimt plus petite qu’un grain de riz, avec 4 millions de pixels. Au microscope, chaque nuance dorée, chaque détail du visage est visible. C’est du jamais vu.

Les limites actuelles (et elles sont réelles)

Vous l’aurez certainement compris en lisant entre les lignes : ce n’est pas demain que vous aurez un Quest 5 avec cette technologie.

Il y a deux gros obstacles avant une commercialisation :

  • Les couleurs sont pâles. Comparé à un OLED qui émet plus de 1000 nits, ce papier électronique reflète la lumière ambiante avec des teintes moins saturées, moins vibrantes. Pour de la lecture ou des interfaces, ça passe. Pour du HDR cinéma ? Oubliez.
  • L’échelle est microscopique. Les chercheurs ont réussi des surfaces de quelques millimètres carrés. Pour passer à un écran de casque VR complet (plusieurs cm²), il faut développer des circuits de contrôle pixel-par-pixel ultra-précis. À 25 000 PPI, ça représente des centaines de millions de pixels à adresser individuellement. La complexité explose.

Ajoutez à ça le coût de fabrication (encore inconnu) et les questions de durabilité à long terme du matériau électrochrome.

Malgré les limites actuelles, cette recherche ouvre une voie. Imaginez des lunettes AR ultra-légères qui n’ont pas besoin de batterie massive parce qu’elles n’éclairent rien. Des casques VR sans dissipation thermique importante. Des écrans lisibles en plein soleil.

L’équipe a démontré le principe fondamental : on peut fabriquer des écrans à la limite de la perception humaine. Le reste, c’est de l’ingénierie (certes complexe). Les OLED ont mis 20 ans à maturité commerciale. Ce papier électronique rétinien suivra probablement un chemin similaire.

Pour l’instant, c’est une publication scientifique brillante dans Nature. Dans 5-10 ans ? Peut-être la base des prochains écrans de réalité mixte. Si Microsoft, Meta ou Apple mettent les moyens, cette technologie pourrait devenir le standard des micro-écrans.


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