
On a longtemps cru que la fin du moteur thermique serait politique, dictée par des dates butoirs à Bruxelles. Mais la réalité est peut-être plus cruelle : la mécanique elle-même est en train de dire stop.
Soyons honnêtes deux minutes. On aime tous la belle mécanique, le bruit d’un V8 ou la précision d’un bon vieux bloc japonais. Mais avez-vous remarqué que la fiabilité « légendaire » de certaines marques s’effrite ? Ce n’est pas une impression.
Une enquête massive d’Automotive News vient de mettre le doigt sur une plaie béante : plus de 5 millions de moteurs sont actuellement sous le coup d’enquêtes ou de rappels chez cinq constructeurs majeurs aux États-Unis.
La raison ? Une course effrénée à la performance et à l’écologie qui a transformé nos moteurs en orfèvrerie… beaucoup trop fragile pour la vraie vie.
Le paradoxe de la perfection : quand le mieux devient l’ennemi du bien
Pour comprendre le problème, il faut regarder sous le capot. Pour satisfaire les normes antipollution tout en vous offrant toujours plus de puissance, les ingénieurs ont dû réaliser des miracles. Ils ont réduit la taille des moteurs (le fameux downsizing) tout en augmentant la pression interne.
Le résultat ? On demande à des blocs plus petits de supporter des charges thermiques et mécaniques colossales. Greg Davis, expert en ingénierie moteur à l’Université de Kettering, résume parfaitement la situation : « Cela a conduit à des pressions de pointe plus élevées et à des charges moteur moyennes plus importantes. Cela augmente à la fois la charge sur les roulements et l’usure du moteur ».

Mais le véritable talon d’Achille, c’est l’huile. Pour réduire les frottements et gagner quelques grammes de CO2, les constructeurs imposent des huiles de plus en plus fluides, parfois aussi fines que de l’eau (viscosité 0W-16). Tom Howell, de la société d’ingénierie AVL, explique que « si vous avez des huiles plus fines, vous obtenez un film d’huile plus fin, et le moteur sera plus sensible à la contamination ».
C’est là que le drame arrive : le « swarf ». Ce terme technique désigne des copeaux de métal microscopiques, résidus de l’usinage en usine. Dans les vieux moteurs, avec de l’huile épaisse et des tolérances larges, ce n’était pas grave.
Aujourd’hui ? C’est fatal. Ces particules agissent comme du papier de verre, détruisant des moteurs qui ont parfois moins de 1 000 kilomètres au compteur. Dave Bell, constructeur de moteurs haute performance, est catégorique : « Une fois que [ces résidus] se détachent et circulent dans le moteur, cela provoque une usure extrême qui mènera finalement à une défaillance catastrophique ».
L’hécatombe des géants : Toyota et Stellantis dans le même bateau
Si vous pensiez être à l’abri en achetant une « valeur sûre », détrompez-vous. L’enquête cite des noms qui font mal. Toyota, le champion de la fiabilité, doit remplacer plus de 100 000 moteurs V6 biturbo à cause de débris d’usinage, une facture qui pourrait dépasser le milliard de dollars. Honda et General Motors sont aussi touchés.
Mais pour nous, Européens, cela résonne d’une manière particulière avec le cas Stellantis. Si aux USA, Jeep rappelle des moteurs pour du sable de fonderie resté dans le bloc, en France, nous vivons le cauchemar du 1.2 PureTech.

Le problème est techniquement différent mais la racine est la même : une complexité excessive pour chasser le CO2. Ici, c’est la fameuse courroie de distribution « humide » (baignant dans l’huile) qui se désagrège. Les résidus de courroie viennent boucher la crépine d’huile, provoquant exactement ce que décrivent les experts américains : une asphyxie du moteur par ses propres fluides.
Le constat est amer : pour gagner quelques décilitres de consommation, on a créé des systèmes d’une intolérance absolue à la moindre particule. Malheuresement, il est impossible de continuer avec des moteurs anciens, certes plus fiable, mais beaucoup trop polluants.
Alexandre Astier avait raison : l’absurdité thermodynamique
Face à ce constat d’échec industriel, il est difficile de ne pas repenser à la sortie médiatique d’Alexandre Astier qui avait fait grand bruit. Avec son style inimitable, le créateur de Kaamelott pointait du doigt l’absurdité fondamentale du moteur thermique :
« On fait des explosions dans un cylindre avec 300 pièces pour recréer un mouvement rotatif ».
Il n’a pas tort. Nous sommes arrivés à un point où pour maintenir cette technologie en vie face aux normes écologiques, nous devons déployer des trésors d’ingénierie qui la rendent paradoxalement moins fiable. Astier rappelait qu’un moteur électrique compte environ 7 pièces mobiles, contre plusieurs centaines pour un thermique.

Les chiffres du rendement finissent d’enfoncer le clou. Un moteur thermique moderne, aussi pointu soit-il, gaspille environ 60 à 70 % de l’énergie de votre carburant en chaleur (ce qui est pratique pour le chauffage l’hiver, moins pour votre portefeuille). Son rendement réel tourne souvent autour de 30 %. En face, un moteur électrique convertit plus de 90 % de l’électricité en mouvement.
Le mur est atteint
Ce que nous montre cette épidémie de casses moteur, c’est que nous avons probablement atteint le mur technologique du moteur à combustion. Pour le rendre plus propre, il faut le complexifier et le fragiliser à un niveau qui devient économiquement insoutenable pour les constructeurs (Hyundai a provisionné 5 milliards de dollars pour ses soucis moteurs ! ) et insupportable pour les clients.
La transition vers l’électrique n’est pas seulement une question de batteries ou d’autonomie. C’est aussi, et peut-être surtout, un retour à une forme de simplicité mécanique. Un rotor, un stator, et basta. La complexité fascinante du moteur à explosion est en train de devenir son tombeau.
Et pendant ce temps, l’électrique encaisse les kilomètres (sans broncher)
Il est temps de tordre le cou à la plus grosse fake news de la décennie : non, votre batterie ne va pas finir à la poubelle au bout de trois ans comme celle d’un vieil iPhone. C’est même tout l’inverse. Une étude publiée dans Nature et relayée récemment a analysé près de 29 millions de contrôles techniques et le verdict est sans appel : les Tesla affichent une espérance de vie médiane de plus de 328 000 km, surpassant largement les meilleurs diesels du marché.

La réalité, c’est qu’une batterie de voiture électrique est conçue pour durer plus longtemps que la caisse elle-même. Les données montrent qu’après 200 000 km, la plupart des batteries conservent encore plus de 80 % de leur capacité d’origine.
Quant au moteur, le risque de casse est plus faible que sur un thermique. Pourquoi ? Parce qu’un moteur électrique est d’une simplicité biblique face à une usine à gaz thermique : pas de courroie qui baigne dans l’huile, pas de limaille microscopique qui vient gripper des bielles, juste un rotor qui tourne.
Et si vous envisagez les voitures hybrides, laissez tomber, leur fiabilité est encore plus désastreuse.
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