Et si Microsoft avait trouvé une solution miracle à la surchauffe du Snapdragon 810 ?

 
Au milieu de la semaine, Microsoft annonçait deux nouveaux smartphones haut de gamme : les Lumia 950 et Lumia 950 XL. Ce dernier, équipé d’un Snapdragon 810, dispose d’une particularité surprenante : son SoC est refroidi par un système de liquid cooling. Une solution originale puisqu’elle refroidit le processeur en faisant passer un liquide spécial sur sa surface. Faisons le point sur cette technologie finalement bien connue et utilisée par Microsoft sur son dernier téléphone mais que d’autres constructeurs ont certainement dû intégrer auparavant.
centrale nucléaire smartphone

Microsoft a donc annoncé cette semaine deux nouveaux Windows Phone haut de gamme, les Lumia 950 et Lumia 950 XL. Des smartphones intéressants sur bien des points puisqu’il s’agit des premiers téléphones haut de gamme conçus par Microsoft et non plus par Nokia. Microsoft a donc inclus tous les composants que l’on peut attendre d’un flagship en 2015 ainsi que des nouvelles fonctionnalités innovantes et prometteuses comme Continuum. On ne revient pas en détail sur les nouveautés de ce téléphone, notre ami Cassim a parfaitement couvert ces deux appareils à l’occasion de prises en main.

 

Microsoft n’a pas peur du vilain grand Snapdragon 810

Ce qui nous intéresse ici, c’est le Lumia 950 XL. Un smartphone de 5,5 pouces que Microsoft a choisi d’équiper d’un Snapdragon 810. Un SoC que l’on connaît maintenant de triste réputation pour ses mauvaises habitudes de chauffe. C’est bien simple, depuis le début de l’année, tous les smartphones Android embarquant un Snapdragon 810 nous ont déçus, essentiellement parce qu’en raison de sa trop grande tendance à chauffer, les performances étaient souvent moins bonnes que le Snapdragon 801, sorti pourtant une année plus tôt.

lumia 950 xl
Le Lumia 950 XL

Cette vilaine tendance à brûler les mains des utilisateurs, Microsoft la connaissait bien. Mieux, il l’a même anticipée en annonçant que le Lumia 950 XL sera l’un des rares téléphones à pouvoir exploiter la puce de Qualcomm « à son maximum », grâce à un système de refroidissement dit liquid cooling. D’ailleurs si ce système de liquid cooling est présent, « c’est parce que l’équipe de développement de la Surface a été impliquée dans la conception du Lumia 950 XL ». Comment ? Pourquoi ? Durant sa conférence, Microsoft est passé très, trop rapidement sur cet aspect, en laissant planer le doute ou en laissant son public croire à un miracle. Il est donc temps de s’intéresser à cette technologie déjà largement éprouvée.

 

Plus de puissance = plus de consommation = plus de chaleur dégagée

Avant de nous intéresser au liquid cooling, penchons-nous d’abord sur les raisons de la chauffe des SoC et plus généralement de tout composant électronique. Ce qu’il faut retenir c’est que, soumis à un courant électrique, n’importe quel composant électronique se comporte comme une résistance et transforme l’énergie électrique en énergie thermique. En chaleur, donc, et cette chaleur peut aller jusqu’à détruire le composant si elle est trop élevée.

Snapdragon 620

Pour que le composant électrique en question dure le plus longtemps possible, il faut donc trouver des moyens, soit de limiter cette chaleur, soit de la dissiper efficacement. Pour la limiter, tout d’abord, il existe deux solutions. La première matérielle : si un processeur chauffe trop parce qu’il effectue trop de calculs, il suffit de le brider, que ce soit en termes de fréquences ou en termes de consommation électrique. La seconde est logicielle : il suffit de programmer le processeur ou le composant de telle façon à ce que les tâches soient mieux réparties : les tâches les plus simples reviennent aux cœurs les moins gourmands en énergie tandis que les plus compliquées reviennent aux cœurs les plus sophistiqués. Une méthode plus simple à écrire qu’à mettre en œuvre, mais que l’on retrouve par exemple dans l’architecture big.LITTLE d’ARM.

Dans le cas du Snapdragon 810, ces deux méthodes de limitation de la chaleur ne suffisent pas à régler tous les problèmes. En fait, le Snapdragon 810 a beau avoir une consommation électrique limitée et une répartition des tâches optimisées, le SoC de Qualcomm continue de chauffer encore beaucoup. Il n’y a donc pas d’autres solutions que de l’évacuer. Mais, étant donné la finesse de gravure du SoC (20 nm), la surface sur laquelle la chaleur se dégage est minuscule, ce qui la rend encore plus difficile à dissiper.

 

La difficile question de l’évacuation de la chaleur

Cette problématique n’est pas nouvelle puisqu’elle existe depuis très longtemps sur les PC. Pour évacuer la chaleur émise par les processeurs des PC, on utilise généralement des matériaux conducteurs comme le cuivre ou l’aluminium, qu’on colle directement sur le composant et desquels on fait partir des cheminées auxquelles on donne une forme — en ailettes par exemple –  permettant de laisser la chaleur partir plus facilement. Ajoutez à cela un ventilateur pour mieux refroidir ces ailettes et vous tenez un très bon moyen d’évacuer simplement de la chaleur. Ceux qui ont un PC de jeu connaissent bien cette méthode d’évacuation puisqu’ils sont les premiers à intégrer un ventirad à leur processeur.

ventirad zalman
Un ventirad pour PC.

Le problème avec cette solution, c’est qu’elle demande de la place et qu’elle se révèle bruyante. Deux contraintes incompatibles avec un smartphone ou un appareil réellement mobile. La deuxième solution pour évacuer la chaleur sur un PC est le water cooling. Comme son nom l’indique, c’est un refroidissement qui utilise l’eau – qui transporte plus facilement la chaleur et la froideur que l’air — et non plus des radiateurs classiques. On attache ainsi aux composants des blocs sur lequel on fait passer un circuit avec de l’eau. Une pompe située en dehors du PC s’occupe alors de faire circuler l’eau, de telle façon à ce qu’elle passe sur les composants puis soit ensuite refroidie dans un radiateur extérieur à la tour du PC.

Un système de water cooling sur PC

Une configuration qui ne convient toujours pas aux smartphones à cause de la pompe, que l’on ne peut placer nulle part dans la coque étroite d’un téléphone. Certains constructeurs de smartphones ont donc opté pour une technologie bâtarde : le liquid cooling. Pour faire simple, le liquid cooling est une variante du water cooling auquel on aurait retiré la pompe. L’eau est ici remplacée par un liquide spécial qui se transforme rapidement en vapeur passé une certaine température. Cette vapeur s’évacue ensuite toute seule dans un circuit spécial (des tuyaux en cuivre) qui court dans les parties les plus froides de l’appareil, que ce soit vers un ventilateur, quand il existe, ou vers une partie avec peu ou sans composants afin de revenir à la forme liquide.

 

Le liquid cooling, une solution qui a fait ses preuves

Microsoft connaît bien ce système de refroidissement. En fait, il l’a déjà timidement utilisé sur la Surface 3 avant d’en faire l’un des moyens de refroidissement principal de la Suface 4. Pour la Surface 3, le circuit de refroidissement du liquide était très limité. En fait, et comme le montrent ces images issues du site iFixit, ce circuit était situé dans un des coins de la tablette. Pour la Surface Pro 4, le circuit de refroidissement part du processeur, où le liquide se transforme en vapeur. Ce liquide est ensuite refroidi passivement à 60 % par une plaque de métal située en dessous du pied de la tablette (là où il n’y a aucun composant) et à 40 % par un ventilateur situé sur le côté opposé au processeur. La chaleur est donc mieux répartie et l’utilisateur ne devrait pas sentir une chauffe particulière à un point précis de la tablette.

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La solution de liquid cooling de la Surface Pro 3 : le liquide va et vient du processeur au ventilateur de façon à être refroidit en permanence. (source iFixit)
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Le système de liquid cooling de la Surface Pro 4. Le circuit commence à droite , à avec le processeur, puis le liquide se rend près du ventilateur et d’une plaque de refroidissement. (Source)

C’est justement les ingénieurs à l’origine de cette solution de refroidissement sur la Surface Pro 4 qui ont travaillé sur le système de refroidissement du Lumia 950 XL. La différence dans le cas de ce smartphone, c’est qu’il ne contient aucun ventilateur. On suppose pour l’instant — le téléphone doit sortir en novembre prochain et n’a donc pas pu être démonté — qu’un système de refroidissement par liquide part du processeur et court ensuite jusqu’à la coque ou vers une plaque de refroidissement située juste sous la coque. Selon Joe Belfiore, le responsable hardware des Windows Phone, ce système de refroidissement n’a que des avantages puisqu’il ne consomme pas de batterie supplémentaire et n’accroit pas le poids du téléphone.

Est-ce que ce que cette solution est efficace ? Pour l’instant, on aime à le croire. Cassim, le rédacteur de Frawin qui a pu prendre en main le Lumia 950 XL m’a assuré qu’il n’avait pas chauffé, même en le connectant à un second écran. Il faut également noter qu’il y a plus de chance que le Lumia 950 XL soit mieux refroidi que les autres smartphones disposant du Snapdragon 810. Et pour cause, ces derniers n’ont généralement aucun système de refroidissement ou tout au plus des lamelles de graphites censées évacuer la chaleur vers la coque. A priori, donc, le Lumia 950 XL devrait moins chauffer que les autres smartphones équipés de la puce de Qualcomm tout simplement parce qu’il dispose d’une solution de refroidissement, contrairement aux autres smartphones. De là à affirmer, comme Microsoft l’a fait durant sa conférence, que la puce pourra être exploitée à sa pleine capacité sans problème de chauffe, il n’y a qu’un pas que nous ne franchirons pas tant que nous n’aurons pas eu le téléphone entre les mains.

 

Une solution que l’on est amené à rencontrer de plus en plus souvent

Est-ce que Microsoft est le premier à intégrer un tel système de refroidissement à ses appareils ? En l’état c’est très difficile à dire. Ce qui est sûr, tout d’abord, c’est qu’il n’est pas le premier à y penser. En mars dernier, par exemple, Fujitsu avait dévoilé un système de refroidissement de smartphone très similaire à la solution utilisée par Microsoft. Sony semble également être ou avoir été intéressé par ce genre de solution. Une rumeur a notamment couru pendant quelque temps, rapportant que le Xperia Z5 Premium pourrait bénéficier d’un tel dispositif de refroidissement. On ne sait toutefois pas si cela a été le cas ou non. La technologie n’est en tout cas pas nouvelle et il ne serait pas étonnant que des constructeurs l’aient déjà intégré à leurs appareils sans s’en vanter.

xperia z5 premium rumeur teardown

Une photo en fuite d’un Xperia Z5 Premium montrerait un système de refroidissement de type liquid cooling au niveau du processeur du téléphone.

Reste qu’il est probable que l’on rencontre ce genre de solution de refroidissement plus régulièrement à l’avenir. Les SoC et processeurs étant de plus en plus petits et de plus en plus puissants, il ne fait aucun doute que la chaleur qu’ils dégagent sera de plus en plus importante dans les années à venir. Les constructeurs s’en cachent peut-être pour le moment, mais c’est un problème qu’ils rencontreront de plus en plus fréquemment dans les temps à venir. De ce point de vue, et c’est assez rare à dire, Microsoft aura été un véritable précurseur dans ce domaine.


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