Protéger ses données personnelles, un défi et une nécessité

 
Avec la multiplication des activités en ligne, nous n’avons d’autres choix que d’être inscrits sur plusieurs sites ; cette multiplication des comptes ici et là, bien qu’une vraie plaie, est devenue une sorte d’habitude. Entre les données bancaires et les données personnelles, les sites web manipulent des informations sensibles qui devraient nous inciter à plus de prudence. Alors, sommes-nous suffisamment vigilants ?
le piratage c'est du vol

Ces dernières années, la prolifération des services sur internet nous a amenés à nous enregistrer à de nombreuses reprises sur de multiples sites. Le résultat : nous possédons – en moyenne – une vingtaine de comptes différents ; du compte shopping aux comptes administratifs (assurances, mutuelles, etc.), en passant par les réseaux sociaux ou les forums. L’utilisateur n’a généralement pas le choix ; vouloir limiter le nombre de comptes pourrait être assez gênant, tout simplement parce que tous peuvent avoir un intérêt différent et une utilité à part entière.

Malheureusement, qui dit multiplication des comptes dit dispersement des informations personnelles à travers le web et multiplication des mots de passe ; un plaisir, à n’en pas douter, qui pousse certains à réutiliser les mêmes mots ou à privilégier les plus simples. Au final, nos informations se retrouvent à des endroits mal protégés ; une vulnérabilité qui devient un problème quand l’intégrité de données sensibles est en jeu.

Des données sensibles aux multiples usages

Sur internet, il y a deux types d’utilisations des données personnelles dont l’utilisateur doit prendre connaissance (et se méfier) : l’usage des données pour l’espionnage ou le profiling (majoritairement publicitaire) et le vol pur et simple des données à des fins compromettantes (usurpation d’identité) et malhonnêtes (utilisation des données bancaires).

Le premier cas est devenu monnaie courante, le profiling est souvent la contrepartie nécessaire pour les services gratuits ; Google tirant d’ailleurs de ce profiling publicitaire la majorité de ses revenus. Néanmoins, l’utilisation des données à ces fins-là se fait principalement de manière massive (par des robots, sans ciblage particulier). Du coup, le souci ne viendra pas tant de cette récolte massive d’informations, mais plutôt des politiques malséantes qui se cachent derrière : ce sont des tierces parties qui, selon leurs propres intérêts, fixent les limites de notre vie privée, et ce, à notre place.

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Le second cas d’utilisation des données – la cybercriminalité – doit être l’origine d’une bien plus grande vigilance. Les comptes en ligne constituent des sources riches en données personnelles « critiques » pouvant donner lieu à bien des usages. Il ne faut pas s’imaginer que le seul but des cybercriminels est de voler les données bancaires. Les comptes regorgent de données utilisables à des fins tout aussi malveillantes : numéro de sécurité sociale, numéro de passeport, carnet d’adresses, etc. sont autant de sources de chantage potentielles. Et c’est finalement là que nous sommes les plus vulnérables.

Être au mauvais endroit, au mauvais moment

La dispersion des données (c’est-à-dire la multiplication des comptes en ligne) augmente le risque de vol ; d’une part parce que la plupart des usagers ne font pas bon usage des mots de passe, d’autre part parce que la probabilité de se faire voler augmente logiquement avec le nombre de comptes crées. Même les géants du net se font voler, les mots de passe récupérés se payent alors à prix d’or sur le marché noir. Autant de raisons pour bien contrôler la sécurité de ses données.

L’usurpation d’identité est d’ailleurs devenue plus aisée qu’auparavant et les conséquences demeurent, elles, toujours aussi graves. Bien des internautes s’imaginent encore que pour être victime d’une attaque, il faut être la cible « directe » d’un hacker ou d’un cybercriminel ; sous-entendu : il faut avoir été visé personnellement. C’est une idée qui provoque malheureusement une baisse de vigilance chez ceux qui ne se sentent pas vulnérables. Cependant, dans beaucoup de cas, le piratage de comptes est plus global et automatique, et même souvent massif. Les systèmes et les comptes les moins protégés se font donc forcément emporter en premier.

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Une demande de réinitialisation suite à un piratage massif – Ebay

Pour se prémunir de ces vols de données, l’utilisateur doit prendre plusieurs mesures lui permettant d’éviter qu’elles soient emportées dans une large vague de piratage. Il est vrai que dans certains cas, ce sont des failles critiques ici et là (dont l’utilisateur n’a pas le contrôle) qui mettent à mal les données, mais dans la majorité des cas l’utilisateur a toute la maîtrise pour protéger ses données ; les attaques des hackers ne durant pas des années, les comptes résistants sont souvent épargnés. La première chose consistera donc à utiliser des mots de passe sûrs, premier « vrai » rempart dissuasif contre le vol de données.

Un mot de passe faible est une invitation au partage

Comme nous l’évoquions plus haut, la multiplication des comptes et des mots de passe n’incite pas les utilisateurs à choisir systématiquement des mots de passe complexes et distincts. Du coup, cracker un mot de passe peut s’effectuer en quelques secondes et peut permettre d’ouvrir plusieurs comptes à la fois : une aubaine pour le hacker. Pour nous, usagers, il est donc primordial d’utiliser un mot de passe différent pour chaque compte et de générer celui-ci de manière à ce qu’il ne soit pas rapidement trouvable. Et cela vaut aussi pour le réseau WiFi qui doit absolument être protégé en WPA2 par un mot de passe complexe différent de celui d’origine (surtout pour les box opérateurs).

Pour mettre en place un mot de passe complexe, il faut éviter les mots du dictionnaire ou les évidences comme « 1234 », « mot de passe » ou sa date de naissance par exemple. Il n’est pas nécessaire, en revanche, de se casser la tête à générer un ensemble de symboles sans aucun sens. Parfois, il suffit d’avoir recours aux chiffres, aux majuscules et aux symboles pour complexifier un mot de passe déjà existant.

Une idée de mot de passe sûr

Par exemple, prenons un mot de passe simple : « frandroid ». N’étant constitué que de lettres minuscules, celui-ci peut être cracké en quelques minutes (on suppose qu’il n’appartient pas au dictionnaire du hacker, tout comme « android » – biais acceptable pour notre exemple). Le premier point de complexité à appliquer est donc d’y inclure des majuscules. Ainsi, « FrAndroid » devient plus résistant, il tient presque une semaine. Puis, on peut y ajouter un simple symbole : « FrAndroid! » ; ce nouveau mot de passe tient alors plusieurs mois. Il est possible de remplacer des lettres par des chiffres ressemblants (‘o’ devient 0) puis, on peut faire des phrases : « J’ad0re FrAndroid! » tient, théoriquement, 2500 milliards d’années. Rien de bien compliqué.

Enfin, il faut savoir que certains outils permettent de gérer l’ensemble de nos mots de passe. Cela a l’avantage de les garder en mémoire dans un coffre-fort sécurisé : l’utilisateur n’a pas à les noter, le visiteur n’y a pas accès (contrairement au stockage « en clair » de certains navigateurs). De plus, ces outils permettent souvent le remplissage automatique de formulaires ou de données diverses ainsi que la génération de mots de passe complexes. Un brin pratique dans l’usage quotidien.

Générateur de mot de passe Dahslane
Générateur de mot de passe Dahslane

Parmi ces coffres-forts, nous ne pouvons que conseiller ceux qui ne stockent pas le mot de passe maître (celui qui permet de déchiffrer le coffre-fort), comme PasswordBox ou le français Dashlane. Ce principe de « Zero Knowledge » assure à l’utilisateur d’être le seul à avoir accès au coffre-fort de mots de passe ; ne laissant à personne d’autre la possibilité de les récupérer. Une choix que nous aimerions retrouver dans plus de services en ligne.

Utiliser des services Zero Knowledge

Quitte à disperser ces données sur internet pour des raisons pratiques, autant disperser ces données de manière cryptée afin qu’elles ne soient pas lues par autrui. En effet, même si l’utilisation de mots de passe complexes est primordiale, comme nous venons de l’expliquer, il existe néanmoins une brèche qui vient des serveurs eux-mêmes : ces mots de passe sont également stockés. Donc, même avec des mots de passe impossibles à cracker, il existe un risque que celui-ci soit récupéré par un autre biais : le serveur. Piratage ou espionnage, les possibilités sont diverses. Les récents scandales provoqués par les déclarations d’Edward Snowden ne font que confirmer la vulnérabilité de nos données sur des serveurs pouvant lire massivement les contenus, sans l’accord des utilisateurs.

Zero Knowledge

Une solution simple à cela : privilégier les sites qui ne stockent pas le mot de passe maître. Cela a le désavantage d’être fortement dépendant de votre responsabilité, et de votre mémoire… Mais, impossible de décrypter massivement les données personnelles sans aucun mot de passe.  Vous êtes l’unique détenteur de la clé, vous êtes la seule personne à pouvoir lire le contenu (en un temps raisonnable).

De plus en plus de sociétés choisissent la politique du « Zero Knowledge ». Comme nous l’indiquions, il y a PasswordBox ou Dashlane pour les coffres-forts numériques, mais il y a aussi SpiderOak pour le Cloud. Ce dernier sera alors un remplaçant idéal de Google Drive ou de DropBox qui, en plus de ne pas être 100 % sûrs, semblent moins regardants sur l’usage des données privées. Dans le même principe, il existe des sites qui ne stockent pas les données de navigation, à l’image du moteur de recherche DuckDuckGo.

spideroak

Naviguez couverts

Protéger ses données n’est finalement pas si compliqué. Une bonne gestion des mots de passe est un premier rempart de taille qui dissuadera bien des pirates. Si les mots de passe ne sont pas votre fort, des outils comme PasswordBox ou Dashlane vous simplifieront la vie et vous protégeront grâce à de très bons mots de passe. Puis, si la protection de votre vie privée est importante, vous pourrez utiliser des services en ligne adéquats : DuckDuckGo pour la recherche en ligne, SpiderOak pour le stockage sur le Cloud, ou tout autre service basé sur le « Zero Knowledge ».

On l’a bien compris, disperser ces données personnelles est devenu nécessaire pour utiliser Internet. D’ailleurs, pouvoir accéder à ses données partout dans le monde est devenu tellement pratique et habituel qu’il serait difficile de s’en passer. Mais, toutes ces nouveautés et cette facilité d’utilisation nous font oublier nos réflexes d’antan : les informations personnelles doivent (pouvoir) rester personnelles. On disperse des données ici et là comme si nous faisions des photocopies de nos documents et que nous les dispersions dans les rues. La forme change, la manière aussi, restons donc vigilants. L’utilisation et la récupération des données personnelles sont probablement les activités les plus lucratives du web, et ça, il ne faut pas l’oublier.


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