« Tout le monde se tait » : Apple accusé de favoriser des violations des droits de l’homme dans les mines

En République Démocratique du Congo

 

Un groupe d'avocats représentant la République Démocratique du Congo accuse Apple de ne pas vérifier l'origine des minerais qui servent à fabriquer ses produits. Les exploitations minières seraient le terrain de graves violations des droits de l'homme pour la RDC qui souhaite mettre fin à ces souffrances sur son sol.

Source : Zhiyue sur Unsplash

C’est une accusation qui revient régulièrement dans l’industrie électronique : les conditions d’extraction et de traitement des minéraux qui servent à fabriquer les produits qu’on utilise tous les jours. Et lorsqu’elle s’attaque au géant numéro 1, celui qui vend des iPhone, des AirPods ou des Mac, c’est d’autant plus important qu’Apple se targue de vérifier d’où proviennent les métaux qu’elle utilise. Ce alors même qu’elle se taille une image de marque de luxe accessible.

Apple mis en demeure par la République Démocratique du Congo pour ses mauvaises vérifications de la provenance des métaux

Robert Amsterdam d’Amsterdam & Partners LLP à Washington DC et William Bourdon de Bourdon & Associés à Paris ont été mandatés par la République Démocratique du Congo pour mettre en demeure Apple, comme l’ont rapporté nos confrères des Numériques. Les avocats donnent trois semaines à la multinationale pour répondre aux questions du gouvernement de Kinshasa. Elles portent sur les conditions d’extraction des métaux utilisés dans la fabrication des produits Apple ainsi que des vérifications de l’entreprise sur ces dernières. Derrière cela, un rapport d’une cinquantaine de pages sur les « minéraux sanglants » en RDC, sous-titré : « Tout le monde voit les massacres dans l’est du Congo. Mais tout le monde se tait. »

Les avocats ainsi que la République Démocratique du Congo se disent prêts à « engager des litiges au nom de la RDC en relation avec des individus et des entreprises impliqués dans la chaîne d’extraction, d’approvisionnement et de commercialisation des ressources naturelles et des minerais pillés en RDC. »

« De graves violations des droits de l’homme » dans les mines qui servent à fabriquer des iPhone

Pour Robert Amsterdam, « année après année, Apple a vendu de la technologique fabriquée avec des minéraux provenant d’une région dont la population est dévastée par de graves violations des droits de l’homme. » Apple ne vérifierait pas assez les conditions de travail des employés qui extraient ces minéraux. Cependant, pour l’avocat américain, « ces affirmations ne semblent pas reposer sur des preuves concrètes et vérifiables. »

La couverture du rapport « Minéraux sanglants » des avocats de la RDC // Source : Amsterdam & Partners LLP

Il donne l’exemple de l’étain, du tungstène et du tantale (les minéraux clés dits « 3T », indispensables) : la production rwandaise serait proche de zéro, alors que les grandes entreprises indiquent que leurs minéraux 3T proviennent du Rwanda. En fait, la production serait localisée en RDC, dans d’atroces conditions.

Ce qui engendrerait des dommages et des souffrances aux populations civiles dans ces zones, avec violence et financement de milices et de groupes terroristes. Pour les avocats, des enfants seraient forcés à travailler dans ces mines tandis que l’environnement serait dévasté. Toute cette entreprise permettrait du blanchiment d’argent par la vente de minerais issus de RDC.

Vers un risque de guerre à l’est de la RDC, face à un mouvement rebelle soutenu par le Rwanda

Pour comprendre pourquoi ces accusations sont lancées de la part de la République Démocratique du Congo face à Apple, il faut aussi comprendre son contexte géopolitique. L’est du pays, à savoir la région du Nord-Kivu, est le théâtre d’une guerre menée par le mouvement rebelle M23, soutenu par le Rwanda, pays limitrophe, depuis plus de deux ans. Ce qui intéresse le groupe, c’est en partie la géologie de la zone : elle est très riche en terres rares, ce qui en fait une manne économique très importante.

Mine de cobalt en RDC

La République Démocratique du Congo ne semblant pas pouvoir faire face à cette menace, ou du moins difficilement, elle mène une opération de sensibilisation à l’international. À ce propos, le président de la République Emmanuel Macron est en ce moment même en déplacement à Kinshasa, la capitale du pays, pour s’entretenir avec son homologue congolais Félix Tshisekedi, comme l’a rapporté Le Monde.

Si le président français est en déplacement, c’est que le pays espère obtenir une condamnation de la France plus forte par rapport à ces groupes armés soutenus par le Rwanda. Même chose avec Apple : la RDC cherche à obtenir de l’entreprise qu’elle ne se fournisse plus auprès des mines du Nord-Kivu. Le RDC estime que cela assècherait les rentrées financières de ces groupes armés.


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