
Ces jours-ci, le débat autour des renouvelables s’est enflammé. Pour cause, des experts soupçonnent ces énergies d’être à l’origine de l’immense coupure ayant récemment touché la péninsule ibérique, sachant surtout que le sud-ouest de l’Espagne accueille d’importantes installations solaires.
Ceci dit, la cause exacte de l’incident reste encore indéterminée, et « toutes les hypothèses sont ouvertes », a affirmé Sara Aagesen, ministre espagnole de la Transition énergétique.
Quoi qu’il en soit, une chose est sûre : l’arrivée en masse des renouvelables risque de fragiliser le réseau. Et à l’heure où solaire et éolien s’imposent de plus en plus dans le mix électrique, les infrastructures devraient impérativement s’adapter aux changements.
L’intermittence des renouvelables : une mise à l’épreuve pour le réseau
Le solaire et l’éolien se caractérisent par la variabilité de leur production, suivant les conditions météorologiques et l’alternance jour / nuit. Leur intermittence est d’ailleurs l’un des principaux arguments avancés par les anti-renouvelables.
Cette particularité tend à bouleverser l’équilibre production et consommation du système électrique, la demande et la production ne parvenant plus parfois à coïncider sur un même niveau. C’est par exemple le cas lors des après-midi d’été, lorsque l’ensoleillement est à son pic, mais que la consommation reste faible — des situations qui peuvent entraîner un effondrement temporaire des prix de l’électricité.

Or, cet équilibre entre offre et demande est au cœur des enjeux énergétiques : toute l’électricité produite doit absolument être consommée. Dans le cas contraire, le réseau risque de tomber, car la fréquence (à 50 Hz en Europe) ne serait plus assurée.
L’importance de l’inertie
Un autre problème lié à la montée des renouvelables réside dans leur mode de fonctionnement qui diffère radicalement de celui des sources d’énergie conventionnelles. Ces dernières (centrales thermiques, nucléaires, hydroélectriques, etc.) produisent du courant grâce à des turbines mises en mouvement par de la vapeur ou de l’eau (selon la centrale).
La turbine entraine à son tour un alternateur, une machine dotée d’un rotor, qui va générer l’électricité. Ainsi, avant qu’elle ne soit transformée en électricité, l’énergie prend d’abord une forme cinétique permettant la rotation de la machine, et c’est ce qui constitue l’inertie du système.
Grâce à cette dernière, la machine peut continuer de tourner pendant un court instant si jamais une perturbation survient sur le réseau, et cela assure une certaine stabilité.

Comme le précise Connaissances des Energies, « avec leur gigantesques rotors tournoyant à grande vitesse, ces machines fournissent de l’inertie au système électrique : si une centrale est en panne ou si la demande en électricité augmente trop vite, elles aident à stabiliser le réseau en libérant l’énergie du mouvement (ou cinétique) emmagasinée dans les rotors« .
Cet atout est cependant absent chez les sources renouvelables : on ne peut pas piloter aussi facilement leur puissance. Pour ces technologies, le courant généré ne peut pas directement être injecté puisqu’il doit d’abord passer par un convertisseur électronique.
C’est pour cela que Marc Petit, professeur en systèmes électriques à l’école CentraleSupélec, cité par Connaissance des énergies, précise que les centrales conventionnelles bas carbone (centrales hydroélectriques et nucléaires) deviendront plus que jamais « essentielles pour la stabilisation du système », à mesure que les installations fossiles disparaitront.
Stocker l’énergie pour soulager le réseau
Mais ce n’est pas la seule solution. Les systèmes de stockage sont l’une des meilleures solutions pour accompagner l’essor des renouvelables. Leur rôle consiste à absorber le surplus d’électricité lors des pics de production et de le réinjecter au moment opportun. En d’autres termes, ils permettent de décaler la consommation dans le temps.
Selon l’Agence internationale de l’énergie, la sécurisation de l’approvisionnement reposera en grande partie sur ces dispositifs. La capacité actuelle de stockage devrait être multipliée par six à l’horizon 2030 selon l’organisme.
La technologie de stockage la plus répandue dans le monde reste à ce jour les STEP (ou stations de transfert d’énergie par pompage-turbinage). Le système fonctionne en pompant de l’eau vers un réservoir situé en hauteur, un processus alimenté grâce au surplus d’électricité. Une fois que la demande augmente, cette eau est relâchée par gravité en entrainant des turbines sur son passage pour produire de l’électricité.

Suivent après les batteries géantes qui s’avèrent également prometteuses. Ces systèmes connaissent un essor sans précédent, en particulier dans les régions où les renouvelables sont fortement développés (comme en Californie par exemple).
Ces deux technologies sont les plus connues, mais d’autres solutions commencent à gagner du terrain : l’hydrogène, les volants d’inertie (qui stockent l’énergie sous forme cinétique), ou encore les systèmes par air comprimé (qui emmagasinent de l’air sous pression avant de le libérer pour produire de l’électricité).
Toutefois, chacune de ces options présente des limites techniques, économiques ou environnementales, qui freinent encore leur généralisation à grande échelle.
Vers des réseaux intelligents ?
Avec l’essor des énergies renouvelables, la transition vers des réseaux intelligents, ou « smart grids », est plus que jamais essentielle. Cela consiste concrètement à intégrer la technologie de l’information et de la communication à tous les niveaux : production, transport, distribution, et consommation. Des capteurs sont ainsi installés sur l’ensemble du réseau pour mesurer plus facilement et en temps réel les flux d’énergie circulant sur les lignes.
Les réseaux intelligents sont une voie vers une meilleure gestion de l’équilibre entre la production et la demande. Ces systèmes sont capables d’anticiper la production et la consommation à court et long terme, et d’ajuster automatiquement le fonctionnement du réseau face aux fluctuations. Résultat : une meilleure sécurité et une meilleure résilience des infrastructures électriques.

On peut par exemple citer le V2G, la technologie de recharge bidirectionnelle (Vehicule-to-grid) permettant d’utiliser l’énergie contenue dans la batterie d’une voiture électrique pour alimenter le réseau en cas de besoin. La R5 électrique de Renault est la première voiture à intégrer cette technologie en France.

Cependant, un smart grid implique l’ensemble des acteurs du réseau, et cela peut être un frein à son déploiement. Autre obstacle à déplorer : la difficulté de la gestion des flux de données générés par ces infrastructures connectées.
Un renforcement inévitable du réseau
Si l’intégration des renouvelables nécessite une profonde adaptation des infrastructures, la hausse attendue de la demande électrique — due à l’électrification et à l’apparition d’autres postes de consommation comme les électrolyseurs ou les centres de données — impose également un renforcement du réseau.
Pour aller plus loin
RTE dévoile son plan à 100 milliards d’euros : quelles conséquences pour la facture des Français ?
Dans cette démarche, par exemple, la France prévoit d’investir près de 16,5 milliards d’euros pour renforcer son système en augmentant la capacité des lignes. « D’ici 2040, l’enjeu est de faire transiter davantage d’électricité sur le réseau, tout en optimisant son fonctionnement afin d’éviter les congestions que pourraient générer ces nouveaux flux », précise RTE dans un communiqué détaillant sa stratégie.
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