La liberté (d’expression) des uns s’arrête là où commence celle d’Elon Musk

Un sacré (m)Elon

 

Ces dernières 48 heures, Elon Musk a décidé de s'en prendre aux comptes Twitter qui lui posaient problème. S'en est ensuivie une vague de bannissements.

Elon Musk

Il y a quelque chose de pourri au royaume de Twitter. Les choses ne se déroulent pas tout à fait comme Elon Musk l’espérait depuis son rachat du réseau social. Après de nombreux départs et licenciements et la perte de plusieurs annonceurs, le milliardaire décide d’appliquer sa conception à géométrie variable de la liberté d’expression.

Tout commence par un jet

Lors de son rachat de Twitter, Elon Musk prônait la liberté d’expression sur la plateforme, sans aucune limite, si ce n’est celle de la loi qui lui a rappelé que certaines paroles étaient répréhensibles. En ce sens, le milliardaire a annoncé que les comptes bannis avant son acquisition auraient droit à une seconde chance. C’est plutôt cohérent, même si cela réhabilite même des néonazis…

Attention, « nouvelle règle » ! Le 14 décembre, Elon Musk décide de bannir le compte Twitter @ElonJet suivant les déplacements de son jet privé, sous prétexte qu’il ne « respecte pas les règles de Twitter ». Dans la foulée, Jack Sweeney, le tenancier du compte, a subi le même sort. La raison ? La localisation en temps réel d’un individu représente selon lui « une violation de la sûreté physique », alors que ces données sont en accès libre publiquement. On passera sur le fait qu’il a lui-même demandé des informations sur une personne à ses 121,6 millions d’abonnés, plaque d’immatriculation à l’appui

Le Mastodon dans un magasin de porcelaine

Agissant comme un enfant frustré, Elon Musk est allé jusqu’à interdire la publication de liens vers d’autres plateformes proposant le suivi de son jet privé. Il est ainsi impossible de publier un lien vers le compte Instagram Elon Musk’s Jet. Le compte officiel de Mastodon, un réseau social concurrent, a également fait la promotion du compte de suivi de jet sur sa plateforme, entrainant son bannissement également. Depuis, il est devenu impossible de publier le moindre lien Mastodon sur Twitter.

Message "Un problème est survenu, mais ne vous inquiétez pas" lors de la publication d'un lien Mastodon sur Twitter
« Ne vous inquiétez pas, ça va bien se passer… »

Plusieurs journalistes de renom ayant commenté l’affaire, dont Ryan Mac du New York Times, Donie O’Sullivan de CNN Drew Harwell du Washington Post, Micha Lee de The Intercept et Matt Binder, Aaron Rupar et Tony Webster de Mashable, ont également été bannis de Twitter. La spirale infernale continue pour Elon Musk et son égo qui, selon un employé de Twitter cité par la journaliste Kylie Robison, « est paranoïaque ». Le big boss prendrait toutes ces décisions de manière unilatérale sans même en parler à son équipe.

Final Space

Bug technique ? Les comptes bannis de la plateforme pouvaient toujours rejoindre une conférence audio Twitter Spaces. Drew Harwell, Matt Binder et le compte ElonJet ont ainsi créé une discussion à laquelle Elon Musk lui-même a participé. Face à une contradiction légitime, il a terminé son argumentaire par « vous avez doxé [NDLR : action de dévoiler des informations personnelles de quelqu’un d’autre en ligne], vous avez été suspendus, fin de l’histoire », puis est parti sans davantage de préambule.

 

Plus fort encore : Elon Musk a fait désactiver la fonction Twitter Spaces, désormais indisponible. On imagine qu’il s’agit là d’une décision temporaire le temps d’empêcher complètement les comptes bannis de rejoindre ces espaces de discussion, mais aucune communication officielle n’a été faite pour le moment.

Cry Me A River

Effet Streisand oblige, Elon Musk se retrouve sous le feu de vives critiques, ce qui semble l’amuser au vu de son tweet « j’adore Barbara Streisand lol ». Il a donc décidé de réaliser un sondage sur son compte Twitter afin de demander quand doivent être réactivés les comptes de celles et ceux qui « ont fait du doxxing sur [son] emplacement exact en temps réel ». Mais tout ne s’est pas passé comme il l’espérait…

Avec plus de 535 000 votes, c’est le « maintenant » qui l’a emporté. Difficile de garder sa communauté soudée à ses côtés lorsqu’on prône la liberté d’expression absolue et que l’on souhaite censurer des journalistes. Qu’à cela ne tienne, le milliardaire a trouvé une excuse pour ne pas suivre la « voix du peuple » (rappelez-vous, il s’en était remis à un sondage pour réintégrer Donald Trump, citant l’expression « vox populi, vox dei ») : « Désolé, il y avait trop d’options ».

Un second sondage est donc en cours à l’heure de la rédaction de ces lignes, avec deux options uniquement : « maintenant » ou « dans 7 jours ».

Pas de chance pour Elon Musk, le « Maintenant » l’emporte à l’heure actuelle.

L’Union européenne s’en mêle

Věra Jourová, vice-présidente de la Commission européenne a publiquement pris la parole à ce sujet sur Twitter :

Les nouvelles concernant la suspension arbitraire de journalistes sur Twitter sont inquiétantes. La loi européenne sur les services numériques exige le respect de la liberté des médias et des droits fondamentaux. Cette exigence est renforcée par notre loi sur la liberté des médias. Elon Musk doit en être conscient. Il y a des lignes rouges. Et des sanctions, prochainement.

Voilà donc un nouveau chapitre palpitant qui s’ouvre dans la grande saga du rachat de Twitter par Elon Musk…


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