Nvidia abuse-t-il avec les prix de ses GeForce RTX 4000 ? Ce n’est pas si simple

 

Les prix des cartes graphiques ont bondi depuis quelques années pour devenir hors de prix. La faute de Nvidia qui gonfle ses prix ? Pas vraiment.

Source : Anthony Wonner – Frandroid

À chaque annonce de carte graphique, les joueuses et les joueurs tirent la langue. Même avec le lancement de la GeForce RTX 4070 Ti, la première de sa génération à descendre sous la barre des 1000 euros, le prix reste toujours très peu attractifs.

C’est d’ailleurs ce qui a valu à cette carte d’obtenir un 8/10 sur Frandroid — au lieu d’un 9/10 par exemple — et le même niveau de note généralement dans la presse tech ou chez les vidéastes sur YouTube. Toutes et tous critiquent le placement tarifaire des nouvelles cartes de Nvidia. Il faut dire que la carte n’offre pas de progrès en termes de rapport performance/prix face à la génération précédente : vous obtenez 40 % de performances en plus pour un prix qui a gonflé de 40 % (face à la RTX 3070 Ti).

Les vidéastes ont été particulièrement vocales concernant Nvidia

Alors est-ce que la firme profite de son avance sur la concurrence pour se goinfrer sur les prix ? Non, la réalité est bien plus complexe.

TSMC : l’intermédiaire obligatoire qui fait grimper la facture

Les GeForce RTX 4000 de Nvidia utilisent le dernier procédé de fabrication de TSMC en date, le TSMC 4N. Le fondeur taïwanais est le seul capable d’assurer la production en masse sur un tel niveau de progrès technologique pour des clients comme Apple ou Nvidia.

Et le moins que l’on puisse dire, c’est que TSMC fait payer très cher cette expertise et cette capacité de production. Un rapport de Digitimes publié en novembre 2022 révèle que TSMC a fait exploser les tarifs de ses procédés les plus avancés.

Les prix pratiqués par TSMC

 

Là où un wafer (la galette sur laquelle on vient découper un SoC) coûtait 10 000 dollars en 2018 pour du 7 nm, la barre des 20 000 dollars a été franchie pour les 3 nm. Bref, le prix du transistor a explosé, surtout pour les cartes graphiques de Nvidia qui utilisent de très larges puces. Le GPU AD102 qui équipe la RTX 4090 comprend 76 milliards de transistors, c’est plus que dans une puce Apple M1 Max complète (57 milliards) qui comprend un processeur, un GPU et d’autres éléments.

On comprend donc que TSMC fait peser une pression financière sur Nvidia. Ce dernier paye ici aussi la complexité de son architecture monolithique. Si AMD peut proposer des prix plus serrés avec ses Radeon RX 7000, c’est grâce à sa conception en chiplets qui permet à la marque de mélanger plus de niveaux de technologies dans ses puces.

Mais TSMC n’est pas le seul à blâmer pour l’augmentation des prix.

Le prix des matières premières a flambé

La crise du Covid et les transformations du marché depuis 2019 ont fait exploser le prix de la matière première nécessaire à la fabrication des composants et en particulier des cartes graphiques.

Le prix des métaux précieux entre 2019 et 2022 // Source : Statista

La situation s’est améliorée depuis la fin de l’année 2021, mais les prix des métaux et notamment du Rhodium et de l’Iridium restent très élevés. On parle de tarifs qui ont été multipliés par 7 ou 10 pour le premier et par 5 pour le second. Tout cela en seulement quelques années.

Nvidia ne définit pas seul les tarifs

Évidemment, il est impossible de connaitre dans le détail les calculs de Nvidia pour déterminer son prix de vente. C’est d’autant plus complexe que Nvidia n’est qu’un maillon de la chaîne. Si vous achetez une carte graphique, il y a des chances qu’elles soient commercialisées par Gigabyte, MSI, Asus ou un autre partenaire GeForce qui, forcément, intégrera sa propre marge au tarif. À cela, vous pouvez ajouter la marge de la boutique qui vous vend la carte graphique.

Ces intermédiaires ont toujours été là, mais chaque maillon a aussi connu des années tumultueuses avec le Covid 19 et veut probablement solidifier ses marges.

Les prix des Nvidia GeForce sont-ils trop élevés ?

Alors Nvidia gonfle-t-il ses tarifs ? Il ne fait aucun doute que la firme ne se presse pas pour réduire ses marges et tenter la guerre des prix. En dominant le secteur des cartes graphiques depuis plusieurs générations, la firme a une certaine marge de sécurité pour définir sa grille de tarifs, même si AMD rôde toujours.

Évidemment, on ne peut pas nier que Nvidia intègre encore des marges importantes sur les produits haut de gamme ou dédiés aux professionnels, comme d’autres marques du secteur le font (coucou Apple). Mais il est exagéré de faire porter à Nvidia l’entière responsabilité de la nouvelle réalité du secteur.

Il y a la rareté des matières premières. Il y a la complexité grandissante de développer des produits toujours plus poussés technologiquement. Il y a la concurrence pour des lignes de production entre les cartes graphiques et les autres puces dédiées aux cryptomonnaies ou aux automobiles. La réalité est qu’en 2023, une carte graphique n’a jamais couté aussi cher. On peine à imaginer la situation s’améliorer dans les mois à venir, même si AMD revient au niveau et concurrence plus frontalement Nvidia. Les deux acteurs sont in fine dépendants des mêmes contraintes.


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