Comment le gouvernement veut complètement bloquer les sites illégaux

 

Un projet de loi déposé par le gouvernement et en cours d'étude au Sénat prévoit de créer des listes de blocages de noms de domaine intégrées aux navigateurs. L'objectif pour l'Etat : bloquer les sites de fraude ou de piratage.

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Les trois grands navigateurs web // Source : Frandroid

Le média TorrentFreak tire la sonnette d’alarme par rapport au Projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique. Ce dernier a été déposé au Sénat ce 27 juin et devrait bientôt être étudié : des discussions en séance publique sont prévues pour début juillet après le dépôt d’amendements. En cause : la création d’une liste de blocage de noms de domaine imposée aux navigateurs web.

Bloquer des sites Internet directement depuis les navigateurs web

L’Arcom est de plus en plus réactive dans le blocage de sites en France, en ordonnant aux FAI de supprimer l’accès à certains sites de piratage par exemple. Mais ces blocages peuvent facilement être contournés, en changeant ses DNS ou en utilisant un VPN. Pour contrer cela, le gouvernement voudrait créer des listes de blocage à destination des navigateurs web.

C’est dans de cadre là qu’existe en partie la loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique. Outre la majorité numérique à 15 ans, le gouvernement souhaite par exemple empêcher les mineurs d’accéder à des contenus pornographiques.

L’article 6 du Projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique // Source : Frandroid

C’est l’article 6 qui dispose la création d’une liste de blocage. Dans le cas où un site frauduleux est constaté, l’Arcom pourra envoyer un message aux « fournisseurs de navigateurs internet » : c’est Chrome, Firefox, Safari, Edge, etc. Des navigateurs qui devront sans délai « afficher un message avertissant l’utilisateur du risque de préjudice encouru en cas d’accès à cette adresse. » La loi prévoit que ce message devra être « clair, lisible, unique et compréhensible et permet aux utilisateurs d’accéder aux sites internet officiels du groupement d’intérêt public pour le dispositif national d’assistance aux victimes d’actes de cybermalveillance » et ce durant sept jours.

Le navigateur Microsoft Edge

L’alinéa 2 de cet article va plus loin : si le site reste frauduleux, l’Arcom pourra enjoindre aux navigateurs web « de prendre sans délai toute mesure utile destinée à empêcher l’accès à l’adresse de ce service pour une durée maximale de trois mois. » Un blocage qui pourra bien évidemment être prolongé, de six mois maximum, puis six autres mois si besoin.

À première vue, ce ne seront pas nécessairement les navigateurs qui devront effectuer le blocage : l’Arcom pourra désigner « quel fournisseur est chargé d’empêcher l’accès à l’adresse de ce service, en fonction de l’injonction émise et de la nature de la mesure envisagée. »

La peur des abus de l’État dans le blocage de sites Internet

Mozilla, la fondation éditant Firefox, s’est fendu d’un long billet de blog pour dénoncer cette mainmise du gouvernement sur les navigateurs web et les sites. Bien qu’elle rappelle « une démarche bien intentionnée », Mozilla considère ce projet de loi comme « dangereux pour lutter contre la fraude en ligne. » Mozilla va même plus loin en parlant de la création d’une « capacité technique dystopique », écrivant qu’une « telle mesure renverserait des décennies de normes établies en matière de modération des contenus et fournirait aux gouvernements autoritaires un manuel de jeu qui nierait facilement l’existence d’outils de contournement de la censure. »

Source : Mozilla Firefox

Mozilla, comme d’autres acteurs, indique que cette loi serait disproportionnée par rapport aux enjeux de lutte contre la fraude. En fait, ce n’est pas tant le gouvernement actuel qui est dénoncé, mais ses successeurs, s’ils sont autoritaires. Cela créerait un précédent qui « rendrait beaucoup plus difficile pour les navigateurs de rejeter les demandes de ce type émanant d’autres gouvernements. » La fondation se déresponsabilise de toute intervention entre les utilisateurs et les fournisseurs d’hébergement ou les fournisseurs d’accès à Internet.


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