Le prix des batteries électriques est en chute libre : quel impact pour le prix des voitures ?

 
Elles représentent entre 30 et 40 % du prix total d’une voiture électrique. Les batteries, c’est le cœur de ces autos carburant aux électrons, et pour espérer une baisse des prix de ces mêmes voitures, le coût de la batterie devra lui aussi diminuer. Et bonne nouvelle, avec la démocratisation de cette technologie, c’est effectivement le cas, mais attention, tout n’est pas gagné.

En 2024, les prix des batteries pour véhicules électriques ont connu une baisse généralisée à l’échelle mondiale. Mais derrière cette tendance se cache une réalité plutôt contrastée : la Chine a vu ses prix chuter de près de 30 %, contre une baisse plus modeste de 10 à 15 % en Europe et aux États-Unis.

Ce décrochage renforce bien évidemment la domination chinoise dans le secteur des batteries et pose des questions sur la compétitivité à long terme des industries occidentales.

Un écosystème chinois hyper compétitif

La chute rapide des coûts en Chine n’est pas le fruit du hasard. Elle résulte d’un environnement industriel marqué par une compétition féroce entre les fabricants locaux.

Cette pression sur les marges et cette guerre des prix ont contraint les entreprises à innover pour survivre, dopant l’efficacité en termes de productions, améliorant les rendements, et renforçant l’intégration verticale des chaînes d’approvisionnement. C’est bien simple, pratiquement toutes les innovations en termes de batteries pour les voitures électriques proviennent de Chine.

Pour couronner le tout, la Chine bénéficie également d’un réservoir important de main-d’œuvre qualifiée, permettant une montée en compétence rapide de ses capacités de production.

Ce modèle, très performant pour inonder le marché mondial sous pression du législateur dont le principal objectif est de réduire l’empreinte carbine, a un revers : une rentabilité souvent faible pour les fabricants, parfois même insoutenable à long terme.

Certains fabricants s’en sortent mieux que d’autres, à commencer par CATL, le leader mondial dans ce domaine, ou encore BYD, mais le marché chinois fonctionne aujourd’hui à la frontière de la viabilité économique. Certains fournisseurs n’y survivront d’ailleurs pas, surtout quand le gouvernement chinois stoppera ses perfusions économiques.

Reste que cette stratégie offensive permet à la Chine de livrer les batteries les moins chères au monde, donnant à ses véhicules électriques un avantage concurrentiel majeur à l’exportation, même en Europe où, pourtant, les voitures électriques produites en Chine et importées sont soumis à une surtaxe douanière d’environ 20 % (et même jusqu’à quasiment 40 % pour MG).

La chimie des batteries comme facteur de différenciation

L’une des explications de ces écarts de prix réside dans le choix de la chimie des batteries. En Chine, les batteries LFP (lithium-fer-phosphate) dominent. La Chine étant le plus grand exportateur de batteries pour voitures électrique dans le monde, c’est évidemment cette chimie qui domine aussi.

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Moins chères de près de 30 % par kWh que leurs équivalents NMC (nickel-manganèse-cobalt), elles offrent désormais des performances jugées suffisantes pour la majorité des usages. Malgré une densité énergétique inférieure (jusqu’à 30 % de moins), les LFP compensent par leur robustesse, leur coût réduit, et leur capacité à atteindre une charge complète sans dégradation prématurée.

En revanche, les batteries NMC, toujours privilégiées en Europe et aux États-Unis, gardent l’avantage sur l’autonomie et la performance par temps froid. Mais à mesure que l’efficacité des LFP s’améliore, leur adoption pourrait s’accélérer en dehors de la Chine, les constructeurs y voyant ainsi un bon moyen de faire baisser le prix de leurs voitures électriques, en y intégrant des batteries moins chères et tout aussi performantes.

Les prix chutent, mais est-ce vraiment une bonne nouvelle pour tout le monde ?

D’après une étude réalisée par l’Agence Internationale de l’Énergie, les batteries lithium-ion ont enregistré une chute des prix de 20 %, soit la plus forte baisse enregistrée depuis 2017.

Mais derrière cette évolution apparemment favorable aux clients et aux constructeurs de véhicules électriques, se cache pourtant une réalité plus complexe et des risques à long terme pour la chaîne d’approvisionnement mondiale.

La baisse du prix des batteries au kWh

Cette baisse des coûts s’explique principalement par deux facteurs : d’une part, la chute des prix des métaux critiques, notamment le lithium, et d’autre part, la pression croissante sur les marges des fabricants de batteries, notamment en Chine. Le prix du lithium a ainsi reculé de près de 20 % en 2024, atteignant des niveaux similaires à ceux de 2015, alors même que la demande a été multipliée par six sur la même période.

À court terme, cette situation semble favorable : les batteries coûtent moins cher, rendant les véhicules électriques plus accessibles, ce qui accélère la transition énergétique. Quel est le problème donc ?

Dans les faits, cette dynamique cache une réalité moins réjouissante : l’excédent d’offre, bien qu’il tire les prix vers le bas, met en péril la viabilité économique de nombreux fabricants, mais aussi certains exploitants miniers. Certaines entreprises peinent désormais à rester compétitives, renforçant la concentration du marché autour de quelques grands acteurs, accentuant les vulnérabilités géopolitiques et économiques.

Un risque de retournement à l’horizon 2030

Cette pression sur les prix pourrait à terme décourager les investissements dans l’exploration et l’extraction de nouveaux gisements. Or, si la demande de lithium et de nickel continue de croître au rythme actuel, un déséquilibre pourrait émerger d’ici la fin de la décennie. Le spectre d’une pénurie plane d’ailleurs sur l’horizon 2030 d’après plusieurs experts.

Une telle situation provoquerait mécaniquement une remontée des prix, avec des effets en chaîne sur l’ensemble du secteur : augmentation des coûts pour les fabricants de batteries et de véhicules électriques, ralentissement potentiel de l’électrification, et répercussions négatives pour les clients finaux.

Le secteur du recyclage, souvent présenté comme une solution d’avenir, ne pourra pas jouer un rôle vraiment impactant avant une dizaine d’années, en raison de volumes de matières recyclables encore insuffisants. Quant aux solutions technologiques – comme les batteries sodium-ion ou l’extraction directe du lithium – elles sont prometteuses mais encore loin d’un déploiement industriel de masse.


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