J’ai testé le Vegas Loop d’Elon Musk : pourquoi j’ai été déçu par le métro de Tesla

 

À Las Vegas, Elon Musk et son entreprise Boring Company ont creusé un tunnel sous la ville : le Vegas Loop. Un genre de prémices au fameux projet Hyperloop. L’idée : pouvoir traverser une partie de la ville sous terre, dans des Tesla autonomes, à haute vitesse, pour éviter les embouteillages. La réalité ? Décevante, et je vous explique pourquoi avec mon expérience sur place.

Montage d’une photo représentant le Vegas Loop (ajout de terre et du panneau Tesla)

Vous avez sûrement dû déjà entendu parler du fameux projet Hyperloop porté par Elon Musk et de nombreuses autres entreprises comme Virgin ou encore la SNCF. L’idée va encore plus loin que le Vegas Loop que nous avons essayé. Il s’agit de transporter des passagers de manière sous-terraine, à une vitesse de plus de 1 000 km/h, dans des capsules autonomes, grâce à la sustentation électromagnétique dans des tunnels sous vide d’air.

L’objectif est de relier les grandes capitales entre elles de manière plus rapide qu’un TGV ou qu’un avion de ligne ! Par exemple, se rendre à San Francisco depuis Los Angeles ne prendrait que 30 minutes, contre environ 6 heures en voiture, en consommant jusqu’à 10 fois moins d’énergie qu’un avion.

Virgin Hyperloop One

Avec Hyperloop, Elon Musk veut révolutionner le transport en commun, et a rendu le brevet public en 2013. Mais pour y arriver, le milliardaire s’est rendu compte qu’il fallait aussi révolutionner la création des tunnels nécessaires à l’Hyperloop. C’est comme ça qu’est née la Boring Company : une entreprise dont la spécialité est de créer des tunneliers (la machine), mais aussi de creuser des tunnels et de les exploiter. Comme à Las Vegas avec le Vegas Loop.

Test en vidéo

Loop versus Hyperloop : rien à voir, ou presque

On est donc loin de la révolution promise par l’Hyperloop (qui, de toute manière, semble abandonné). Mais on a le droit à un avant-goût, que la Boring Company appelle « Loop », sans le préfixe Hyper. On a donc le même tunnel… mais pas du tout le même mode de transport. L’idée est d’utiliser, à terme, des Tesla électriques, en mode conduite autonome, c’est-à-dire sans chauffeur, à une vitesse maximale de 240 km/h.

Puisqu’il n’y a pas d’obstacles dans un tunnel, on pourrait se dire que c’est assez simple. Surtout quand on sait que Tesla propose un mode de conduite totalement autonome aux États-Unis, le fameux FSD (pour Full Self-Driving), que nous avons pu essayer.

Mais, dans la pratique, c’est une autre partition qui est jouée. Et c’est ce que nous avons pu vivre lors de nos différentes expériences du Vegas Loop en janvier 2024. Pour le moment, le tunnel est assez court, et dessert principalement les différentes entrées de l’immense convention center (où a lieu une partie du CES) ainsi qu’un hôtel. Nous l’avons donc emprunté à plusieurs reprises pour nous rendre d’un lieu à l’autre sur le CES.

Un chauffeur, mais quel chauffeur ?

À cette occasion, les voyages étaient gratuits. En temps normal, il faut payer cinq dollars par trajet. Chaque trajet est ultra-rapide : comptez environ 1 minute entre chaque station. Un peu comme un métro parisien… sauf qu’ici, la voiture ne marque pas d’arrêt à chaque station : vous indiquez au chauffeur votre destination, et il vous y amène. À une vitesse maximale de 30 MPH, soit environ 48 km/h. Pas très rapide !

Ah oui, vous êtes étonnés par la présence d’un chauffeur ? Moi aussi. Ils n’ont pas le droit d’utiliser les fonctions de conduites semi-autonomes (régulateur de vitesse adaptatif ou maintien dans la voie), et doivent donc conduire des voitures toute la journée, dans un tunnel étroit qui ne laisse pas vraiment la place à l’erreur de jugement.

Elon Musk promet que les voitures deviendront autonomes dans les mois à venir, et on ne comprend pas pourquoi cela n’a pas été fait plus tôt. Tout le monde y gagnerait : des trajets potentiellement plus rapides (avec une meilleure gestion du flux), moins de pénibilité pour les chauffeurs (il faudrait uniquement surveiller la conduite de la voiture) et un coût inférieur (dans le cas où la présence de chauffeurs ne serait plus requise).

Google réussi bien à le faire à San Francisco, dans les rues bondées de la ville comme l’ont pu tester nos collègues de Numerama. Alors pourquoi pas Tesla dans des tunnels pensés pour cet usage bien précis ?

Des embouteillages qui pourraient être évités

Aux heures de pointes, on sent d’ailleurs que cette idée de voitures dans un tunnel n’est pas forcément la meilleure. Pourquoi ? Tout simplement parce que les bouchons qu’Elon Musk veut éviter avec la Boring Company se créent au sein de ses tunnels.

Et oui, il nous est arrivé à plusieurs reprises de devoir attendre quelques dizaines de secondes que les places en station se libèrent pour que notre chauffeur puisse se garer et nous faire descendre de la voiture. Avant de récupérer d’autres passagers qui attendaient sur le quai pour se rendre à une autre station.

On voit là encore que les voitures ne sont pas réellement adaptées à ce genre de situation : les portières ne s’ouvrent pas en grand contrairement à un bus, l’habitacle est étriqué, rendant l’action de s’installer bien plus longues que l’entrée dans un métro par exemple. On a vu des Model 3, Model Y, mais aussi un gros Model X, avec un accessoire sur le crochet d’attelage permettant de transporter un fauteuil roulant par exemple. Le problème, c’est que les fameuses portes Falcon Wing mettent un peu de temps à s’ouvrir et se fermer. Empirant alors le temps d’attente dans les bouchons pour les autres usagers du service.

Un avant-goût de l’Hyperloop

Au final, il s’agit d’une démonstration technologique permettant de mettre en avant la Boring Company, en attendant que les tunneliers ne tournent à plein régime pour construire des Hyperloop à travers la planète. Mais est-ce que cela arrivera vraiment ?

On espère, mais on a un léger doute. Hyperloop One, le projet Hyperloop de Virgin vient tout juste d’être abandonné. Il reste encore plusieurs entreprises qui travaillent sur des projets, mais ils sont encore à l’état théorique. En Europe, le passage à la pratique devrait être réalisé en mars 2024, aux Pays-Bas, avec un démonstrateur fonctionnel sur 400 mètres de long seulement : le Hardt Hyperloop.

Alors oui, le Vegas Loop, c’est mieux qu’un trajet en voiture sur le fameux Las Vegas Strip embouteillé. Mais est-ce réellement mieux qu’un même trajet effectué dans un transport en commun plus conventionnel, type métro ou tramway aérien (qui existe déjà à Las Vegas) ? Pas sûr, non. Du moins, pas pour le moment, avec des voitures qui ne sont pas autonomes et dont la forme de l’habitacle est peu adapté au transport de personnes.

Mais le projet est loin d’être terminé. À terme, tous les hôtels du Strip seront desservi par le Vegas Loop, avec 81 stations différentes, permettant d’exploiter deux tunnels (un par sens) d’une longueur totale de plus de 100 km, et 90 000 passagers par heure attendus. Avec le futur et hypothétique Robotaxi autonome de Tesla, ça aurait déjà beaucoup plus de sens.


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