L’autonomie est sans aucun doute la caractéristique d’une voiture électrique qui fait le plus parler d’elle. Annoncer un véhicule ayant une autonomie suffisante pour que les grands voyages paraissent possibles est primordial, et les constructeurs l’ont bien compris.
Nous avons déjà exposé les différents véhicules se targuant d’avoir l’autonomie la plus importante, mais nous allons aujourd’hui nous concentrer sur différents modèles qui indiquent environ 400 kilomètres d’autonomie sur cycle WLTP, et voir ce que cela veut dire en conditions réelles.
Au quotidien, nous verrons que l’autonomie annoncée n’a que peu d’importance, à condition de pouvoir recharger fréquemment. Ainsi, lors de grands voyages, deux véhicules affichant la même autonomie pourront, finalement, avoir de grandes différences au niveau du temps total de trajet. Nous l’avons récemment vu avec le classement des voitures électriques les plus rapides sur longs trajets.
En effet, outre l’autonomie, d’autres facteurs apparaissent bien plus déterminants lorsque l’on voyage en voiture électrique : la vitesse de charge et la consommation notamment. Sans plus attendre, voyons ce qui se cache vraiment derrière une autonomie indiquée par les constructeurs automobiles.
WLTP vs. Réalité
Nous sommes déjà revenus en détail sur la manière dont était conduite l’homologation WLTP d’un véhicule électrique, et comme vous vous en doutez, cela ne représente quasiment jamais des conditions réelles. La distance totale parcourue au moment du cycle d’homologation est de 23,2 km, à une vitesse moyenne de 46,5 km/h, bien loin de nos grands trajets autoroutiers en France.
La vitesse de déplacement étant un facteur influant énormément sur la consommation d’une voiture électrique, une chose est certaine : atteindre l’autonomie WLTP annoncée est impossible sur autoroute à 130 km/h. Pour avoir une idée grossière de l’autonomie réelle à vitesse autoroutière, il est bon de garder environ 60 à 70 % de l’autonomie WLTP. Ainsi, une voiture annoncée avec 500 kilomètres d’autonomie WLTP est ainsi approximativement capable de parcourir entre 300 et 350 kilomètres d’autoroute à 130 km/h.
Dans la vie de tous les jours, des véhicules électriques ayant vocation à être le premier véhicule du foyer ont cependant un fort intérêt à avoir des autonomies conséquentes en cycle WLTP, quitte à ce que cela ne représente pas la réalité (à moins d’avoir une utilisation de son véhicule proche de la norme WLTP, c’est-à-dire à dominante urbaine et avec un style de conduite très « éco »), ne serait-ce que pour des raisons psychologiques lors de l’achat. En effet, il est peu probable qu’un foyer considère un véhicule affichant 250 kilomètres d’autonomie WLTP par rapport à un autre indiquant 400 kilomètres d’autonomie.
Toutefois, au quotidien, avec une moyenne d’approximativement 30 kilomètres parcourus par jour par les Français, un véhicule ayant une petite autonomie peut être amplement suffisant. La condition est bien entendu de pouvoir le recharger fréquemment, à domicile ou ailleurs.
De plus en plus de véhicules sont aujourd’hui proposés avec près de 400 kilomètres d’autonomie WLTP affichés, des citadines aux SUV en passant par les berlines électriques, mais en pratique, est-ce que toutes ces voitures se valent en grands trajets ? Nous allons voir que l’un des facteurs les plus importants est à chercher ailleurs qu’au niveau de l’autonomie affichée.
La vitesse de charge : le nerf de la guerre ?
Vous l’aurez compris, comparer les grands trajets de deux véhicules offrant la même autonomie peut aboutir à des résultats bien différents selon leur puissance de recharge. Nous avons une série de dossiers spécifiquement sur ce sujet, visant à classer les véhicules rechargeant le plus vite, pour tenter de déceler ceux qui sortent du lot. Mais une composante primordiale reste à considérer lorsque l’on souhaite arriver le plus rapidement possible à destination : la consommation.
En effet, comme nous le montrons dans notre série relative aux grands trajets de référence avec différentes voitures électriques, celles qui arrivent le plus rapidement possible ne sont pas toujours celles qui chargent le plus vite. Deux véhicules ayant la même autonomie WLTP, la même puissance de charge maximale, mais une consommation différente n’ont pas les mêmes durées totales de trajet sur un parcours similaire.
Il n’y a malheureusement pas de mesure parfaite permettant en un clin d’œil de déceler quel véhicule électrique permet de voyager plus rapidement qu’un autre sur longues distances, mais il faut bien comparer tous les chiffres disponibles pour savoir à quoi s’attendre. Le plus difficile est de réussir à connaître la consommation autoroutière d’un modèle donné. La consommation est toujours annoncée sur cycle mixte, correspondant plutôt à une utilisation périurbaine.
Le mieux est donc d’utiliser des applications comme Chargemap ou ABRP et simuler des trajets autoroutiers pour connaître la consommation, la vitesse de charge et donc la durée d’un long voyage en voiture électrique. C’est ce que nous allons faire plus bas.
Afin de mettre en exergue les différences entre plusieurs voitures électriques ayant une autonomie WLTP comparable, nous allons prendre l’exemple de la Renault Zoé actuelle, de la Tesla Model 3 Autonomie Standard Plus de 2020 et de la Hyundai Ioniq 5 d’entrée de gamme, en plus de deux configurations de la MG4.
La Française affiche une autonomie WLTP de 395 kilomètres, et la charge rapide (en option à 50 kW) est bien présente sur nos simulations de trajets. De l’autre côté, la Hyundai Ioniq 5 en entrée de gamme avec sa batterie de 58 kWh offre une autonomie légèrement en deçà, de 384 kilomètres, mais fait partie des championnes de la charge rapide (18 minutes pour passer de 10 à 80 % grâce à une architecture 800 volts). La Tesla Model 3 Autonomie Standard Plus de son côté affichait à l’époque une autonomie de 409 kilomètres et une puissance maximale de charge de 170 kW.
La MG4 standard affichée avec avec une autonomie de 350 kilomètres en cycle WLTP a une puissance de recharge maximale de 88 kW. Sa grande sœur quant à elle, avec sa batterie de 77 kWh, a une autonomie de 520 kilomètres et une puissance de charge maximale de 144 kW.
Grâce à cet exemple pratique, nous verrons qu’en pratique, deux véhicules ayant une autonomie comparable peuvent proposer une expérience de voyage drastiquement différente.
La démonstration par l’exemple
À l’aide de l’excellent A Better Route Planner que l’on ne présente plus, nous avons décidé de considérer un parcours de référence : près de 800 kilomètres entre Paris et Marseille. Les paramètres par défaut pour les trois véhicules sont renseignés, avec un départ à 90 % et une arrivée à 10 % dans le cas de la Renault Zoe comme de la Hyundai Ioniq 5, de la Tesla Model 3 Autonomie Standard Plus et des deux configurations de MG4.
Hyundai Ioniq 5 : un trajet rapide
Il faut 4 recharges pour arriver à bout du trajet en Hyundai Ioniq 5 d’entrée de gamme, et sa batterie d’une capacité de 58 kWh, dont la charge la plus longue ne dure que 20 minutes. Au total, le temps de trajet est de 7 heures et 49 minutes, pour 1 heure et 13 minutes de charge. En naviguant entre les différents réseaux de recharge disponibles (Totalenergies, Superchargeurs Tesla, Engie ou encore Ionity), ce trajet s’effectue a priori sans encombre.
Renault Zoe : une charge très lente, mais acceptable
Avec la Renault Zoe offrant une autonomie supérieure sur le papier, malgré sa plus petite batterie de 52 kWh, il faut cinq arrêts pour arriver à destination. Mais bien qu’elle offre une charge « rapide », la Française est bien loin de recharger aussi rapidement que la Hyundai Ioniq 5. En effet, il faut compter pas moins de 3 heures et 25 minutes de charge au total sur le trajet, soit plus de deux heures de plus qu’en Ioniq 5 !
Le temps total de trajet est alors porté à 10 heures et 31 minutes, ce qui fait de ce voyage un vrai périple. En outre, nous remarquons que la charge la moins longue est de 31 minutes en Renault Zoe contre 47 minutes pour la plus longue.
Le même trajet il y a 18 mois obligeait à s’arrêter plus d’une heure systématiquement. Aujourd’hui, grâce au maillage du réseau autoroutier, les grands trajets en Zoé sont bien plus simples.
Tesla Model 3 Standard Plus : une petite batterie bien capable
En Tesla Model 3 Autonomie Standard Plus, le même trajet est abattu en 8 heures et 16 minutes, dont 1h et 22 minutes de charge seulement. Quatre charges sont nécessaires à la Tesla de 2020 dotée d’une batterie de 50 kWh. La charge la plus longue dure 26 minutes et la plus rapide 14 minutes.
La situation entre la Tesla et la Hyundai — qui n’ont qu’une dizaine de minutes de recharge d’écart —s’explique très facilement par la consommation inférieure de la voiture américaine sur autoroute comparée à la Coréenne, qui réussit à tirer son épingle du jeu grâce à sa vitesse de recharge plus élevée. Ainsi, la Model 3 est donnée pour une consommation WLTP de 14,9 kWh / 100 km contre 16,7 kWh / 100 km pour la Ioniq 5. La Renault Zoé affiche quant à elle une consommation de 17,4 kWh / 100 km sur cycle mixte.
MG4 Standard
Celle qui peut être considérée comme la référence en rapport prix/prestations à l’heure actuelle a besoin de 5 recharges pour venir à bout de ce Paris-Marseille.
Au total, 2 heures et 9 minutes de charge suffisent, avec la charge la moins longue qui est de 19 minutes, et la plus longue de 34 minutes. Le temps total de trajet est de 8 heures et 49 minutes, soit 1 heure de plus que la Hyundai Ioniq 5.
MG4 Grande Autonomie : mieux qu’une Tesla dans certains cas
La MG4 Grande autonomie a une batterie de 77 kWh, et parvient à gagner 40 minutes de charge par rapport à l’entrée de gamme. Il y a toujours besoin de 5 recharges pour arriver à Marseille, mais le temps total de charge est de 1 heure et 29 minutes seulement.
Le trajet est bouclé en 8 heures et 10 minutes. Ce n’est pas étonnant, avec une batterie 50 % plus grande que celle de la Tesla Model 3 Autonomie Standard Plus par exemple.
Cependant, on remarque que le gain n’est que de 9 petites minutes face à la Tesla Model 3, ce qui prouve qu’il vaut mieux regarder les chiffres de consommation WLTP plutôt que l’autonomie WLTP. Évidemment, nous avons sciemment choisi ces véhicules pour arriver à un résultat qui varie grandement. Le but était bel et bien de montrer que l’autonomie affichée n’était pas nécessairement significative, surtout lorsque l’on souhaite parcourir de longues distances.
Modèle Autonomie WLTP Puissance de charge maximale Durée totale du trajet Renault Zoe (2019) 395 km 50 kW 10 h 31 min Hyundai Ioniq 5 (2021) 384 km 175 kW 7 h 49 min Tesla Model 3 Autonomie Standard Plus (2020) 409 km 170 kW 8 h 16 min MG4 Standard 350 km 88 kW 8 h 49 min MG4 Autonomie Étendue 520 km 144 kW 8 h 10 min
Conclusion
Ainsi, si la norme WLTP est là pour comparer les autonomies des véhicules et tenter d’en faire un classement, il faut garder à l’esprit qu’elle ne reflète pas obligatoirement la réalité. Outre le fait que le protocole de test soit effectué à vitesse peu élevée, deux véhicules ayant une autonomie similaire peuvent présenter un comportement très différent en grands trajets.
Dans la mesure du possible, nous essayons lors de nos essais de partager les consommations que nous avons relevées, pour vous aider à mesurer l’autonomie réelle des véhicules. Bien entendu, nos simulations de longs trajets sont également une bonne ressource pour voir où se situe un véhicule lorsque l’on dépasse son autonomie annoncée par rapport à d’autres.
Dans tous les cas, essayez de garder à l’esprit que l’autonomie annoncée n’est pertinente que dans peu de cas réels, mais qu’elle donne une petite idée des capacités du véhicule tout de même. En pratique, de grands voyages comme celui exposé ci-dessus permettent de s’apercevoir de l’intérêt d’une charge vraiment rapide et d’une consommation contenue plutôt que d’une autonomie supérieure.
Pour résumer, plutôt que l’autonomie WLTP, lors de l’achat d’une voiture électrique, il vaut mieux regarder du côté de la consommation WLTP et de la puissance de charge. Attention sur ce dernier point puisque les constructeurs communiquent la puissance maximale (rarement atteinte en pratique) et non pas la puissance moyenne, qui diffère grandement selon les véhicules et leur courbe de recharge comme expliqué lors d’un précédent dossier. Le mieux est encore de se référer au temps nécessaire pour passer de 10 à 80 % d’autonomie.
Enfin, pour ne pas avoir de surprises et acquérir un véhicule qui ne correspondrait pas à vos attentes, n’hésitez pas à consulter notre dossier sur la planification des grands trajets en voiture électrique, qui vous permet d’y voir plus clair sur les facteurs à prendre en compte au moment de l’achat.
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