Voiture électrique : on a essayé la « recharge » des batteries en cinq minutes, et c’est bluffant

Avec une Power Swap Station et la Nio ET7

 

À l'occasion de l'essai de la voiture électrique Nio ET7, nous avons pu essayer le système d'échange de batteries (Nio Power Swap Station) qui permet de "recharger" ces dernières en cinq minutes. Le résultat est bluffant, on vous montre comment ça marche !

Nous avons été invités par le constructeur chinois Nio à venir essayer sa toute nouvelle voiture électrique, la luxueuse berline Nio ET7. L’essai a été réalisé en Allemagne, en banlieue de Berlin, lors d’un évènement qui a également officialisé les Nio ET5 et Nio EL7 en Europe. À cette occasion, nous avons eu la chance de tester les stations d’échange de batterie de la marque baptisées Nio Power Swap Station en interne, mais aussi d’essayer la Nio ET7 dans un article dédié.

Si vous ne connaissez pas le principe, il s’agit d’une nouvelle manière de « recharger » les batteries d’une voiture électrique, très en vogue en Chine. L’idée est très simple sur le papier : au lieu d’utiliser une borne de charge pour recharger la batterie, celle-ci est échangée contre une batterie « pleine ». Enfin presque, puisque le taux de charge ne dépasse pas 90 % afin d’augmenter la durée de vie de la batterie.

Si cela peut paraître simple en théorie, c’est dans la pratique beaucoup plus compliqué pour le constructeur qui a été obligé de standardiser toutes ses batteries pour qu’elles aient la même taille. Ainsi, la Nio ET7 est proposée avec trois batteries différentes (75, 100 et bientôt 150 kWh) qui ont exactement la même taille. Elles sont en plus compatibles avec les autres véhicules de la marque : ET5, EL7, ES6 et ES8.

Nous avons pu assister à l’échange de batterie d’une Nio ET7 sur la station de Berlin, flambant neuve. Il faut savoir qu’il en existe actuellement six en Europe (trois en Allemagne et trois en Norvège), mais plus de 1 160 en Chine. L’objectif est d’en compter 4 000 d’ici 2025, dont 500 en Europe et 500 aux États-Unis.

Cinq minutes pour « recharger » sa voiture, c’est possible

À l’usage, il suffit de réserver une place depuis l’écran de la voiture avant d’arriver à la station. Il est aussi possible de savoir s’il y a déjà des conducteurs en liste d’attente. À l’arrivée, la voiture propose de réaliser la manœuvre de stationnement elle-même. En pratique, on préfèrera peut-être la faire soi-même pour gagner un peu de temps puisque si le stationnement automatique est parfait, il prend un peu plus de temps qu’avec un conducteur expérimenté au volant.

Une fois que la voiture est correctement stationnée (si ce n’est pas le cas, un mécanisme intégré à la station vient repositionner légèrement et parfaitement l’auto), l’échange de batterie se lance. La procédure dure cinq minutes : un bras robotisé vient dévisser et retirer la batterie de la voiture pour la ranger, avant de venir en insérer une autre, pleine à 90 %.

Si jamais un client arrive à une station de recharge où aucune batterie n’est rechargée au maximum, il a le choix d’en prendre une qui n’est pas encore à 90 %.

Durant la procédure, la voiture s’éteint et n’est plus du tout alimentée électriquement. Il faut donc attendre quelques minutes sans ventilation ni système de divertissement. Heureusement, la voiture est à l’abri des intempéries lors de la procédure. Une fois celle-ci terminée, la voiture se redémarre automatiquement et le conducteur peut directement repartir.

Les batteries rechargées à basse vitesse

La batterie déchargée est ensuite rechargée au sein de la station de recharge à une puissance maximale de 80 kW. Ce qui permet de ne pas trop fatiguer la batterie et d’éviter un pic de consommation trop élevée sur le réseau. Chaque station est limitée à une puissance instantanée de 500 kW sur le réseau pour charger les différentes batteries de la station simultanément.

Parfois, Nio intègre des chargeurs rapides (de 500 kW) autour de la station d’échange de batterie. Dans ce cas, les chargeurs peuvent utiliser l’énergie stockée dans les batteries en attente et qui peuvent représenter plus de 1 000 kWh d’énergie. De quoi réduire l’impact sur le réseau, puis profiter des heures creuses pour recharger les batteries.

La station de recharge peut accueillir 13 batteries simultanément, mais Nio précise que chaque station en dispose de 10 en moyenne. Ce qui signifie que le constructeur chinois dispose d’environ 11 600 batteries « en attente » sur une flotte de plus de 250 000 voitures électriques.

Le prix de cette « recharge »

Les échanges (swap en anglais) des batteries sont gratuits (à hauteur de deux par mois) en cas de location de la batterie. Dans ce cas, la marque offre également 200 kWh de recharge par mois sur les stations de recharge rapide. Des avantages qui ne sont pas reportables d’un mois sur l’autre.

Au-delà, Nio facture 10 euros chaque swap, auquel il faut ajouter l’énergie « consommée », à hauteur de 20 centimes d’euros le kWh. Ce qui signifie que si vous échangez une batterie 100 kWh déchargée à 50 % pour une autre chargée à 90 %, vous aurez « consommé » 40 kWh.

En Chine, il y a toujours un personnel Nio présent dans la station d’échange pour proposer des services au conducteur, comme par exemple le nettoyage de la voiture. En Europe, l’objectif est de ne pas avoir de personnel présent à la station, sauf pour les premiers temps afin de faire de la pédagogie. En effet, l’un des techniciens nous a ainsi avoué qu’en Norvège, des Tesla ont essayé de profiter de la Power Swap Station alors qu’elles sont bien évidemment incompatibles.

Laisser au client le choix de sa batterie

Outre une recharge ultra rapide, l’autre avantage des stations d’échange de batterie de Nio est la possibilité de moduler la capacité de sa batterie selon ses besoins. Vous avez la batterie de 75 kWh et prévoyez de faire un long trajet ? Vous pouvez alors changer pour la future batterie de 150 kWh.

Nous ne savons toutefois pas comment cela se traduit dans les faits, en termes de facturation, car la batterie de 100 kWh coûte bien plus cher à la location que son homologue de 75 kWh. Nous avons posé la question à Nio qui doit revenir vers nous à ce sujet.

Une batterie jamais dépassée technologiquement

L’autre argument de Nio en faveur de son système d’échange, c’est l’impossibilité de se retrouver avec une batterie dépassée technologiquement. En effet, lorsque la future batterie de 150 kWh sera disponible au cours du premier trimestre 2023, les acheteurs actuels pourront la récupérer dans une station d’échange.

Cela a déjà eu lieu dans le passé, avec la Nio ES8 en 70 kWh qui est passée sur une batterie de 75 kWh. Et puisque toutes les batteries ont le même format, il est possible de les interchanger entre elles.

Une solution coûteuse et contraignante

Il faudra toutefois voir sur le long terme si cette fonctionnalité ne sera pas perçue comme une contrainte par l’entreprise. En effet, cette dernière ne peut pas changer la forme de ses futures batteries sans les rendre incompatibles avec les modèles déjà commercialisés.

Et c’est sans compter sur les coûts de ce business model qui impose au constructeur d’être propriétaire de nombreuses batteries et d’implanter un peu partout dans le monde des stations de charge. Avec un tarif unitaire de l’ordre de 400 000 euros selon certaines estimations. On est loin des 40 000 dollars par Superchargeur Tesla au Texas selon Bloomberg.

L’autre problématique réside dans l’absence de standard qui empêche les batteries Nio et les stations d’échange d’être compatible avec d’autres marques de voitures électriques. Le constructeur chinois nous a néanmoins annoncé être en discussion avec d’autres constructeurs automobiles qui pourraient lancer des voitures compatibles avec le réseau d’échange de Nio. Un prototype roulant aurait même été créé par un autre constructeur pour tester cette fonctionnalité.

La firme originaire d’Hefei en Chine n’est plus toute seule sur cette activité. En effet, le géant chinois CATL dispose de son réseau Evogo qu’il souhaiterait importer en Europe. Un troisième concurrent vient d’annoncer l’arrivée prochaine d’une solution similaire : c’est SAIC, la maison mère de MG. Et justement, la nouvelle MG4 est basée sur une plateforme compatible avec l’échange de batteries.

La guerre entre la charge rapide d’un côté, et l’échange de batterie de l’autre ne fait que commencer. À moins que les deux solutions ne soient complémentaires entre elles. Seul l’avenir nous le dira, en espérant que les constructeurs réussissent à trouver un standard. À moins que celui-ci ne soit imposé par les organismes de régulation.


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