C’est un sujet qu’on aime traiter sur Frandroid : oui, une voiture électrique est plus propre qu’une voiture thermique sur son cycle de vie. Certes, l’extraction des matières nécessaires à la fabrication de la batterie pollue. Pourtant, les chiffres sont là, avec une « bascule » à 45 000 km et un bilan carbone total inférieur de 45 % par rapport à un équivalent thermique sur un cycle de vie complet.
Un bilan qui ne peut que s’arranger avec une électricité propre. Certains réseaux de recharge se sont ainsi positionnés sur ce créneau, comme Dream Energy, qui s’avère également producteur d’électricité renouvelable à partir de centrales hydroélectriques ou photovoltaïques en France. Nous sommes partis à leur découverte.
De la source…
Fournisseur et producteur
Dream Energy, donc. Fondée en 2007 en tant que filiale d’Artea, un holding immobilier, la société est à l’origine un bureau d’étude environnemental chargé de créer des bâtiments les moins énergivores possibles. En parallèle, elle développe une activité de production et de fourniture d’électricité renouvelable, d’origine hydraulique et photovoltaïque.
Pour l’hydraulique, l’idée est d’acheter des centrales déjà existantes un peu partout en France et de les retaper quasi uniquement en interne (seules les turbines sont achetées à l’extérieur). Des travaux qui permettent de posséder aujourd’hui 20 centrales hydroélectriques et 50 centrales photovoltaïques. Production annuelle ? Plus de 50 GWh (de quoi recharger 1 million de batteries d’une capacité de 50 kWh), et en expansion continue.
L’idée : pouvoir avoir la main sur l’ensemble du processus de la fourniture d’électricité, tout en pouvant se targuer d’offrir une électricité produite en France, avec un bilan carbone extrêmement bas. D’après l’ADEME, il faut ainsi compter 6 gCO2eq/kWh pour l’hydraulique et 38 gCO2eq/kWh pour le solaire (à cause de la fabrication des panneaux). À comparer aux 250, voire 300 gCO2eq/kWh de l’essence. Ça, c’est pour la pratique, passons à la théorie.
L’exemple de Baccarat
Nous avons donc rendez-vous à Baccarat, pas loin de Nancy. Une ville connue pour son cristal (et les finitions haut de gamme des Renault des années 90, mais ce n’est pas le sujet), et qui nous intéresse aujourd’hui pour… sa centrale hydroélectrique.
« La centrale a été construite pour alimenter l’usine de cristal en 1927 », nous explique Baptiste Roy, responsable de la production et de la fourniture d’énergie, « mais Dream Energy l’a rachetée en 2021 ».
Une installation qui rentre dans la catégorie « petite centrale », avec une production annuelle d’environ 2,3 GWh/an. De quoi tout de même de parcourir environ 13 millions de kilomètres dans une voiture électrique standard, type Tesla Model 3 !
La station en elle-même est composée de deux turbines Kaplan d’une puissance de 300 kW chacune, qui tournent grâce au courant de la Meurthe qui passe juste devant. En amont, un système de vannes et de clapets permettent de réguler le niveau de l’eau pour arriver à une production optimale tout en respectant les (nombreuses) normes environnementales.
Que fait la concurrence ?
Certes, d’autres opérateurs de bornes de recharge (comme Ionity) affichent également cette promesse d’une énergie renouvelable, mais la plupart ne font qu’acheter de l’électricité renouvelable en Europe sans en produire, selon la formule « j’achète autant d’énergie verte que ce que je consomme » sous forme de crédits CO2. Un marché assez opaque, qui peut parfois occasionner des dérives — comme financer de manière indirecte les énergies fossiles.
D’autres systèmes sont par ailleurs en cours de déploiement à l’étranger. On pense ici à Tesla et Nio, qui se targuent de devenir, eux aussi, producteurs d’énergies renouvelables grâce à leurs batteries via la smart grid et les centrales électriques virtuelles.
Si Tesla utilise le duo « tuiles solaires – batteries stationnaires (via son Powerwall) » pour produire de l’énergie et pouvoir, si besoin, en réinjecter dans le réseau, Nio utilise quant à lui ses stations d’échanges de batteries pour stocker et fournir de l’électricité. À noter que Tesla va encore un cran plus loin, puisqu’il est devenu également fournisseur d’électricité au Texas et au Japon.
Quand bien même Dream Energy ne peut évidemment pas promettre que les électrons qu’elle produit terminera au bout de la prise qu’elle a installée, sa casquette de producteur d’énergie renouvelable permet d’avoir une sorte de « traçabilité » et d’assurer une production française. Les prises, tiens.
… à la voiture
Un réseau en expansion
Petit retour en arrière en 2021, où la décision est actée : Dream Energy se lance dans la recharge rapide de voitures électriques. L’entreprise fournissait déjà depuis plusieurs années les parcs d’activités d’Artea en bornes lentes (jusqu’à 22 kW en courant alternatif), mais la tentation d’explorer le merveilleux monde des bornes rapides fut trop forte.
Depuis 2021 et une première station installée à Vesoul, Dream Energy compte à date 13 stations, soit 72 bornes. Un objectif de 300 stations (comprenant chacune entre 4 à 10 bornes) est prévu à terme, principalement dans les parkings d’hôtels et de supermarchés.
« Des emplacements qui nous permettent de fournir des services pendant la recharge », nous explique Nathan Dubois-Stora, le responsable du développement des stations – pensons ici petit coin et restauration. Avant d’ajouter : « nous fournissons les stations clefs en main, sans que le propriétaire du parking n’ait à débourser quoi que ce soit ».
Le tarif ? 0,59 centime du kWh, un chiffre tout à fait dans le marché. Une tarification « dynamique » est en cours d’étude, comme sur les Superchargeurs de Tesla, afin de moduler le prix de la recharge en fonction de la journée — notamment lorsque l’énergie est abondante et bon marché. Une stratégie manifestement creusée par Ionity en parallèle.
Bien entendu, Dream Energy avance comme argument phare sa double casquette de producteur et de fournisseur d’énergie renouvelable, tout en mettant en avant ses stations modernes et puissantes. Dont acte.
L’exemple de la station de Nancy – Laxou
Partons justement à la découverte de l’une d’elles, pas très loin de la centrale de Baccarat. Ça se passe dans le parking d’un hôtel en périphérie de Nancy, où trois bornes flambant neuves, même pas encore stickées, nous attendent. En vedette, deux bornes Siemens SichargeD possédant deux prises CCS chacune.
Des bornes performantes, puisqu’elles peuvent monter à une puissance maximale de 300 kW (avec un partage de la puissance si deux voitures électriques sont branchées simultanément) et 1 000 volts (parfait, donc, pour les modèles équipés d’une architecture 800 volts, comme certaines Kia et Hyundai, mais également les Porsche).
En parallèle, une troisième borne multistandards est installée, comprenant une prise CCS de 120 kW, une CHAdeMO de 50 kW et une troisième Type 2 en courant alternatif de 22 kW (si vous ne comprenez rien, on a fait un récap de toutes les prises disponibles).
« Une borne obligatoire pour chaque station de charge rapide », nous précise Nathan Dubois-Stora, « et qu’on n’aurait probablement pas installée si la réglementation n’existait pas » – à raison : mis à part la Nissan Leaf et le Lexus UX300e, deux modèles de niche utilisant une prise CHAdeMO, l’intégralité des véhicules électriques compatibles avec une charge rapide vendus en Europe disposent d’une prise CCS.
Comment ça s’installe, une station ?
L’occasion est trop belle pour ne pas approfondir les dessous de l’installation et du dimensionnement d’une station de charge rapide. Tout commence par une demande de raccordement à Enedis, où l’opérateur de charge listera le cahier des charges de la station — avec notamment le nombre de kVA, qui déterminera l’abonnement que facturera Engie à l’opérateur. Pour celle de Nancy – Laxou, par exemple, on tape sur du 1 000 kVA. Largement suffisant pour alimenter les 720 kW que peuvent demander les 3 bornes en instantanée.
Une fois cette demande acceptée, une déclaration préalable est écrite – il s’agit en gros d’une version « allégée » d’un permis de construire, dû à l’emprise réduite des travaux. Ensuite, zou ! On installe le transformateur, les bornes, et on attend le raccordement au réseau.
Un processus assez simple à première vue, mais qui est tout de même assez long : comptez environ un an entre la demande de raccordement et mise en service de la station. Ah, et les coûts ? Pour cette station de trois bornes/six points de charge et 1 000 kVA, l’ardoise tourne autour 500 000 euros tout compris. Un sacré investissement, donc. Encore plus lorsqu’on compare avec les coûts estimés des Superchargeurs de Tesla, de l’ordre de 42 000 dollars par borne installée.
Interrogé sur la possibilité d’installer une ombrière photovoltaïque sur les stations, comme les derniers Superchargeurs Tesla, Nathan Dubois-Stora est plus dubitatif. « C’est une solution qu’on peut proposer, mais elle est assez contraignante », nous explique-t-il.
« Il faut dans ce cas demander un permis de construire, ce qui prend beaucoup de temps, d’autant plus que les bénéfices sont minimes par rapport aux besoins de la station : aux environs de 30 kW crête max avec une installation qui couvre les trois bornes, bien loin des besoins en puissance de la station ». Soit, concentrons-nous donc sur les centrales.
On dit oui
Bref, une initiative que nous ne pouvons qu’applaudir, puisqu’elle contribue directement à rendre la voiture électrique encore plus propre au quotidien. Et une sorte d’avant-goût de l’avenir, puisque les mix énergétiques ne feront que s’améliorer au fil du temps, avec en parallèle l’arrivée de technologies innovantes.
Parlons ici du V2G (que proposera par exemple la Renault 5 E-Tech), qui permettra d’utiliser la batterie de sa voiture électrique pour alimenter sa maison ou le réseau dans son ensemble. Nous n’en sommes qu’aux débuts de l’aventure électrique, et le futur s’annonce excitant.
Rendez-vous un mercredi sur deux sur Twitch, de 17h à 19h, pour suivre en direct l’émission SURVOLTÉS produite par Frandroid. Voiture électrique, vélo électrique, avis d’expert, jeux ou bien témoignages, il y en a pour tous les goûts !
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