
La conception d’une batterie de voiture électrique est un jeu d’équilibre entre performances, longévité et sécurité. Il s’agit en effet de fournir les meilleurs puissances de décharge et de recharge tout en respectant des plages de température, de tension, etc., pour assurer la longévité et la sécurité de la batterie.
Assurer la sécurité d’une batterie c’est essentiellement éviter qu’elle ne prenne feu. Des courants trop forts — avec des seuils qui varient fortement selon la température, le niveau de charge ou l’état de santé de la batterie — peuvent effectivement causer une surchauffe puis un emballement thermique ou des réactions chimiques entrainant un court-circuit.
Il faut aussi veiller à l’intégrité physique de la batterie. Il faut notamment éviter qu’un choc ou une collision ne perce ou ne plie les cellules, pour éviter que les feuilles constituant les anodes et les cathodes n’entrent en contact, ce qui entrainerait également un court-circuit, un emballement thermique et un incendie.
Dans un premier article, Porsche nous a présenté les théories gouvernant la conception de ses batteries. Dans ce second article, le constructeur nous montre comment il s’assure que la pratique rejoint la théorie. L’après-midi de la journée que nous avons passée dans son centre de recherche et développement à Weissach, Porsche nous a effectivement expliqué les nombreux tests auxquels il livre ses batteries et ses voitures en développement.
Pour aller plus loin
Des ingénieurs Porsche nous dévoilent les secrets des batteries qui durent plus de 300 000 km en se rechargeant très rapidement
15 ans et 300 000 km dans le pire des cas
Porsche revendique que ses batteries ont une durée de vie d' »au moins 15 ans » et de « plus de 300 000 km », et ce pour tous les marchés, tous les climats et tous les cas d’usage. Autrement dit, le constructeur promet cette longévité dans le pire des cas. Ses voitures électriques ne sont garanties « que » 8 ans et 160 000 km, dans la moyenne du marché, mais on peut étendre cette garantie jusqu’à ces 15 ans et 300 000 km.
Concrètement, Porsche valide un développement si la batterie conserve au moins « 70 à 80% » de sa capacité d’origine après 300 000 km avec 50% de recharge rapide. La recharge rapide, qui est, avec l’âge, l’un des principaux facteurs de vieillissement d’une batterie, représente en moyenne 15% des recharges. Selon des études portant sur divers constructeurs, la recharge rapide entraine un vieillissement 0 à 30% supérieur à la recharge lente.
300 mètres carrés pour tout tester
Pour revendiquer une telle longévité, Porsche dit être le premier constructeur à utiliser un banc d’essai intégré, grâce auquel il teste ses batteries dans toutes les conditions avant même d’avoir fabriqué le premier prototype de voiture. Le High-voltage system test bench (HVV) est une installation impressionnante qui occupe 300 mètres carrés sur 3 étages.



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La batterie haute tension est installée au niveau inférieur dans une chambre climatisée dont on peut varier la température de -30°C à 60°C. Elle est reliée au BMS (Battery Management System), aux moteurs et au reste du système haute tension installés au niveau supérieur. Quatre load machines de 250 kW chacune (335 ch) y sont reliées aux moteurs pour simuler toutes sortes de comportements routiers. La salle intègre également un chargeur pouvant simuler tous les standards de recharge lente et rapide. Les freins en revanche ne font pas partie du système.
Cette installation permet de tester un système dans toutes les situations : dans des conditions optimales, dans un climat chaud ou dans un climat froid, en usage normal ou dans toutes sortes d’utilisations abusives. Le banc d’essai permet par exemple de tester un démarrage pleine puissance, des tours de circuit, de l’autoroute à très haute vitesse, en simulant l’adhérence des pneus, l’aéro… Il permet aussi de simuler une conduite en ville, des interférences, des surcharges, des coupures, des pannes, etc.
En permettant de multiplier les tests avec une forte reproductibilité, le HVV permet selon Porsche un développement plus rapide, moins couteux, avec on le suppose davantage d’itérations, avant la fabrication du 1er prototype roulant.
Détour au car wash
Passons brièvement sur les tests d’étanchéité : plongée à 1 m de profondeur, la batterie doit rester hermétique et continuer à fonctionner. Plus concret : on s’assure que la batterie et les câbles résistent à la vapeur et aux jets d’un nettoyage haute pression (« Kärcher »). On vérifie enfin la résistance à la corrosion en recouvrant la batterie de saumure et d’autres substances.

Plus de 100 crash tests par voiture en développement
Après avoir soumis les batteries à toutes ces contraintes électriques et chimiques, il reste à tester la sécurité passive des voitures. Porsche dispose pour cela d’une piste de crash tests, une installation intérieure de la taille d’une cathédrale, aux chiffres plus impressionnants les uns que les autres.
Les voitures électriques présentent des défis de sécurité spécifiques : elles n’emportent pas de carburant inflammable, mais il faut minimiser le risque de dommages des cellules, qui risquent autrement de prendre feu, et minimiser le risque d’électrocution.
Fixée sous la voiture, la batterie est entièrement recouverte d’un épais fond plat. Puis l’enveloppe de la batterie et la plaque de refroidissement forment deux couches de protection supplémentaires entre les cellules et le dessous de la voiture. Surtout, les chemins de charge de la carrosserie pour absorber l’énergie d’une collision sont adaptés à la masse supérieure d’une voiture électrique et sont conçus de telle sorte que la batterie soit placée là où cette énergie est la plus faible.

Des capteurs détectent en outre le plus tôt possible un choc critique pour déconnecter dès que possible les composants haute tension et minimiser les risques d’électrocution.
Après quelques milliers de simulations informatiques, Porsche teste enfin la sécurité passive de ses voitures, avec de vraies voitures, sur sa piste de crash tests. Ils crashent plus de 100 voitures pendant le développement d’une nouvelle voiture. Certaines sont utilisées plusieurs fois, d’autres sont à usage unique. L’équipe passe commande des voitures presque comme un client, en choisissant parmi les innombrables combinaisons d’options sur le « configurateur ». S’ils choisissent souvent une peinture contrastée, ils varient en revanche des équipements susceptibles d’influer sur la sécurité, tels que les fauteuils.
La zone de crash test est constituée de deux pistes au croisement desquelles on peut projeter jusqu’à 120 km/h une voiture et une « dummy car » d’un maximum de 7 tonnes (les tests s’en tiennent toutefois à 80 km/h). 8 caméras de chaque côté, 3 caméras au dessus et 3 caméras en dessous (à travers un sol vitré), soit un total de 22 caméras, filment chacune l’accident à 10 000 images par seconde.
Pour notre part, nous n’avons malheureusement pas assisté au crash test, mais nous avons vu le résultat d’une collision latérale à 32 km/h entre un Porsche Macan et un poteau fixé à un énorme bloc de béton de… 120 tonnes. Dans « notre » crash, d’une couverture de 60% (40% des accidents sont plus graves), la carrosserie est assez pliée pour envoyer la voiture à la casse, mais elle n’a fait qu’égratigner la languette métallique encadrant la batterie, qui est donc restée intacte.
Porsche assure en définitive que ses voitures électriques sont au moins aussi sécurisées que ses thermiques. En tout cas, tous constructeurs confondus, il y a selon les études 5 à 60 fois plus d’incendies de voitures thermiques que d’incendies de voitures électriques.
Guerre de l’innovation
Porsche affirme qu’il invite rarement la presse dans son centre de recherche et développement, à Weissach, où circulent en ce moment des prototypes de moins en moins camouflés des futurs Cayenne et 718 électriques, entre autres futures 911.
L’invitation du constructeur survient au milieu d’un agenda médiatique chargé pour l’innovation dans le domaine de la voiture électrique. D’une part, Renault s’est illustré sur le front de la sécurité avec la démonstration et l’annonce de l’ouverture des brevets du « Fireman Access », qui facilite considérablement l’extinction des feux de batterie. D’autre part, les constructeurs chinois prennent le lead sur les puissances de recharge, qui atteignent 1000 kW chez certains.
Pour aller plus loin
On a rechargé une voiture électrique BYD en 5 minutes : récit de cette expérience hors norme
Le constructeur allemand contre attaque en tirant la couverture à lui sur la sécurité et la longévité. Au lieu de chercher le gagnant de cette guerre, on préfère se réjouir de cette compétition, et on espère qu’elle continuera comme ici à nous ouvrir les portes des constructeurs.

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