Pourquoi BMW lance un SUV à hydrogène alors que les voitures électriques existent

Pour des raisons peu évidentes

 

BMW vient tout juste de lancer sa BMW iX5 à hydrogène, sous forme de programme pilote. Une centaine de voitures à hydrogène seront produites pour faire la promotion de ce type de motorisation. Oliver Zipse, le patron de BMW, en profite pour affirmer qu'il ne croit pas aux voitures électriques avec batteries. En utilisant des arguments... un peu datés ! On vous explique tout.

La voiture à hydrogène fait énormément parler d’elle en ce moment. Au dernier Mondial de l’Auto à Paris, en octobre 2022, deux entreprises françaises présentaient des voitures à hydrogène : la NamX, un SUV à capsules interchangeables, et la Hopium Machina. On savait que BMW travaillait d’arrache-pied sur le projet d’une BMW X5 fonctionnant avec une pile à combustible, son nom : BMW iX5 Hydrogen. À l’époque, nous pointions alors du doigt la mauvaise idée que représente une voiture à hydrogène pour les besoins en mobilité légère.

BMW continue sur sa lancée et vient tout juste d’annoncer le lancement d’un programme pilote. Dans la pratique, une petite centaine de BMW iX5 Hydrogen seront produites dans les prochains mois, afin d’en faire la démonstration « pour différents groupes cibles » nous précise BMW dans son communiqué. Mais, si l’on en croit le média Automobile Propre qui a pu essayer la voiture, il s’agit d’en faire la promotion « auprès des médias et des institutions politiques ». Une sorte de lobby, en d’autres termes.

BMW ne veut pas uniquement de voitures 100 % électriques

Justement, le patron de BMW, Oliver Zipse, n’apprécie pas à 100 % les voitures électriques fonctionnant avec des batteries lithium. L’homme annonce, en faisant référence aux voitures électriques, qu’une « technologie à elle seule ne suffira pas à permettre une mobilité climatiquement neutre dans le monde entier » avant d’ajouter que « l’électrique en seule solution, je pense que cela ne peut pas être possible ».

BMW iX5 Hydrogen
BMW iX5 Hydrogen

Le PDG du groupe allemand fait alors référence à diverses problématiques : l’accès difficile aux bornes de recharge dans certaines zones géographiques, la rareté des matériaux utilisés dans les batteries et le poids de ces dernières. À l’inverse, il pense que l’hydrogène pourra résoudre tous ces problèmes. Grâce à un plein ultrarapide (on parle de moins de cinq minutes), beaucoup moins de matériaux utilisés (environ 500 grammes sur l’hydrogène contre 23 kg pour une batterie lithium NMC) et un poids plus contenu.

Sur ce dernier point, le BMW iX5 Hydrogen fait à peu près le même poids que le BMW X5 xDrive45e hybride rechargeable sur lequel il est basé. Soit 2,5 tonnes, c’est-à-dire environ 400 kg de plus que la version essence de ce même SUV. C’est par exemple le poids de la batterie d’une Tesla Model 3 Propulsion de 60 kWh qui ne contient pas de cobalt grâce à la technologie LFP. Mais, BMW a avoué ne pas avoir optimisé le poids de l’engin, pour le moment.

Le cobalt et le lithium, on n’en veut plus

Au sujet des matériaux utilisés, BMW précise que la pile à combustible d’une voiture à hydrogène a besoin de cobalt et de lithium en petites quantités pour la petite batterie tampon de 1,5 kWh, mais aussi de platinum pour la pile à combustible. Avant de comparer avec la voiture électrique à batterie qui a aussi besoin de cobalt et de lithium (en très grandes quantités), mais pas de platinum. Une comparaison en faveur de la voiture à hydrogène… mais le constructeur a oublié un petit détail.

BMW iX5 Hydrogen
BMW iX5 Hydrogen

Les batteries sans cobalt (LFP) représentent une part de plus en plus importante des ventes (environ 30 % à la fin 2022), mais il est vrai que les batteries intégrant du cobalt (NMC, NMA, etc.) représentent encore l’immense majorité des batteries commercialisées. C’était toutefois sans compter sur l’essor prévu des batteries sans lithium (et sans cobalt) : les batteries au sodium. Celles-ci arrivent dès cette année et sont prévues, dans un premier temps, pour les petites voitures électriques, type citadines.

Les avantages des voitures à hydrogène

BMW pense que les voitures à hydrogène peuvent être très utiles pour certaines utilisations : en plein hiver (car leur autonomie ne diminue pas vraiment avec le froid, contrairement aux voitures électriques), si l’on tire une remorque, ou si on habite dans une zone avec peu ou pas de chargeurs rapides. Les voitures à hydrogène sont bien plus rapides à recharger que les voitures électriques… pour le moment.

Il faut compter moins de cinq minutes pour faire un plein d’hydrogène (mais attention aux fuites, au potentiel de réchauffement global plus élevé que le CO2) contre environ 30 minutes sur une voiture électrique. Mais l’innovation dans le domaine est quasi révolutionnaire : en Europe, les meilleures voitures électriques nécessitent 18 minutes pour passer de 10 à 80 % de batterie. Des voitures électriques ne nécessitant que 10 minutes sur le même exercice sont prévues en 2023, grâce au géant chinois de la batterie, CATL.

Et c’est sans compter sur le système d’échange des batteries, mis en place par le constructeur chinois Nio en Europe, qui permet de faire le plein d’électrons en moins de cinq minutes. Nous avions d’ailleurs pu l’essayer en Allemagne, et l’expérience était bluffante.

BMW iX5 Hydrogen : une voiture électrique hybride ?

Passons maintenant au BMW iX5 Hydrogen en lui-même. Il est basé sur la BMW X5 hybride rechargeable et intègre une pile à combustible d’une puissance de 125 kW (170 ch). Celle-ci sert à alimenter directement le moteur électrique arrière, d’une puissance de 295 kW (401 ch). Si le moteur demande la pleine puissance, alors la pile à combustible est secondée par une petite batterie lithium-ion d’une capacité de 1,5 kWh, permettant d’ajouter 170 kW (231 ch) à l’ensemble.

La batterie est rechargée par la pile à combustible, grâce à l’hydrogène, mais aussi lors des décélérations, grâce au freinage régénératif. L’ensemble permet alors au SUV de passer de 0 à 100 km/h en 6 secondes, avec une vitesse maximale de 180 km/h. Les 6 kg d’hydrogène se traduisent par une autonomie théorique de 504 km sur le cycle mixte d’homologation WLTP. C’est autant qu’une Tesla Model 3 Propulsion prise en exemple un peu plus haut. On est donc loin des 1 000 km promis par certaines startups, ou les 2 000 km du projet avorté de Volkswagen.

D’ailleurs, les voitures électriques dotées d’une immense autonomie font bien mieux, à l’image de la Lucid Air annonce 883 km d’autonomie sur le cycle WLTP. À comparer aux 650 km de la Toyota Mirai et les 666 km de la Hyundai Nexo.

Les inconvénients des voitures à hydrogène

Sur le papier, la voiture à hydrogène a bien des qualités supérieures à la voiture électrique à batterie. Son plus grand avantage est sa capacité à se « recharger » en moins de cinq minutes. Mais malheureusement, cet avantage est vite effacé par de nombreux inconvénients.

Nous avons déjà abordé le risque de fuites, mais il faut également évoquer les autres problématiques, qui font que la voiture à hydrogène ne sera jamais une alternative à la voiture électrique à batterie. Citons le prix démesuré des stations de recharge à hydrogène, le rendement catastrophique des piles à combustible (qui implique deux à trois fois plus d’électricité pour parcourir une même distance qu’une voiture électrique), la demande mondiale d’énergie décarbonée qui nécessitera une quantité astronomique d’hydrogène vert, mais aussi le prix de ce dernier.

C’est pour toutes ces raisons que le GIEC imagine l’hydrogène comme un vecteur d’énergie à destination des modes de transport qui ne peuvent pas être basés sur des batteries. C’est le cas des transports lourds (aviation, maritime, poids lourds, etc.), même si le Tesla Semi prouve que le transport routier lourd peut s’envisager avec des batteries.


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