Les longs trajets en voiture électrique : entre réalité et ignorance chez Franceinfo

 
La transition vers la voiture électrique génère son lot de mythes et de malentendus, en particulier lorsqu’il s’agit de longs trajets. Les préjugés ont la vie dure, et un récent article de Franceinfo a soulevé plus de questions qu’il n’a apporté de réponses. Penchons-nous sur ce cas pour distinguer la réalité de la désinformation et mettre en lumière ce qu’est vraiment un long trajet en voiture électrique en 2023.
Peugeot e-208
La Peugeot e-208 // Source : Peugeot France

« Pour savoir si la voiture électrique est compatible avec de longs trajets, si elle est plus rentable qu’un véhicule essence, Franceinfo a pris la route des vacances. Un trajet de 450 km entre Paris et Pornic, en électrique, au fil des bornes de recharge. ». Le sujet des longs trajets en voiture électrique revient chaque été dans les médias généralistes, et c’est toujours un sujet délicat. Pourtant, à une époque où l’électrique se généralise, les erreurs d’appréciation et la désinformation sur le sujet sont de moins en moins excusables.

Repenser nos trajets à l’ère électrique

La transition vers l’électrique n’est pas un simple changement de carburant, mais bien une révolution de nos habitudes de conduite. Les trajets doivent être planifiés différemment, avec la nécessité de prévoir les arrêts pour la recharge de la batterie.

Cela peut sembler intimidant, mais heureusement, de nombreuses marques intègrent aujourd’hui des planificateurs de trajet intelligents pour simplifier cette tâche. Tesla, Volvo, Renault, ou encore les constructeurs allemands, proposent tous cette fonctionnalité. Mais ce n’est pas le cas sur tous les véhicules électriques.

Cependant, un élément gênant émerge de l’article de Franceinfo : « Pour 600 km, j’ai six heures de charge donc trois arrêts. Ça fait beaucoup. Là, j’attends depuis près d’une heure et 20 minutes donc je m’occupe, je bois un café, je mange ». Ce chiffre est surprenant, et largement supérieur aux estimations fournies par l’application gratuite A Better Route Planner (ABRP), qui recommande 2 recharges pour un total de 42 minutes pour un trajet de 438 km. Qu’est-ce qui a pu se passer pour engendrer une telle différence ?

Comprendre les limites de la recharge

Une première piste est la méconnaissance des principes de recharge des batteries électriques. ABRP conseille des charges à 70 % maximum pour optimiser le temps de trajet. En effet, les derniers pourcentages de batterie prennent plus de temps à se charger, donc il est plus rentable de charger à 70-80 % maximum, puis de repartir et viser une décharge à 5 à 15 % avant la prochaine recharge.

L’erreur ici est donc de chercher à recharger la batterie complètement à chaque arrêt, ce qui n’est pas optimal pour les longs trajets.

Une expérience hors norme ?

« Après huit heures de route, sans compter les embouteillages, la destination est atteinte : Pornic. (…) D’un point de vue financier, le montant dépensé en recharge est quasiment le même qu’un plein d’essence.».

Encore une fois, ces chiffres sont surprenants et ne reflètent pas la réalité de la majorité des conducteurs électriques. Le temps de trajet est trop long, et le coût de recharge ne devrait normalement pas égaler celui d’un plein d’essence.

La grande question que tout le monde se pose, c’est, combien coûte la recharge d’une voiture électrique ? La réponse est difficile à apporter, puisqu’elle dépend de nombreux paramètres, et notamment le coût de la recharge de chaque réseau (IonityTesla, TotalEnergies, etc.). Nous avons déjà apporté un élément de réponse, en comparant le prix dans chaque réseau.

Ce qu’il faut retenir, c’est qu’il faut compter entre 5 et 16 euros pour 100 km lors d’une recharge en station, sur un trajet autoroutier. À comparer avec les 3,5 euros d’une recharge à domicile, et les 12 euros aux 100 km en moyenne pour une voiture thermique. Nous proposons toute une série d’articles à ce sujet.

L’influence du véhicule sur l’expérience

Un élément important à prendre en compte est le véhicule utilisé pour le trajet. La Peugeot 208 électrique, qui semble être utilisée dans cet essai, n’est pas spécifiquement conçue pour de longs trajets, mais plutôt pour une utilisation urbaine. C’est vrai qu’elle possède la charge rapide avec un chargeur CCS, mais sa courbe de charge est mauvaise. Elle atteint sa puissance maximale de charge seulement lorsque la batterie est très déchargée.

La prise de charge Combo CCS à 100 kW sur le Peugeot e-208, mais la courbe de charge n’est pas un point fort de ce véhicule sur les précédentes versions

Ces limitations ne sont pas représentatives des voitures électriques actuelles, qui offrent une autonomie accrue, des temps de charge réduits, des courbes de charge efficaces et des calculateurs de trajets performants.

Désinformation, ignorance ou travail bâclé ?

L’article de Franceinfo a suscité des réactions sur Twitter, certains l’accusant de désinformation et de parti pris. Au-delà de ces accusations, il est regrettable de voir une telle confusion sur un sujet aussi important que la mobilité électrique. Tenter l’expérience avec une Peugeot e-208 ou une Renault Zoe peut s’avérer un piège, et le journaliste de Franceinfo est clairement tombé dedans.

L’électrique est l’avenir de la mobilité, et il est crucial que l’information sur ce sujet soit précise et fiable pour permettre à chacun de se faire une opinion éclairée. Pour finir, une anecdote mal préparée et mal documentée ne devrait pas servir de référence pour évaluer la performance des voitures électriques sur de longs trajets. Il est vrai que le réseau est tout juste dimensionné pour les périodes les plus chargées et qu’il faut que les déploiements de bornes continuent à suivre de près les ventes de voitures électriques.

Multipliez les sources d’information

Si vous envisagez l’achat d’une voiture électrique, nous vous conseillons de multiplier les sources. Vous pourrez ainsi lire des témoignages concordants chez les confrères qui sont eux aussi partis en vacances en voiture électrique. Par exemple celui de Garage, Bagnoles et Rock’n Roll.

En somme, chacun jugera en son âme et conscience où il met le curseur entre considérations financières (investissement de départ, économies à long terme), menues contrariétés et urgence climatique.

De plus, gardons à l’esprit que nous en sommes encore aux balbutiements de l’ère de la voiture électrique. On peut s’attendre à de nombreuses innovations en matière d’autonomie et de recharge rapide dans un avenir proche.


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