
Il y a quelques années, dans un passé pas si lointain, la grande messe de l’automobile se déroulait à Genève, à l’occasion du salon éponyme. C’était le rendez-vous de la voiture d’exception, mais pas que, puisque les constructeurs présentaient à tour de bras leurs nouveautés, de la plus accessible à la plus puissante, en passant par tous les extrêmes, même en termes de prix.
Mais depuis la crise du Covid-19, le Salon de Genève n’est plus, ou n’est plus que l’ombre de lui-même. Un temps délocalisé au Qatar, il est revenu dans ses bases historiques cette année, mais sans faire grand bruit puisqu’il s’agissait plutôt d’un salon dédié aux distributeurs locaux.
Mais où est donc passée l’effervescence automobile mondiale ? Ces quelques jours où toute la planète auto se retrouve ? Pas au Mondial de Paris, même si on en reprend (un peu) le chemin, un peu au CES de Las Vegas, rendez-vous incontournable pour certains constructeurs. Non, il faut aller du côté du Salon de Shanghai pour en prendre plein la vue.
Plein la vue en termes de design ? Pas vraiment. En termes de puissance, de sportives, de supercars ? Il y en a quelques-unes, plutôt intéressantes d’ailleurs, mais nous n’y allons pas pour ça. Non, Shanghai c’est une effervescence de nouvelles voitures, chinoises pour la plupart, qui intègrent des technologies toujours plus avancées, dont seuls les constructeurs chinois ont le secret désormais. Mais en 2025, il n’y a pas que les marques chinoises qui ont fait grand bruit à Shanghai.

Sur le stand Audi, un véhicule attire immédiatement l’attention. Ce n’est pas seulement sa silhouette longue, effilée, sa teinte violette, ou son allure de break futuriste sans calandre apparente. Ce qui marque surtout, c’est son logo, si on peut encore appeler cela ainsi. Pas celui aux quatre anneaux emblématiques d’Audi, mais un nouveau logo surmontant le nom AUDI, écrit en majuscules.
Ce détail, loin d’être anecdotique, marque une rupture. L’AUDI E5 Sportback incarne la réponse du constructeur allemand aux nouveaux standards de l’électromobilité en Chine. Mais plus encore, il illustre un basculement de pouvoir inédit dans l’histoire récente de l’automobile.
Une Audi chinoise, par et pour la Chine
L’AUDI E5 Sportback n’est pas seulement un nouveau modèle : c’est une redéfinition complète de l’ADN de la marque, façonnée non pas à Ingolstadt, en Allemagne, mais à Shanghai.
Développée main dans la main avec le constructeur chinois SAIC, propriétaire de MG et de Maxus notamment, l’E5 repose sur une plateforme inédite baptisée « Advanced Digitized Platform ». Elle permet des performances impressionnantes : une autonomie de près de 770 km selon le cycle chinois CLTC, des mises à jour à distance pour toutes les technologies embarquées, le tout avec des performances de premier ordre.

La voiture est équipée des dernières technologies de l’industrie automobile : LIDAR pour la conduite autonome, reconnaissance des feux de circulation, stationnement autonome…


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Un véritable condensé de ce que les clients chinois attendent d’une voiture de demain et de ce que le reste du monde commence à regarder avec envie.
Quand le maître devient l’élève
Cette co-conception entre Audi et SAIC n’est pas un cas isolé. Elle symbolise un changement assez profond en Chine, mais encore peu palpable chez nous, en Europe : les constructeurs chinois, longtemps considérés comme des élèves apprenant des géants occidentaux, deviennent désormais des sources d’innovation, et même plus encore.
Volkswagen, par exemple, a présenté trois nouveaux concepts électriques inspirés directement de la concurrence chinoise : les ID. Evo, Aura et Era. Développés avec SAIC et FAW, ils intègrent une architecture 800 volts (que le groupe ne propose pas encore en Europe, hormis sur certaines Audi et Porsche), des ADAS boostées à l’intelligence artificielle et des modèles hybrides rechargeables à l’autonomie impressionnante, qui dépasse régulièrement les 1 000 km en cumulant moteur thermique et électrique.

Et il n’y a pas que les constructeurs européens qui cèdent aux sirènes chinoises. Chez General Motors, c’est Buick qui tente de se réinventer en Chine. Autrefois symbole d’un statut à part, la marque américaine s’est marginalisée. Elle revient aujourd’hui avec une nouvelle plateforme « Xiao Yao » pour véhicules électriques et hybrides, également conçue avec SAIC, et utilisant les batteries de CATL capables de regagner jusqu’à 350 km d’autonomie en seulement 10 minutes de charge.
Toyota, de son côté, affiche clairement la couleur : sa gamme bZ (pour « beyond Zero ») a été développée avec les entreprises chinoises FAW, GAC et BYD. Son nouveau modèle phare, le bZ7, est destiné exclusivement au marché chinois, avec un design épuré, des technologies de pointe issues de chez Huawei, autres géants chinois de la tech’, et une conception axée sur la demande des clients chinois.

Pendant ce temps en Europe, Toyota peine encore à proposer des modèles électriques convaincants, à l’image du bZ4X déjà vieillissant. L’Urban Cruiser pourrait redonner un peu d’allant à la gamme électrique du constructeur.
Comment la Chine mène-t-elle désormais la danse ?
En moins d’une décennie, les marques locales sont passées de 30 % à 60 % de parts de marché en Chine. Ce bouleversement ne s’explique pas seulement par le soutien massif du gouvernement chinois, les subventions ou la maîtrise de la chaîne d’approvisionnement des batteries. Il repose avant tout sur une compréhension du marché, une capacité à innover rapidement et une écoute constante du client.
Et ça pour le coup, c’est bien palpable en Europe, car les quelques marques chinoises commercialisées en Europe, comme MG ou BYD, ont une capacité à écouter et à éliminer les défauts de leurs autos en un temps record. Preuve en est : notre dernier essai du MGS5 EV, remplaçant du ZS EV, qui a quasiment gommé tous les défauts que l’on reprochait à son prédécesseur.

Pour plusieurs analystes du marché automobile, le client chinois est aujourd’hui « le plus gâté au monde ». Il bénéficie d’une offre pléthorique, de prix compétitifs et d’innovations constantes. Et il ne se contente plus d’avoir une belle voiture ou un nom prestigieux sur le capot : il veut tout à la fois. Conduite autonome, assistants vocaux, mises à jour logicielles, design futuriste et autonomie record. Le beurre et l’argent du beurre en somme.
Les marques occidentales ont construit leur réputation dans l’ère des véhicules thermiques. Cette réputation ne se transfère pas automatiquement sous l’ère des véhicules électriques, preuve en est avec les résultats devenus catastrophiques en Chine pour certains constructeurs au nom prestigieux : Porsche, Audi, Mercedes, BMW… Tous enchaînent revers sur revers, sur un marché autrefois qualifié d’Eldorado. Et forcément, avec le ralentissement global du marché automobile mondial, ça commence à peser sur les finances.
Audi, symbole d’un revirement stratégique
Il y a encore dix ans, Audi régnait sur le marché chinois du haut de gamme automobile. Les A6, A7 et autres A8 étaient des symboles de réussite professionnelle.
Aujourd’hui, les acheteurs chinois préfèrent les modèles haut de gamme de BYD (notamment via sa nouvelle marque Denza), Xpeng, Nio ou Li Auto, perçus comme plus modernes, plus connectés et plus en phase avec leurs attentes. Surtout, comme le client européen, le fait que ces voitures soient chinoises est aussi un argument d’achat.

La baisse de 11 % des ventes d’Audi en Chine l’année dernière en est la preuve. Pour contrer cette tendance, la marque allemande a opté pour une stratégie assez inédite. Portera-t-elle ses fruits ? Nous aurons la réponse d’ici quelques années, mais force est de constater que l’approche est effectivement assez différente de la stratégie globale de la marque que ce soit en Europe ou aux États-Unis.
Une révolution cantonnée à la Chine ?
Pour les passionnés d’automobile européens ou américains, l’E5 Sportback et ses consœurs peuvent faire rêver, même si cette profusion technologique n’est certainement pas l’argument numéro un des clients de ces marchés.
Toutefois, il est aujourd’hui peu probable qu’elles franchissent nos frontières dans un avenir proche. Entre les tensions commerciales, les hausses de droits de douane, et les mesures visant à de plus en plus s’isoler de la Chine commercialement parlant, il n’y a aucune raison tangible pour que nous ayons ne serait-ce qu’une bride de cette auto et de cette marque en général en Europe.

Aux États-Unis, le précédent gouvernement de Joe Biden avait interdit les composants matériels et logiciels chinois dans les véhicules commercialisés dans le pays, et Donald Trump a récemment renforcé les tarifs douaniers sur les véhicules importés de Chine. Des décisions soutenues par les deux camps politiques, au nom de la sécurité nationale, mais aussi pour protéger une industrie automobile américaine menacée de déclassement technologique. Comme en Europe en somme.
Mais pour combien de temps cette « muraille technologique » tiendra-t-elle ? Comme toute révolution industrielle, car c’est comme cela qu’on pourrait l’appeler aussi, ce qui se passe aujourd’hui en Chine finira par déborder ailleurs. Lorsqu’un client étranger (en l’occurrence européen dans notre cas) est exposé à ces technologies, il est évidemment envieux. Et si le prix est aussi abordable que nos voitures vendues aujourd’hui chez nous, alors effectivement, le danger est réel pour nos constructeurs, l’argument du « Made in China » n’étant plus un frein. C’est d’ailleurs l’un des rôles de l’augmentation des frais de douane : préserver nos constructeurs locaux en augmentant « artificiellement » le prix des voitures chinoises vendues chez nous.

D’une manière générale, les géants européens, américains, et même japonais n’ont plus le choix. Pour rester compétitifs, ils doivent soit accélérer leur propre transformation, soit continué à s’adosser aux nouveaux leaders technologiques chinois. Audi a fait le choix d’embrasser cette réalité, reste à savoir si d’autres constructeurs suivront.
Mais il semblerait que ce soit le prix à payer pour retrouver une dynamique sur le marché chinois qui est, aujourd’hui, le premier marché automobile mondial avec 22,9 millions de véhicules vendus en 2024 d’après l’association China Passenger Car Association, dont plus de 11 millions de véhicules électrifiés.
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